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La droite a un boulevard... Elle ne le voit pas

Les causes du « séisme » des 25 % de votes « Marine » aux Européennes sont connues, la machine européenne qui s'emballe et dont plus personne ne veut sauf une Upper class très intéressée, qui devrait encore arriver à ses fins tant est grande la force de l'inertie.

Il faut voir - sur internet - à ce sujet la dernière ZEN (Zemmour et Naulleau), une émission passionnante avec Alain Finkiel-kraut et Michel Onfray. En écoutant ces quatre intellectuels qui proviennent de la droite et de la gauche, j'ai été surpris de l'accord foncier qui se dégage de leurs propos, des propos qui par ailleurs apparaissent comme en rupture vis-à-vis du Politiquement correct.

Nous vivons, ce me semble, un moment historique où la pratique (libérale et multiculturelle à tous crins) est en train de se séparer de la pensée (identitaire et nationale). Traité transatlantique de libre-échange avec les États-Unis (comme s'ils pouvaient jouer le jeu), intégration progressive de l'Ukraine à l'UE, la machine va de l’avant. Il n'est pas question de reculer. Les agriculteurs français vendront leur blé aux États-Unis au prix indiqué par les acheteurs qui vendront le leur au plus offrant. Ce sera la nouvelle PAC !

Non, on n'est plus capable de verbaliser le grand Projet magique de la prospérité pour tous, dont s'est paré le libéralisme international. On sait bien - tout le monde sait bien - que les différences entre les très riches (quelques-uns) et les pauvres (de plus en plus nombreux), en Europe comme aux États-Unis, n'ont jamais été aussi importantes et qu'après l'ivresse de la mondialisation heureuse que nous prophétisait Alain Minc, il y a la gueule de bois technocratique.

Miroir cassé

La pratique libérale, assumée pourtant largement par la Gauche dans des Pensoirs comme Terra nova, n'ose plus se penser elle-même. Elle n'ose plus s'avouer à elle-même ce qu'elle est et ce qu'elle fait. Elle va jusqu'au bout de sa logique, on sent qu'elle y va de plus en plus vite parce qu'elle se sent menacée. L'Europe continue, l'Europe décide, elle force le passage vers l'avenir radieux imaginé naguère par Jean Monnet, cette alliance commerciale et politique avec les EU, à parité euro-dollars. Voilà le but, on le sent, on le sait. Mais l'Europe n'en parle pas, elle n'aime pas qu'on parle d'elle (quelle discrétion nouvelle cette campagne des Européennes !). L'Europe ne fait plus de promesse, elle ne défend plus un idéal d'avenir, parce que le calcul est trop visible et qu'il est trop laid. Elle garde pour elle la rationalité commerciale et financière, oui. On sait que les rationalisations européistes ne sont pas perdues pour tout le monde. Mais l'Europe a perdu la pensée. Elle ne se pense plus.

La pensée, à droite et à gauche, ce qui reste de la pensée est désormais massivement anti-européenne, alors que la Upper class reste massivement européenne. Voilà le divorce auquel on assiste. Il risque d'y avoir de la vaisselle cassée.

Tout changer

L'émission ZEN, dont je parlais en commençant, montrait bien cette immense fracture entre la classe intellectuelle, un peu en avance, et la classe politique, toujours en retard. Il y en a un parmi les politiques qui a compris et analysé, ce divorce, c'est Laurent Wauquiez, le maire du Puy, un catho revendiqué, ça fait toujours plaisir, un européiste convaincu... et repenti. Il faut lire son Europe il faut tout changer (éd. Odile Jacob).

Il souhaite, lui, aller non pas dans la logique du renoncement, de l'abstention et de l'autodestruction, non ! Il faut tout changer : « Sortons une bonne fois pour toutes de l'Europe à 28, reconstituons le noyau dur des premiers bâtisseurs, les pays qui ont porté sur les fonds baptismaux la construction européenne et qui partagent une vraie vision commune : la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, l'Italie et j'ajoute l'Espagne. Et c'est tout. J'exclus délibérément le Luxembourg et son paradis fiscal. Je ne songe pas un instant au Royaume uni. » Utopie ? Ras le bol surtout et certitude que CELA ne peut pas marcher.

C'est un véritable consensus intellectuel anti-correetness qui émerge en ce moment et la dernière cette année de l'émission ZEN en était le signe irrécusable. Les deux invités étaient l'un de droite (Finkielkraut) et l'autre de gauche (Onfray), mais ils avaient le même discours, que Finkielkraut a résumé en sortant une citation de sa poche. La philosophe Elisabeth de Fontenay, qui n'est pas de droite, écrit ceci, qui aujourd'hui fait un consensus intellectuel à droite et à gauche, contre la Pensée unique : « C'est une erreur politique que de neutraliser l'un des éléments les plus vivaces de l'expérience humaine, le sentiment d'appartenance à une nation ou à un peuple, car cela engage les hommes à se précipiter dans l'abstraction marchande, qui les rend équivalents mais pas égaux. »

Réponse sans âme a l'éternelle question

Notre problème, non seulement politique mais spirituel et simplement humain, c'est celui de notre enracinement, de notre appartenance : qui sommes-nous ? Nous ne sommes pas des structures commerciales. L'Argent n'a pas d'âme. Et c'est notre âme qui nous manque. Si le combat de la droite a un sens aujourd'hui, c'est d'être un combat pour l'identité des personnes et des peuples, pour l'âme des personnes et des peuples, contre la réduction sordide de toute relation humaine au commerce et de tout commerce à l'idolâtrie du Veau d'or. Les gens qui réfléchissent, à droite et à gauche, j'ai cité quelques noms mais il y en a beaucoup d'autres, comprennent bien ce détriment d'âme, de quelque manière qu'ils le nomment.

Seuls nos politiques (disons la plupart d'entre eux) semblent ne rien voir. Et pourtant, c'estquand il y a désaccord entre la politique et lapensée commune qu'ont lieu les révolutions...
La prochaine révolution sera-t-elle identitaire etspirituelle ? Dans cette défense de l'âme ou del'identité des personnes et des peuples, la droitea un boulevard.

Alain Hasso monde & vie 9 juillet 2014 

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