Pas de surprise au sein du nouveau gouvernement. On prend les mêmes et on recommence. François Hollande continue son dialogue de sourds avec la France, non seulement celle qui se dresse contre lui, mais même celle qui l'a élu...
Le soleil printanier était de sortie à Paris ce mercredi 2 avril au moment de l'annonce du nouveau gouvernement par le Préfet Pierre-René Lemas, secrétaire général adjoint de l'Elysée. La voiture présidentielle venait de quitter l'Elysée, François Hollande se rendant à Bruxelles, comme s'il laissait les clefs de la maison à son nouveau premier ministre, Manuel Valls, nommé la veille à Matignon. La liste égrenée sur le perron du palais présidentiel en a surpris plus d'un. Même politique, mêmes hommes et femmes: visiblement, François Hollande n'a rien entendu du mécontentement des Français et de son propre camp politique ! Seize ministres (en attendant la nomination des secrétaires d'Etat dans un second temps), et seulement deux nouveaux entrants : Ségolène Royal (photo), ancienne compagne du président de la République, et François Rebsamen, sénateur-maire de Dijon et proche du chef de l'Etat.
Sans les Verts mais avec le PRG
Les Verts ayant refusé, non sans difficultés internes, de participer à nouveau au gouvernement, seul le Parti radical de gauche de Jean-Michel Baylet accompagne les ministres socialistes grâce à Sylvia Pinel, ministre du Logement et avant-dernière dans l'ordre protocolaire. Chez les Verts, les parlementaires étaient favorables au maintien des leurs au gouvernement, mais l'équipe dirigeante, Cécile Duflot en tête, franchement hostile. Le Front de gauche est naturellement absent et de plus en plus dans l'opposition au PS.
Pour être exhaustif, notons la naissance de divergences au sein des radicaux de gauche, très n pointe concernant les évolutions de la société mariage » gay, euthanasie, avortement, PMA…). Le sénateur Baylet, très proche de Pinel, son ancienne collaboratrice a déclaré : « Le président de la République, François Hollande, après avoir choisi Manuel Valls pour Matignon a une nouvelle fois fait preuve de courage politique en nommant un gouvernement resserré et paritaire. Le PRG prendra toutes ses responsabilités et soutiendra ce nouveau gouvernement. » Au contraire le député PRG du Calvados, Alain Touret est nettement plus circonspect : « On peut regretter que le Parti socialiste truste comme d'habitude tous les postes. Son incapacité à s'ouvrir, son échec dans les négociations avec les Verts constitue un handicap sérieux qu'il risque de payer cher lors des prochains rendez-vous électoraux. » C'est dire l'état d'isolement du parti socialiste.
Royal et Rebsamen
Rentrons dans le détail des nominations : Laurent Fabius conserve la haute main sur le ministère des Affaires étrangères, Christiane Taubira le portefeuille de la Justice, Marisol Touraine celui des Affaires sociales et Jean-Yves Le Drian, celui de la Défense. Benoît Hamon, caution de la gauche du Parti socialiste au sein de ce gouvernement, hérite du ministère de l'Education nationale jusque-là détenu par Vincent Peillon, prié d'aller siéger à Bruxelles à partir de la fin du mois de mai. Un militant de gauche remplace un idéologue de gauche... Bercy est partagé en deux portefeuilles entre les Finances dévolues à Michel Sapin, autre proche de Hollande, et l'Economie qu'est censée redresser Arnaud Montebourg... François Rebsamen fait donc son entrée au ministère du Travail. Et Bernard Cazeneuve, ancien maire de Cherbourg, hérite d'un ministère de l'Intérieur bien pâle sur lequel, manifestement, Hollande et Valls veulent garder chacun le contrôle direct. Manuel Valls y aurait bien vu Jean-Jacques Urvoas et François Hollande, de son côté, y poussait Rebsamen. Il y a eu finalement arbitrage entre les deux têtes de l'exécutif.
Reste ensuite les postes annexes : Najat Vallaud-Belkacem aux Droits des femmes, à la Ville, à la Jeunesse et aux sports (exit donc Valérie Fourneyron), Marylise Lebranchu à la décentralisation, Aurélie Filippetti reconduite à la Culture, Stéphane Le Foll de nouveau à l'Agriculture, et George Pau-Langevin, qui prend le poste de ministre des Outre-Mer.
Quelle durée de vie ?
Vincent Peillon paye comme prévu l'échec programmé de la réforme des rythmes scolaires et Pierre Moscovici les mauvais résultats de l'économie française. Les catholiques et plus largement les opposants au mariage homosexuel sont une fois de plus méprisés par François Hollande : Manuel Valls, symbole de la répression des militants de droite, est à Matignon et Christiane Taubira, que la LMPT donnait partante, est reconduite comme garde des Sceaux. Très libéral-démocrate, fortement teinté de maçonnisme et de laïcisme, ce gouvernement va développer une politique hostile au catholicisme et à l'intérêt général. Il va s'acharner à défendre une vision technocratique et prométhéenne de l'Europe.
Dans ce gouvernement, il n'y a évidemmentpas de ministère de la Famille, comme il n'y aétonnement pas de ministère des Affaires européennes malgré la complexité des dossiers qui s'yrattachent. Comme le résume bien dans son communiqué, le président du CNIP Gilles Bourdouleix : « Combien de temps tiendra ce gouvernement ? » Cette question est la seule qui vaille,tant le pouvoir donne l'impression d'être KOdebout, incapable de se remettre en question etde défendre les intérêts de la France. Les mois quis'annoncent seront difficiles.
Jacques Cognerais monde & vie. 9 avril 2014