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Hollande bat la Campagne à droite

Plusieurs éléments ont confirmé que le logiciel de l’immigration n’est vraiment plus porteur électoralement. François Hollande l’a parfaitement compris. La présidentielle de 2017 est en ligne de mire… 

À travers les polémiques sur la déchéance de nationalité, on assiste avant tout à une métamorphose fondamentale du logiciel de campagne à gauche. Les tueries de Charlie puis du Bataclan ont peut-être été comme les signes avant-coureur de ce que l'on pourrait appeler la sortie du « cycle d'Epinay », pour reprendre l'expression d'un observateur politique. En effet, c'est cette période ouverte,en 1971, par le Congrès fondateur du PS actuel par lequel celui-ci a revêtu certains traits : critique de l'économie de marché, prise de distance avec la société "traditionnelle" et ses valeurs... En un sens,c'était l'influence de mai 1968 sur le PS qui, à tout prix, n'a pas voulu donner l'image d'une SFIO conservatrice.

Cependant, notons-le, avec l'expérience du pouvoir, certains fondamentaux du socialisme se sont érodés, notamment en matière économique. Le PS n'a pas rompu avec le capitalisme. Mieux : il a même engagé l'économie sur les voies de certaines libéralisations. Jacques Delors et François Mitterrand auront joué un grand rôle dans cet arrimage, notamment avec l'Europe. Il restait encore un vestige de cette vision irénique : l’immigration. Se sentant délaissée par le Français moyen, la gauche bobo a pu éprouver un intérêt idéologique et tactique pour un peuple de substitution. Ce fut le lancement de SOS racisme en 1984 et, plus généralement, une capacité à culpabiliser la droite lorsque celle-ci envisageait de restreindre, même symboliquement, l’immigration.

Or, c'est ce mythe de l'étranger innocent qui a volé en éclats chez Charlie, puis au Bataclan. Quant aux viols de Cologne, ils ont rappelé que l'immigration, ce n'est pas forcément le féminisme... En réalité, ces événements ont davantage accéléré un processus de désaffection de la gauche socialiste pour les étrangers qu'ils ne l'ont vraiment créé.

Le meilleur moyen de tuer son adversaire

La situation est telle que 44% des électeurs de François Hollande considèrent qu'il y a trop d'étrangers en France et que 41 % d'entre eux estiment que l'islam est une menace pour la République (enquête Opinionway de décembre 2015). Il est loin le temps où évoquer la peur de l'islam suscitait des cris d'orfraie... D'où ce repositionnement du Président qui comprend que le meilleur moyen de tuer son adversaire, ce n'est pas la stigmatisation, mais le baiser qui tue, ultime reliquat du cynisme mitterrandien...

L'inscription de la déchéance de nationalité à l'ordre du jour, c'est en outre un moyen habile de diviser la droite. Les bisbilles ne se sont pas fait attendre : à l'Assemblée nationale, la déchéance de nationalité a créé chez les Républicains deux blocs quasiment égaux se déchirant sur la question... Les leaders, déjà opposés entre eux, ont trouvé une nouvelle occasion de s'étriper : Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé sont pour, mais François Fillon ou Alain Juppé sont contre. Ce ne serait rien si la victoire leur était promise en 2017. Mais elle est incertaine.

Tous les arguments sont bons à prendre. Si la révision constitutionnelle aboutit - il faut une majorité des trois cinquièmes des parlementaires réunis en congrès -, François Hollande pourra dire qu'il a fait ce que la droite n'a jamais été en mesure d'accomplir ; si la révision échoue, escompte-t-il aussi une victime par défaut, non par adhésion à sa personne et à son programme, mais par une division profonde de la droite parlementaire ? Affaire à suivre...

Droitisation en acte ?

François Hollande a médité les leçons de François Mitterrand : diviser chez les autres ne sert à rien si l'on ne fait pas l'unité chez soi. Le dernier remaniement ministériel est une manière de faire l'unité autour de soi. François Hollande n'a rien à craindre des écologistes. Promis à une disparition certaine, leur poids électoral est insignifiant. Les piètres résultats d'Eva Joly, en 2012, l’ont confirmé. il peut s'offrir le luxe d'intégrer au gouvernement des figures comme Emmanuelle Cosse, Barbara Pompili ou Jean-Vincent Placé. Ce dernier est d'ores et déjà davantage une personnalité de centre-gauche... La gauche de la gauche ne fait plus peur non plus, et le Front de gauche est superbement ignoré. Certaines figures du Gouvernement ont même pris de l'allure. Bernard Cazeneuve ou Jean-Yves Le Drian, à qui l'on offre la possibilité de présider la Région Bretagne tout en restant à la Défense... Quant à Emmanuel Macron, il séduit et offre une image de respectabilité dans le monde économique. Les polémiques sur l'abrogation des 35 heures ou La réforme du code du travail, qui font parfois la une de tel quotidien, sont peut-être des ballons d'essai destinés à tester l'opinion publique... sur un Hollande modèle 2017, plus à droite que la droite actuelle, empêtrée dans ses querelles de chapelles... Tout est possible à François puisque ni Alain Juppé ni Marine Le Pen ne veulent plus être de droite...

François Hoffmann monde&vie 24 février 2016

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