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L’esprit du Fascisme

S’il est bien un sujet qui, mieux que tous les autres, rend compte de l’effondrement total de toute forme d’intelligence au sein de nos sociétés occidentales, c’est sans conteste celui du Fascisme. En effet, jamais autant de mensonges, de manipulations, de déformations crasses ne sont observés que lorsque ces huit lettres sont prononcées. Certes, ce constat ne date pas d’hier, et certes, le même diagnostique peut être fait concernant le traitement médiatique de nombreuses autres thématiques, mais le niveau de bassesse et d’ignorance qui a été atteint à propos du Fascisme est sans égal. C’est ce même constat qui doit pousser tous les Européens éveillés à se saisir de ce sujet, à ne pas se dissimuler derrière la lâcheté ou la facilité conduisant à finalement intérioriser tout un ensemble de préjugés et de lieux communs véhiculés par tous les agents du système médiatique. Avant même toute forme d’argumentation qui pourrait rectifier la perception des plus sceptiques de la véritable essence de ce mouvement, il est un élément qui à nos yeux justifie et incite à une réflexion approfondie sur le Fascisme, dans le cadre d’un questionnement global sur le passé, le présent et surtout le futur (sur quelles bases fonder la nouvelle Europe ?) de notre vieux continent : à partir du moment où l’on a intégré au plus profond de soi que le monde moderne est une abomination, une aberration absolue, une déchéance sur tous les plans et dans toutes les directions, comment ne pas voir dans l’acharnement dont font preuve tous les partisans et officines du Système à diaboliser le Fascisme (ou tout mouvement qui de près ou de loin s’en approche) le signe que, peut-être, en effet, ce sujet mérite mieux qu’une damnatio memoriae. Il est aisément compréhensible que le Système en place, qui repose sur l’éclatement des communautés, la négation des spécificités et des cultures, la primauté absolue du matériel sur le spirituel, l’abrutissement d’une grande partie de la population par le triptyque tertiarisation, embourgeoisement et armes de distraction massive, autrement dit l’avilissement de l’Homme par la consommation, ait tout intérêt à discréditer une « idéologie » qui, de par les valeurs et la conception de l’Homme qu’elle met au cœur de l’organisation de son propre système, constitue son antithèse absolue.

Nous souhaitons être clairs, il ne s’agit pas ici de tenter une réhabilitation du Fascisme ou d’en faire l’apologie, et ce pour plusieurs raisons. D’abord parce que réhabiliter le Fascisme serait inutile, à la fois au regard du rapport de force en cours et étant donné le travail de sape qui a été effectué dans l’inconscient collectif des Occidentaux depuis soixante-dix ans, mais aussi et surtout car ce mouvement s’insère dans un contexte historique qui n’est pas le nôtre (le traumatisme de la guerre, un certain niveau de développement économique, une crise des systèmes parlementaires, la crainte d’une insurrection communiste généralisée, la faiblesse relative des appareils d’Etat, le problème non résolu de l’émergence des « masses », l’existence préalable d’une élite mystique constituée autour d’un chef aux qualités exceptionnelles, etc…). En réalité, nous nous intéressons moins au Fascisme dans son acception historique qu’en ce qu’il a d’éternel, d’immuable, de métahistorique et métapolitique. Nous nous intéressons moins au Fascisme comme fait historique né en 1919 et mort (exécuté) en 1945 que dans son essence absolue, sa signification la plus profonde, celle qui touche au sens même de l’existence. Car quel est le but ultime, le sens même d’une organisation politique si ce n’est d’offrir le cadre le plus propice au développement des potentialités humaines ? Le Fascisme dans son acception métahistorique propose un ensemble de réponses à cette question qui sont dignes d’un très grand intérêt et qui, à notre sens, constituent une solution viable, pour ne pas dire géniale, au problème de la modernité.

Pour comprendre l’importance et la signification ultime du Fascisme comme mouvement d’idées, il faut le replacer dans le cadre de la « superhistoire » (pour reprendre un terme évolien) mondiale mais surtout occidentale. En adoptant un point de vue global, il est possible de diviser l’histoire de l’Humanité en deux grandes périodes : une première caractérisée par un modèle de société traditionnel, une société hiérarchique organisée selon un certain ordre et où chacun trouve sa place. La seconde période correspond, elle, à l’émergence de la modernité que l’on peut corréler avec le moment où l’Etat (moderne) a cherché par son appareil bureaucratique à étendre son emprise sur l’ensemble du territoire et de la population qu’il englobe. Ainsi, à nos yeux, l’histoire de l’Occident depuis cinq-cents ans est le fruit d’une dialectique entre ces deux tendances (moderniste et « réactionnaire »). C’est en ayant cela à l’esprit que l’on peut réellement se rendre compte du caractère exceptionnel de l’ « idéologie » fasciste qui ne prônait pas un simple retour en arrière mais se proposait plutôt de « chevaucher »  la modernité, c’est-à-dire d’en accepter toutes les implications, tout en les mettant au service d’une haute conception de la vie et de l’Homme. Pour le dire autrement, le Fascisme est parvenu à prendre la modernité à son propre jeu en proposant un modèle d’organisation moderne et efficace (et donc capable de concurrencer d’autres modèles d’organisation qui voient dans le progrès et la modernité une fin en soi), mais subordonné à un ensemble de valeurs éminemment spirituelles.
Le Fascisme n’avait donc pas tort de se présenter comme une forme de révolution anthropologique. Il était même plus que cela puisqu’il assumait le caractère de révolution métapolitique en ce qu’il est parvenu à dépasser chacun des deux modèles d’organisation des sociétés humaines qui avaient jusque-là été proposés : celui de la première « superpériode » qui correspondait à un modèle pyramidal proche du système des castes hindou, caractérisé par un certain immobilisme répondant au respect de l’ordre divin ; mais aussi celui de la seconde « superpériode » qui se fonde sur l’idéologie démocratique et libérale et implique un nivellement généralisé, n’acceptant pas l’idée d’une inégalité entre les hommes et jugeant donc intolérable que le pouvoir incombe exclusivement à un petit groupe que les Dieux auraient doté de capacités exceptionnelles. Cette conception a permis l’avènement de la démocratie et en parallèle l’émergence des castes bourgeoises/capitalistes. Nos sociétés actuelles sont la conséquence directe de ce long processus qui a permis à ces castes parasites de s’arroger le pouvoir (l’argent s’étant substitué comme critère d’élection aux vertus d’excellence, de rigueur et d’honneur qui ont toujours été au cœur de l’éducation aristocratique) et d’imposer leur propre solution au problème de la modernité que constitue l’émergence des masses : un abrutissement généralisé par un contrôle social continu qui doit détruire toute velléité de résistance et toute volonté de sortir du carcan capitaliste.

La singularité du Fascisme se situe comme nous l’avons déjà dit, dans son dépassement de ces deux conceptions : moderniste/niveleuse, qui aboutit au règne de l’économique, du matériel, du bourgeois, et traditionnelle/hiérarchique, qui ne peut empêcher certains abus et surtout s’est montré incapable de résister face à la déferlante moderniste (on peut faire ce constat pour toutes les grandes civilisations qui aujourd’hui sont contaminées par le « progrès », y compris l’islam dont la résistance à la modernité est portée par un modèle qui finalement contient en lui les mêmes germes : prosélytisme, universalisme niveleur et destructeur d’identité, négation du passé, culte de l’abstrait qui aboutit au rejet de toute forme de beauté, et qui ressemble plus à du « communisme avec Dieu » qu’à l’islam de Suleyman le Magnifique ou de Saladin). En effet, le projet au cœur du Fascisme est la prise du pouvoir par une élite mystique, une nouvelle aristocratie, forgée par la guerre, cette mère qui leur a enseigné le renoncement, le sens du sacrifice, l’esprit de communauté mue par un même idéal, l’amour inconditionnel pour leur patrie, le mépris de tout ce qui est bourgeois, petit, vil, le mépris de ce qui est facile, confortable, de tout ce qui s’achète et se marchande et éloigne l’Homme de la seule chose qui compte vraiment : son lien indéfectible avec Dieu et avec l’éternel. La mission que s’était donné cette jeunesse ardente était des plus hautes, des plus belles et des plus nobles : régénérer le continent européen, lui tendre la main pour l’extraire de cette fange de médiocrité bourgeoise et de renoncement à toute grandeur dans laquelle elle se complaisait depuis tant d’années. La grande nouveauté de cette forme de réaction face au « progrès » est qu’elle est la première à avoir accepté l’émergence des masses dans la société, elle a accepté une forme de modernité mais en refusant toute forme de compromis sur les valeurs portées par l’élite au pouvoir (contrairement au gaullisme ou au poutinisme, même si le fascisme italien dans son acception historique y a été contraint pendant une certaine période, moins par renoncement que par son caractère imparfait dû à la concurrence de l’Eglise et de la monarchie). Et cette élite au pouvoir, contrairement aux élites démocratiques, n’a pas cherché à abrutir la masse ou à s’en désintéresser par négligence. Au contraire, elle a cherché à utiliser tous les moyens que la modernité lui offrait (moyens de communication, d’organisation, infrastructures, etc…) pour inculquer à cette masse les valeurs qu’elle considérait elle-même comme les plus élevées (sens du sacrifice, amour de la patrie et de la communauté, rejet du rationalisme, de l’utilitarisme et de l’individualisme, unité du corps de l’esprit, etc…).

En un sens le Fascisme fonde donc sa conception de la société humaine sur un nivellement « par le haut », par une forme de générosité des élites qui souhaitent aider le reste de la population à abandonner toutes ses conceptions matérialistes (qu’elles soient bourgeoises ou marxistes) en leur inculquant une conception plus haute de l’existence humaine. En quelque sorte, le Fascisme veut donc faire de tous les hommes des aristocrates en leur faisant intérioriser la supériorité des valeurs spirituelles sur les valeurs matérielles, la subordination de l’Homme à un ensemble de valeurs qui dépassent sa propre individualité et surtout donnent un sens à son existence. C’est en cela que l’on a pu parler (Emilio Gentile notamment) de « religion politique » à propos du Fascisme. On retrouve d’ailleurs dans la symbolique même du faisceau, emblème du fascisme italien mais qui pourrait s’appliquer à tous les autres, une excellente représentation de toutes ces considérations. En effet, la hache centrale symbolise la puissance virile, mystique et solaire du Fascisme, incarnée dans la chair par son élite. Autour de cette hache sont liées verticalement de nombreuses verges qui symbolisent les membres de la communauté de destin fasciste. Isolée, une de ces tiges n’est rien, elle peut être aisément rompue, elle n’a pas de sens en elle-même. Liée aux autres autour de la hache centrale, elle devient indestructible en prenant son sens dans cette structure organique, elle-même orientée verticalement par cette hache qui pointe vers le haut, en direction des plus hautes cimes. Certains métaphysiciens comme Guido de Giorgio ont même voulu voir dans la hache bifrons fasciste un équivalent du Janus bifrons, tourné vers le passé et l’avenir, et dont le point central contiendrait le « sens de l’éternité », comme le troisième œil de Shiva.

Nous conclurons ces quelques réflexions sur ce sujet en le mettant en relation avec la situation actuelle de l’Europe. Comme nous l’avons déjà dit, un retour du Fascisme aujourd’hui est chose impossible, et d’ailleurs peu souhaitable, étant certain que l’émergence d’internet et des nouveaux moyens de surveillance entraineraient des abus (comme c’est déjà le cas, et ce au nom d’idéaux bien plus bas). Cependant, ce que nous pourrions appeler « l’esprit du Fascisme » est quant à lui susceptible d’offrir une lumière et une direction dans les âges sombres qui s’annoncent. En effet, dans un contexte où l’immense majorité de la population occidentale est en « dormition » et où seule une minorité restreinte a conscience des réalités, cette idée d’impulsion « par le haut » reste d’actualité. La véritable question est de savoir quel type de société sortira des temps troubles qui nous attendent : un ensemble de petites communautés locales autosuffisantes si le Système s’écroule totalement, ou bien dans le cas d’une survie partielle des structures actuelles, une société qui demeurerait étatique. C’est dans ce dernier cas, notamment si comme nous le souhaitons, une élite mystique aux idéaux les plus nobles et aux convictions les plus inébranlables parvenait à s’emparer du pouvoir et à unifier le continent européen, que cet « esprit du Fascisme » pourrait se voir réactualisé. Alors, l’aigle impérial dans sa divine majesté envelopperait à nouveau l’Europe de son rayonnement protecteur et la porterait vers les plus hauts sommets, aux côtés de son antique compagnon, le soleil radieux de la gloire et de l’éternité.

Valentin Cantelmo pour le C.N.C

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