Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

UMP : la guerre de l'intérim est déclarée

Carole Barjon est Rédactrice en chef adjointe au service de politique intérieure. Spécialiste de la droite. A longtemps dirigé la rubrique « Téléphone Rouge ». Auteur de « Si on me cherche » avec François Chérèque (Albin Michel, 2008) et de « Le Coup monté » avec Bruno Jeudy (Plon, 2013). Etudes de droit et Centre de formation des Journalistes. Utilise Twitter avec modération, convaincue qu’il ne faut s’exprimer que lorsqu’on a vraiment quelque chose à apporter.
Un bureau politique doit nommer mardi un président par intérim. Avec deux grains de sable pour le triumvirat Fillon-Juppé-Raffarin : la présidente de la Haute Autorité et le directeur général du parti.
Face à la perspective d'un retour rapide de Nicolas Sarkozy, la résistance s'organise à l'UMP. Alain Juppé et François Fillon sont en effet décidés à ne rien lâcher, lors du bureau politique prévu mardi en fin de journée. A en juger par les conversations de la semaine passée entre les responsables du parti, Juppé et Fillon d'un côté, Raffarin et sarkozystes de l'autre, la réunion de mardi s'annonce un rien tendue.
Mais d'autres débats, plus techniques, ont opposé les collaborateurs des premiers et la présidente de la Haute Autorité, Anne Levade. Cette agrégée de droit public, chargée d'organiser les primaires de 2016, est celle vers laquelle les regards vont converger dans les prochains jours.
En début de semaine dernière en effet, Jean-François Copé ne s'est pas contenté d'écrire aux militants du parti. Il a aussi adressé une lettre à Anne Levade dans laquelle il lui dit son souhait de voir "l'élection du nouveau président et la période d'intérim qui le précédera" se dérouler "dans le respect des règles juridiques […] approuvées à 93% lors du congrès extraordinaire" du mois de juin 2013. En conséquence, il lui demande d'intervenir lors du prochain bureau politique "afin d'éclairer ses membres sur le cadre statutaire qui s'impose à lui".
En clair, Copé, qui abandonnera officiellement ses fonctions le 15 juin, estime que la présidente de la Haute Autorité n'a pas comme seule mission d'organiser le futur congrès, de veiller à la régularité des opérations de vote et de proclamer les résultats de la future élection, mais qu'elle a également vocation à donner son point de vue sur l'organisation de la période d'intérim. Ce que contestent Juppé et Fillon.
Anne Levade n'est en effet pas membre du bureau politique. 
Ambiance…
Vendredi dernier, la conversation entre François Fillon et Anne Levade a été "très crispée". L'ancien Premier ministre de Sarkozy estimerait s'être fait duper par Jean-François Copé qui lui avait présenté cette prof de droit en 2013 après la crise interne qui les avaient opposés : il fallait alors remplacer la fameuse Cocoe et son président Patrice Gélard.
Aujourd'hui, le camp Fillon la voit comme "une copéiste enragée". Motif : la présidente de la Haute autorité, qui n'a pas souhaité répondre aux questions du "Nouvel Observateur", aurait argué que, d'après les statuts, c'est le vice-président délégué Luc Chatel qui devrait assurer l'intérim et non pas le triumvirat Juppé-Fillon-Raffarin. Ce que contestent Juppé et Fillon. Pour eux, l'UMP fait face à une situation "inédite" puisque seul le cas de la démission du président a été prévu dans les statuts mais pas celui d'une démission collective de la direction comme celle qui est intervenue mardi 27 mai.
Au-delà du cas de Chatel, la vraie question qui fâche est celle-ci : quel mandat, quelles attributions pour le triumvirat ? Réel pouvoir de gestion ou simples potiches ?
Même son de cloche chez Fillon.
Car le véritable enjeu de cette bataille au couteau, c'est le contrôle de la machine, et le sort d'Eric Cesari, actuel directeur général de l'UMP. Ancien collaborateur de Nicolas Sarkozy au conseil général des Hauts-de-Seine, Cesari est surnommé "l'œil de Sarko" à l'UMP. Depuis la démission de Copé et le départ de Jérôme Lavrilleux, il est l'homme le plus puissant du parti. Il contrôle tout : les salariés… et les salaires, les avantages en nature, la machine administrative et financière… et les fichiers.
Depuis que l'affaire Bygmalion a éclaté, on s'interroge en outre sur son rôle pendant la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Compte tenu de sa fonction, Cesari travaillait au quotidien avec Jérôme Lavrilleux, ex-directeur de cabinet de Copé, qui a confessé avoir indûment facturé à l'UMP des dépenses de Bygmalion liées à la campagne présidentielle. Cesari pouvait-il l'ignorer ?
En tout cas, ni Juppé, ni Fillon ne font mystère de vouloir le remplacer aussitôt après le départ effectif de Jean-François Copé le 15 juin. Nicolas Sarkozy, on s’en doute, ne l’entend pas de cette oreille. Perdre Eric Cesari, c’est perdre le contrôle sur le parti. Officiellement, pourtant l’ancien président "ne veut pas s’en mêler". En réalité, il a envisagé, en fin de semaine dernière, d’accélérer son retour et de se déclarer dimanche (hier) pour prendre tout le monde de vitesse avant le bureau politique, mais a finalement renoncé. Il souhaite "un consensus", dit-on dans son entourage et "voit d’un bon œil" l’installation du triumvirat à la tête de l’UMP qui est là comme "solution provisoire" pour "organiser l’élection de l’automne". Il regrette simplement qu’Alain Juppé n’ait pas pris la peine de lui téléphoner comme l’a fait Jean-Pierre Raffarin.

Carole Barjon

Le Nouvel Observateur :: lien

http://www.voxnr.com/cc/politique/EupkFuZZFlQGBNeBmf.shtml

Les commentaires sont fermés.