A l’occasion de la visite de Manuel Valls en Serbie, jeudi et vendredi, Jean-Christophe Buisson rappelle les liens qui unissent depuis des siècles les peuples français et serbe.
Rédacteur en chef Culture et art de vivre du Figaro Magazine, Jean-Christophe Buisson est l’auteur de plusieurs livres sur la Serbie : Mihailović, Histoire de Belgrade, Le Goût de Belgrade. Dernier livre paru : Les grands duels qui ont fait la France (direction, avec Alexis Brézet, Perrin/Le Figaro Magazine)
« Aimons la France comme elle nous a aimés ».
Vendredi matin, au terme de sa visite officielle de deux jours en Serbie, Manuel Valls s’inclinera devant le Monument baptisé Reconnaissance à la France, installé à l’entrée du parc du Kalemegdan, au cœur de la vieille ville de Belgrade. Œuvre du sculpteur croate Ivan Meštrović, cette sculpture monumentale fut inaugurée en 1931 pour que jamais les habitants de la Ville Blanche, comme ceux de tout le Royaume de Yougoslavie, qui avait succédé en 1929 au Royaume des Serbes, Croates et Slovènes né au lendemain des traités de paix, n’oublient leur dette à l’égard du pays qui, treize ans plus tôt les avait libérés de l’occupation germanique et bulgare. La veille, c’est-à-dire ce jeudi soir, à l’heure où François Hollande tentera de convaincre les Français des vertus de sa présidence, le Premier ministre aura assisté à une réception, à quelques mètres de là, rue de Paris, à la Résidence de l’ambassadeur de France en Serbie : un majestueux bâtiment art déco conçu - comme un symbole - par un architecte français et un architecte serbe, surmonté de trois statues symbolisant la liberté, l’égalité et la fraternité. Sans doute Manuel Valls repartira-t-il agréablement surpris de ce pays dénoncé pendant de longues années - et encore parfois aujourd’hui - comme l’antre balkanique du Diable, le repaire de néofascistes homophobes, de hooligans racistes, de criminels de guerre mafieux et de jeunes filles en fleur aux mœurs légères et intéressées. Il est vrai que dans son propre camp, massivement marabouté par Bernard-Henri Lévy, hormis François Mitterrand, Jean-Pierre Chevènement, Roland Dumas et Hubert Védrine, il n’y aura guère eu de responsable politique pour dépasser ces clichés réducteurs depuis 1991 et le début des guerres yougoslaves. Et pourtant.
Sans doute Manuel Valls n’aura-t-il pas le temps de retenir tout ce que ses hôtes lui auront répété pendant deux jours sur la longue fraternité unissant depuis sept siècles au moins les peuples français et serbe. Peut-être quelques mots, quelques dates, quelques noms... Ceux-ci, par exemple :
Pierre l’Ermite, prédicateur amiénois qui traversa les villes alors byzantines de Belgrade et Niš, en 1096, à la tête de Croisés en route pour Jérusalem.
La bataille de Kosovo, qui, le 28 juin 1389, opposa chevaliers chrétiens et troupes ottomanes. Sur la foi de la chronique de Philippe de Maizières, le roi de France Charles V crut qu’elle marquait une grande victoire contre les Turcs et fit célébrer un Te Deum à Notre-Dame de Paris en sa présence.
Le Prince Eugène de Savoie, autre héros des guerres anti-ottomanes qui, administrant Belgrade pour le compte des Autrichiens entre 1718 et 1739, s’appliqua à introduire localement des éléments de civilisation française, depuis l’aménagement urbain jusqu’aux petits pains en passant par la création de la première pharmacie de la capitale serbe. [....]
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