Réinstallé le 26 août à la tête du gouvernement, Valls avait laissé se répandre une fausse rumeur. Pendant trois ou quatre jours on a distillé l'illusion que le pays allait enfin entrer en voie de réforme. Le 27 août par exemple, le chef du gouvernement allait se faire applaudir à l'université du Medef. Il "aime les entreprises" avait-il proclamé. Et le lendemain, 28 août, on apprenait même que le nouveau ministre de l'Économie, Emmanuel Macron passerait pour "favorable à des dérogations" pour "les 35 heures".
Un vent de libéralisme échevelé soufflait-il sur le petit monde de François Hollande ? Certains l'ont cru. D'autres persistent à le laisser entendre. Ainsi François Rebsamen, ministre du Travail imaginait encore ce 2 septembre de mieux contrôler la qualité de chômeurs effectifs des allocataires de l'Unedic.
Tollé bien sûr : chacun sait, ou du moins dans une certaine gauche chacun fait semblant de le croire, que les faux chômeurs n'existent pas et ne nuisent pas à l'indemnisation des véritables demandeurs d'emploi.
Parmi les réactions indignées de la gauche "frondeuse" relevons en une, au moins, qui ne semble dépourvue ni d'une pointe d'humour ni même d'une part de pertinence. Le camarade Dartigolles porte-parole du parti communiste rétorque à ce sujet : "Il faudrait contrôler l'activité réelle de Monsieur Rebsamen François, recruté en avril dernier pour s'occuper de l'emploi". Depuis 28 mois que l'on nous promet l'inversion de la courbe du chômage les dirigeants socialistes pourraient en effet faire preuve d'un peu de modestie.
Reste que la cohérence gouvernementale figurait en tête des raisons invoquées le 25 août pour le départ des Montebourg, Hamon, Filipetti et Cuvillier.
De quelle cohérence parle-t-on quand, au moment même où le ministre du Travail exprime son désir de mettre de l'ordre dans les prestations de l'Unedic, en améliorant les contrôles, le premier secrétaire du parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis, juge que la déclaration de M. Rebsamen n'est "pas pertinente".
Il est intéressant de remarquer que le premier mouvement du rédacteur du Monde était de noter que "la CGT accuse François Rebsamen de vouloir sanctionner les chômeurs." Tel est en effet le lien de l'article initialement posté à 12 h 34 probablement sous ce titre. Or curieusement dans la version mise à jour à 17 h 18 la mention de cette accusation par la CGT avait disparu, enfouie sous les critiques de Force ouvrière"abasourdie" et de la Confédération française démocratique du travail (CFDT)"atterrée".
Qu'on se le dise en effet : ce n'est pas la partie "frondeuse" de la majorité qui récuse l'illusion réformiste, c'est le parti socialiste lui-même.
Certains s'étonnent en effet, et à juste titre, de l'incohérence consistant à laisser Christiane Taubira, poids lourd du gouvernement, s'afficher aux côtés des "frondeurs"socialistes à La Rochelle.
Comment ne pas éprouver de malaise en entendant le Cambadélis charger contre une déclaration de Madame Merkel, affirmant lui-même que "l'emploi du mot 'véritable' [à propos des réformes françaises] "n'est pas supportable". N'est-ce pas, pourtant, ses grotesques tirades anti-allemandes qui ont aggravé le sentiment du perte du sens des responsabilités par le Montebourg ?
Car la chancelière n'a pas tenu exactement les propos qu'on lui prête, sur la base de traductions douteuses: elle s'interroge si wirklich (véritablement) le gouvernement français entend procéder à des réformes de structures. J'avoue me poser les mêmes questions et les zigzags de nos ministres ne me rassurent pas, — et mes doutes n'ont guère d'importance,— mais ils ne sont pas de nature non plus à rassurer, au-delà des bureaucraties patronales les investisseurs réels, tant étrangers que français, — ce qui est infiniment plus préoccupant.
Car comment, dès lors, ne pas juger plus grave encore le revirement de Valls lui-même affirmant le 31 août, 4 jours après sa déclaration d'amour applaudie au MEDEF et 3 jours après les rumeurs autour d'une critique des 35 heures par le "jeune et brillant" Macron, que "les 35 heures ne seront pas remises en cause".
Idem sur l'encadrement des loyers, projet qui aggrave et aggravera la pénurie de logements.
Combien de temps encore les Français, intoxiqués par les médias, se laisseront prendre aux faux-semblants des communicants politiques ?
Que faut-il retenir du boniment de Cambadélis à La Rochelle le 31 août ? Que vaut ce"nouveau progressisme" que lui et ses camarades affirment avoir substitué à leur ancien, très ancien, trotskisme.
Certes, si le réseau de pouvoir strauss-kahnien de Jean-Christophe Cambadélis gère le parti socialiste avec le brio dont ces gens ont fait preuve à la tête de la MNEF, pour sûr, la crédibilité de ce gouvernement n'a pas de souci à se faire.
JG Malliarakis
http://www.insolent.fr/2014/09/trois-reculades-en-une-semaine.html