Tout commence en 1982, Ronald Reagan est à la Maison Blanche et George Bush à la vice-présidence. La guerre entre l'Iran et l'Irak, extraordinairement meurtrière, est commencée depuis déjà deux ans. En mai 1982, les Iraniens brisent l'offensive des forces irakiennes sur leur territoire et les obligent à un repli massif au-delà des frontières ; en juin, l'Iran lance à son tour une vaste offensive en territoire irakien. Les revers militaires de Bagdad inquiètent Washington et ses principaux alliés dans la région, les monarchies pétrolières du Golfe, qui redoutent soudain une défaite de Bagdad et un effondrement du régime de Saddam Hussein.
La première décision prise, cette année-là, par Washington, sera de retirer Bagdad de la liste des pays soutenant le terrorisme international. Une décision "totalement politique", selon Noël Koch chargé du programme de lutte contre le terrorisme au Pentagone. "Tous les rapports qui nous parvenaient indiquaient que Bagdad continuait avec la même intensité d'apporter son aide aux mouvements terroristes."
Une situation restée inchangée six ans plus tard puisque, en 1988, le secrétaire d’État adjoint John Whitehead écrivait : "Malgré son retrait de nos listes, Bagdad demeure un sanctuaire pour des terroristes bien connus." Et il citait notamment le cas d'Abul Addas qui avait détourné le paquebot Achille Lauro. Toujours en 1982, il fut décidé d'envoyer à l'Irak des armes et du matériel militaire, en les faisant transiter par des pays de la région, alliés des États-Unis. Les cargaisons expédiées en Jordanie, en Égypte... et au Koweït, furent ensuite, secrètement, acheminées à Bagdad. Parmi les équipements reçus par le régime de Saddam, on dénombrait 60 hélicoptères Hugues "à usage civil", mais il suffisait de quelques heures pour les transformer en engins de guerre, et des hélicoptères Bell pour "asperger les récoltes en pesticides".
Ces appareils servirent en 1988 à l'attaque chimique menée par Bagdad contre le village kurde de Halabaya qui fit plus de 5 000 morts dont un grand nombre de femmes et d'enfants.
Eric Laurent, La guerre des Bush