Au fil des sondages, le scrutin régional qui vient précise un phénomène que je me permets de considérer comme un affrontement désormais triangulaire. Trois blocs presqu'égaux semblent se dessiner dans l'électorat pour le premier tour. Et les règles de leur recomposition n'existent pas encore. Pour faire court on peut résumer ainsi le débat de la classe politique : elle se divise entre ceux qui préconisent le "ni ni", ouvrant la voie à des triangulaires, et au contraire les partisans de ce qu'on persiste à appeler le "front républicain".
Celui-ci permettrait d'écarter, au moins à très court terme, et notamment le 13 décembre au soir, la victoire du FN dans certaines régions. On pourrait ironiser sur le fait qu'un tel artifice légitimerait encore plus l'argument central des dits exclus. La dialectique de ceux-ci dénonce à l'envi aujourd'hui "l'UMPS", ce qui lui permet de récupérer l'écœurement et l'exaspération des Français devant le spectacle de la classe politique.
Mais quoiqu'il advienne l'expédient s'en révélera provisoire. Et le réservoir immense des abstentions recomposera les équilibres.
Le jeu triangulaire en effet, selon la théorie qui se veut scientifique, aurait vocation à se résoudre à moyen terme en une situation binaire.
Cela s'est dessiné, de façon embryonnaire sous l'impulsion de Mitterrand. Rappelons que son disciple siège à l'Élysée depuis 2012. L'embryon s'est affirmé entre 1986 et 1998. Déjà suicidaire, pour ce qui refusait encore de s'appeler la droite, s'est précisée la doctrine, de refuser en toute circonstance avec un parti nouveau venu, apparu en 1972 et qui s'étiquetait comme "droite nationale, libérale et populaire".
Aujourd'hui les choix ont bien changé. Les rapports de force se sont inversés.
Le parti communiste n'est plus ressenti comme une menace centrale. Et pourtant quoique largement édenté, il compte encore 120 000 cotisants, l'appareil dirigé par Cambadélis en mobilisant à peine 60 000. Le PCF contrôle encore les deux principales forces syndicales du pays que sont la CGT et, dans l'Éducation nationale, la FSU etc. Sans lui aucune majorité de gauche n'est possible et, néanmoins, il surfe sur une position résolument critique.
Autrement dit la base même de ce qui, en France, s'appelle la gauche semble en voie de marginalisation et d'effritement.
Le débat ne se situe plus vraiment entre gauche et droite mais, par exemple, entre le refus rhétorique de la mondialisation et la gestion, plus ou moins pertinente de celle-ci, entre souverainisme incantatoire ou rampant et une certaine eurobéatitude, entre conservation de notre prétendu modèle social et sa réforme véritable restaurant les libertés etc.
On le voit, on a beau pouvoir espérer la mise en sommeil de l'appellation contrôlée "gauche", l'égalitarisme niveleur et le laïcisme sectaire demeureront. D'autres dénominations pourront ainsi reprendre le flambeau de la démagogie, de la sottise et de l'incantation, qui ont encore de longues années à vivre. Si j'étais de gauche j'y verrais une raison d'espérer.
Mais, décidément, ce drapeau n'est pas le mien.
JG Malliarakis