Il y a beaucoup à dire sur une ONG comme Greenpeace – son actuel président est le sud-africain militant des droits-de-l’homme Kumi Naidoo – qui divulgua il y a quelques mois un document sur les négociations secrètes du Marché transatlantique, suscitant au passage un certain nombre d’interrogations chez les complotistes comme ils disent (voir ici). Mais quand cette organisation affirme qu’il fait jour à midi, qu’elle dénonce avec justesse, preuves à l’appui, le rôle néfaste joué par des gouvernements et/ou des multinationales dans la dégradation de l’environnement, nous n’avons aucune raison de la contredire par principe. Nous avions approuvé la pétition initiée par Greenpeace contre le forcing bruxellois sur les OGM, la nécessité « d’éviter l’entrée massive en Europe de cultures invasives qui menacent la biodiversité, potentiellement nocives pour notre santé, potentiellement dangereuses pour l’indépendance économique des agriculteurs et polluantes car nécessitant l’utilisation d’énormément de produits chimiques ». Pareillement, autre exemple, nous avions lu avec intérêt les études réalisées en 2008 par cette organisation baptisées « Dirty Laundry » sur les traces de produits chimiques dangereux trouvées dans les vêtements importés en Europe, les conditions désastreuses, notamment sur le plan environnemental, de la production textile en Chine. Sans que cela ne trouble outre mesure les bonnes consciences bruxelloises sur le bien fondé d’un libre-échangisme, d’une mondialisation (anarchique) paraît-il inéluctable…
L’action menée le 12 octobre par des militants de cette association dans le périmètre même de la centrale nucléaire de Cattenom (Moselle) pour « dénoncer la fragilité et l’accessibilité de ces bâtiments pourtant chargés de radioactivité », ne manque pas non plus d’interroger. Yannick Rousselet, en charge de la question nucléaire au sein de Greenpeace France , a précisé qu’ils ont pu ainsi déclencher un feu d’artifice qui « a duré pendant 2 minutes et 30 secondes », à côté de la piscine d’entreposage du combustible usé.
Deux jours auparavant Greenpeace diffusait un rapport rédigé par« sept experts» (quatre Français, une Allemande, un Britannique et un Américain), « des spécialistes en sûreté nucléaire, sécurité, radioprotection et économie ». Une communication « expurgée des informations les plus sensibles » pour le grand public, visant à interpeller EDF et les pouvoirs publics, mettant en exergue « l’extrême fragilité des piscines de combustible (qui refroidissent le combustible nucléaire radioactif, NDLR) qui sont mal protégées face aux risques d’attaques extérieures. » La question de la menace terroriste étant ici bien sûr dans toutes les têtes.
Un article paru sur le site des Inrocks indique que ce rapport insiste sur le fait que si « le bâtiment réacteur est doté d’une enceinte de confinement renforcée, les piscines du combustible usé sont très mal protégées (…). Sécuriser ces installations impliquerait un coût colossal. Au total, ce sont entre 140 et 222 milliards d’euros qu’il faudrait débourser pour mener à bien ce gigantesque chantier. Soit entre trois et cinq fois ce qu’EDF a prévu de dépenser pour prolonger la durée de vie des centrales a calculé Le Parisien. De leur côté, les responsables de la sécurité nucléaire se veulent rassurants. Nos centrales sont très sûres, elles sont robustes et très bien construites. Elles sont bien surveillées, elles sont bien protégées affirme Philippe Sassaigne, directeur du parc nucléaire chez EDF (…). »
En 2006, bien avant le drame de Fukushima, à l’occasion du vingtième anniversaire de la catastrophe de Tchernobyl, Bruno Gollnisch pointait les manquements criants de l’Etat français dans la protection de la population en cas d’accident nucléaire grave. « Alors que cette catastrophe a prouvé que la zone immédiatement à risque, en cas d’accident grave, se situait dans un rayon de 200 km autour d’une centrale, seule la zone des 30 km est prise en compte en France. Rien n’a été entrepris en termes de sécurité civile, malgré le nombre important d’incidents prétendus mineurs détaillés chaque année dans les rapports parlementaires. On refuse d’entreprendre des études sur les éventuels liens entre l’apparition, l’explosion ou la concentration de certains cancers (thyroïdes) et Tchernobyl. Nier évite de payer, à tous les sens du terme, les erreurs et la lâcheté coupable du pouvoir face au lobby nucléaire.»
Alors, comment aborder plus globalement la question du nucléaire, secteur dans lequel la France est particulièrement en pointe? Il faut déjà dans un premier temps donner aux Français une information claire sur cette question dont se saisissent un certain nombre de manipulateurs, d’idiots utiles ou de lobbies agissant en toute connaissance de cause au service du maintien des intérêts pétroliers. Le tout sous couvert d‘écologie, en occultant ou en plaçant au second plan les impacts écologiques de la filière pétrole ou charbon. On constate par exemple en Allemagne les conséquences sur la qualité de l’air de l’utilisation de cette source d’énergie fossile depuis l’abandon du nucléaire décidé par Angela Merkel en 2011.
Marine l’a dit, se priver aujourd’hui du nucléaire serait totalement irresponsable – 80 % de notre électricité est produite par notre parc nucléaire, 15 % par nos équipements hydrauliques. Il s’agit à l’évidence d’une énergie dangereuse – aucune source d’énergie n’est réellement sans risque -, il convient donc de garder en vue la nécessité de se séparer du nucléaire. Mais pour l’instant, en l’état actuel de la recherche (et des trop faibles investissements réalisés dans ce domaine…), les énergies dites renouvelables ne sont pas en mesure de se substituer au nucléaire. Il s’agit donc de continuer à investir dans la sécurisation des sites nucléaires, dans le retraitement des déchets.
Greenpeace évoque dans son rapport le coût très lourd qu’impliquerait la sécurisation des centrales mais nous relevions en 2011 les conséquences futures de l’accord conclu alors entre Europe Ecologie-les Verts (EELV) et le PS. Il prévoyait l’arrêt de 24 centrales nucléaires sur les 58 en activité sur notre sol, le passage d’ici 2030 de 75 à 50 % de la part du nucléaire dans la production d’électricité en France. Or, Selon l’Union Française de l’Electricité (UFE), qui regroupe les professionnels de l’énergie en France – et qui défendait ici bien évidemment ses intérêts…- le surcoût d’une telle transition s’élèverait à 60 milliards d’euros, et même à 125 milliards selon les calculs de l’Institut Montaigne. Une somme à laquelle il convient d’ajouter le coût du démantèlement des 24 centrales (plusieurs dizaines de milliards d’euros) , dont l’arrêt amputerait par ailleurs le résultat opérationnel d’EDF de 4,9 milliards d’euros.
L’incidence sur l’emploi serait toute aussi importante puisque la filière nucléaire fait travailler environ 250 000 personnes en France. L’étude réalisée par Price Waterhouse Coopers pour Areva, estime que 160 000 postes seraient supprimés dans ce cas de figure d’ici à 2030.
Après « le tout charbon », « le tout pétrole », « le tout nucléaire », il ne s’agit pas d’imposer « le tout solaire » ou « le tout éoliennes ». Nous l’avons dit, si en l’état actuel il serait illusoire de tout attendre des énergies renouvelables, il est vital de mettre en place une politique d’ensemble, laquelle contribuera non seulement à la protection de notre environnement, mais aussi à assurer à notre pays son indépendance énergétique. Depuis plus de dix ans, le Front National prône une ambitieuse politique de diversification énergétique et notamment de recherche sur l’Hydrogène mais aussi sur le solaire, la bio-masse, la géothermie, l’utilisation des courants marins, voire les éoliennes… Pour peu que ces dernières respectent l’environnement naturel et humain dans lequel elles sont installées et que nous mettions un coup d’arrêt aux insupportables dérives actuelles…
Toutes choses qui nécessite des entreprises et des consommateurs, libres et responsables, agissant non pas sous la contrainte mais sous l’effet d’une fiscalité incitative. Et bien évidemment, condition sine qua non, un Etat souverain, fort et indépendant, capable de résister aux lobbies industriels.
Etat fort et souverain...un concept qui n’est pas la tasse de thé d’une organisation comme Greenpeace, qui s’est aussi rappelée au bon souvenir de nos compatriotes le 5 mai 2017 en déployant une banderole à la tour Eiffel. Selon Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, elle avait vocation à « lutter contre la résurgence des nationalismes et contre toute forme de régime autoritaire. Il est urgent de rappeler ces valeurs, qui ne sont pas représentées par le Front National. Marine Le Pen ne respectera pas la liberté, ne prônera pas une égalité pour tous et ne montrera aucune fraternité à ceux qui en ont besoin. Donc on est là pour rappeler qu’il y a urgence à se mobiliser contre le Front National », indiquait-il 48h avant le second tour de la présidentielle.
Certes, et contrairement à la très grande majorité des grosses ONG ayant pignon sur rue et dont les actions sont relayées par les grands médias, Greenpeace refuse les dons des fondations, des banques, des cercles de réflexion (think-tank) et des multinationales – ce qui n’empêche pas les infiltrations, instrumentalisations, manipulations par des services... Elle n’en véhicule pas moins un écologisme très orienté, une idéologie transnationale, de gouvernance mondiale, un altermondialisme qui en fait l‘allié de revers objectif des tenants du règne de la quantité et de la marchandise, d’un ultra-libéralisme niveleur et destructeur des identités et des diversités, qu’elle prétend pourtant combattre. Les tenants de la cohérence intellectuelle et les vrais défenseurs de l’écologie profonde((forcément de droite!) savent à quoi s’en tenir.