Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

De l’engagement de volontaires français et musulmans dans les rangs de l’Etat islamique

Les deux attaques menées au Canada à la fin de ce mois d’octobre 2014, par ce qu’il est convenu d’appeler des loups solitaires (« Lone Wolf »), rappellent aux Français celles de Toulouse (2012) et de Bruxelles (2014). Les hasards du calendrier font que la commission mixte paritaire du Parlement vient de déposer ce 21 octobre les derniers points relatifs à un nouveau texte législatif, lequel offre à l’Etat les armes nécessaires face à cette menace.
Justifié sur le fond par son intitulé – « Projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme » (1), le caractère potentiellement liberticide de ce texte ne sera pas ici abordé sur la forme, puisqu’il s’agit du prix à payer pour renforcer la sécurité. En outre, même si les propos qui suivent considèrent les risques liés au Djihadisme, il faut garder à l’esprit le fait que ce projet de loi concerne le terrorisme dans sa globalité ; il ne contient aucunement les mots « islamiste » ou « fondamentaliste ». Cette prudence est doublement justifiée si on se souvient, d’une part que la tactique du loup solitaire aurait été forgée par un extrémiste américain, Joseph Tommasi (1951-1975, à ne pas confondre avec son homonyme français), d’autre part que le dernier massacre d’importance en Europe (77 morts) est le fait d’un autre extrémiste norvégien, Anders Behring Breivik (2011), deux individus plutôt opposés à l’Islam…
Les terroristes sont loin d’être des militants d’une même valeur…
Comme à l’accoutumée, l’émotion l’emporte sur la réflexion, et une seule approche est proposée pour apporter une même solution à un problème complexe. Les attaques improvisées d’un loup solitaire sont fondamentalement différentes des attentats coordonnés et soigneusement planifiés à Madrid (2004, 191 morts) et à Londres (2005, 56 morts). Le choix des cibles est une autre différence essentielle ; anonymes dans le cadre des attentats de Madrid et de Londres, elles sont des militaires ou des Juifs lors des attaques individuelles. Cette particularité montre bien que les auteurs se considèrent déjà comme des combattants qui se sont donnés un ennemi. Quand Al-Qaïda ou l’Etat islamique lancent un appel aux attaques individuelles, leur démarche est d’abord politique, considérant que chaque Croisé est un ennemi des Musulmans. Mais on ne souligne pas assez les raisons psychologiques, voire psychiatriques, et sociales, présentes chez les individus souvent isolés qui répondent à cet appel, raisons masquées par ce qu’on croit être une unique cause idéologique ou religieuse. C’est confondre les facteurs structurels et conjoncturels, car leur engagement vise aussi un faire-valoir envers eux-mêmes et envers les autres. 
Les attentats commis dans le contexte du Groupe islamique armé [GIA] par Khaled Kelkal (1995), passé de la délinquance à l’Islam à l’occasion de ses incarcérations, n’ont rien de commun avec le meurtre d’un soldat britannique en pleine rue à Londres (2013) par Michael Adebowale et Michael Adebolajo, deux étudiants convertis et militants, sans antécédents judiciaires. Si les quatre loups solitaires cités en préambule sont certes différents (Mohammed Merah, Mehdi Nemmouche, Martin Couture-Rouleau, Michael Zehaf-Bibeau), ils semblent avoir au moins deux points communs : d’abord un casier judiciaire pour des faits de délinquance, ensuite avoir été identifiés comme des individus à risque par les services de renseignement. Par contre, l’habituelle défaillance des gouvernements à séparer le symptôme (l’acte terroriste) de sa cause (la revendication politique) est commune aux deux modes d’attaque. Se limiter à un traitement de surface sans aller en profondeur ôter les racines du mal ne peut être qu’un palliatif…
Quelque part, cet acte volontaire qu’est l’engagement tire pourtant l’individu hors de sa servitude, quelle qu’en soit la nature. L’engagement est un risque personnel, non seulement physique quand il s’agit d’aller combattre, mais aussi moral, en acceptant d’être jugé, notamment par ses proches. Pour certains volontaires, il pourrait même s’agir d’une démarche analogue à une rédemption, ce que devraient pouvoir comprendre des Chrétiens.

Les commentaires sont fermés.