1 – Le bien-être et l’épanouissement de la vie humaine et non humaine sur terre possèdent une valeur inhérente ou intrinsèque, une valeur en soi. La valeur des formes de vie non humaines est indépendante de l’utilité instrumentale que représente le monde non humain par rapport aux objectifs de l’humanité.
2 – La richesse et la diversité des formes de vie sont elles-mêmes des valeurs en soi. Elles contribuent à l’épanouissement de la vie humaine et non humaine sur terre. « Richesse » veut dire ici abondance de la vie dans chacune de ses formes.
3 – Les hommes n’ont pas le droit de réduire cette richesse et cette diversité ni d’interférer de façon destructrice avec la vie non humaine, sauf pour satisfaire des besoins vitaux.
4 – L’épanouissement des cultures et de la vie humaine est compatible avec une substantielle diminution de la population humaine. L’épanouissement de la vie non humaine exige une telle diminution. Le volume de la population humaine devrait toujours rester compatible avec le maintien de la richesse et de la diversité des formes de vie non humaines. Mais l’épanouissement de la vie humaine et la diversité des cultures ne doivent pas non plus être menacés par cette limitation. Celle-ci n’exclut donc pas le point de vue optimiste fréquemment exprimé selon lequel des politiques écologiques appropriées seront bientôt mises en place, de sorte qu’on pourra voir alors si une réduction de la population s’avère ou non nécessaire.
5 – La façon dont les hommes interfèrent aujourd’hui avec le monde non humain est excessive et nuisible, et la situation s’aggrave rapidement.
6 – Les programme en vigueur doivent donc être modifiés. Les changements doivent affecter les structures économiques, technologiques et idéologiques de base. Plus on attendra avant de les mettre en œuvre, plus on sera finalement obligé de recourir à des mesures draconiennes. La situation qui résulterait de ces changements serait profondément différente des conditions présentes et nous permettrait de faire une expérience plus joyeuse de la relation entre tout ce qui existe.
7 – Le principal changement idéologique consisterait à mettre en valeur la qualité de la vie (en s’intéressant d’abord aux situations dans lesquelles se révèle une valeur inhérente) plutôt qu’à rechercher un niveau de vie moyen toujours plus élevé. Cela implique de se pénétrer de la différence qui existe entre « gros » et « grand ».
8 – Ceux qui sont en accord avec les points précédents ont l’obligation directe ou indirecte, de contribuer aux efforts qui visent à aboutir aux changements nécessaires.
Arne Naess
Philosophe norvégien, théoricien du mouvement de l’Ecologie profonde