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Ukraine : le monde à l'envers

C'est le titre de l'éditorial qu'Eric Denécé, directeur du centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), consacre à ce sujet. Pour mémoire, on rappellera que ce centre a publié sur la Libye et la Syrie deux rapports de très haute qualité, dont l'évolution des situations dans les pays respectifs n'a fait que confirmer la pertinence (on les trouve ici). Extrait de l'éditorial, sur les errements de la diplomatie française.

 

"Après ses errements en Libye (2011) et en Syrie (2013), voilà de nouveau notre diplomatie en train de se fourvoyer en Ukraine. A défaut d'une vision ou d'une stratégie, la diplomatie française s'agite à chaque crise, tentant d'occuper le premier plan, confondant visiblement communication et réflexion.

Début mars, le président Hollande a salué « la transition démocratique qui s'engage » à Kiev, ignorant probablement que le pouvoir qui était en place auparavant était issu des urnes et avait été renversé par la violence. Puis, il a fermement rappelé, le 6 mars, « son attachement à l'intégrité territoriale du pays ». Sans doute ses conseillers ont-ils omis de lui rappeler le précédent du Kosovo et, surtout, celui de Mayotte. Rappelons également les déclarations pathétiques, inappropriées et stupides du représentant français à l'ONU comparant la situation actuelle en Crimée à l'entrée des chars soviétiques à Prague, en 1968.

Notre politique étrangère semble être fondée sur une perception puérile et partiale des « bons » et des » méchants », si ce n'est sur une appréciation totalement erronée des situations. Or, l'émotion et l'indignation - surtout lorsqu'elles sont infondées - ne sauraient remplacer l'analyse objective des situations au regard du droit, de la géopolitique et de nos intérêts. Seul Hubert Védrine, l'ex ministre des Affaires étrangères, a fait des propositions sensées.

Plus grave, tout se passe comme si nous faisions exactement ce que souhaitent les Américains, sans même qu'ils nous le demandent, comme si la diplomatie française s'était convertie à une vision néoconservatrice du monde. Or cette attitude du serviteur zélé ne nous procure aucune considération - à l'image du revirement américain sur la Syrie dont nous n'avons pas été prévenu - ni bénéfice - comme en témoigne l'absence de retombées économiques de notre intervention en Libye -, nous laissant dans la position peu enviable du dindon de la farce."

Paula Corbulon

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