Ahval est un site d’information consacré à l’actualité turque et qui s’exprime en turc, en anglais et en arabe. Il est dirigé par Yavuz Baydar, journaliste connu en Turquie et qui a fui son pays après la tentative de coup d’État de juillet 2016. Selon un article posté sur ce site, le 26 septembre 2019, les islamistes auraient blâmé les femmes pour un tremblement de terre de force 5,8 sur l’échelle de Richter qui vient de se produire à Istanbul.
Sur les réseaux sociaux, des religieux musulmans turcs extrémistes ont accusé les femmes d’avoir provoqué le séisme en s’habillant de manière provocante, en égarant les hommes, en corrompant leur chasteté et en pratiquant l’adultère. Un prédicateur plus radical que les autres a même affirmé qu’Allah a provoqué cette catastrophe naturelle pour exiger l’annulation de la signature, par la Turquie, de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes. Les islamistes reprochent violemment à ce texte de favoriser la propagande LGBT et de porter atteinte aux valeurs familiales. Certaines femmes qui fuyaient dans la rue le tremblement de terre ont été victimes d’injures, et l’une en chemise prétendument trop courte a été harcelée pour sa tenue responsable, paraît-il, du séisme. Comble du ridicule, un prédicateur a même accusé les États-Unis de cette catastrophe.
Déjà, en 1999, après un séisme qui avait provoqué plus de 18.000 morts dans une région proche de l’ancienne Byzance, les femmes avaient été prises pour bouc émissaire. C’était, alors, le refus de porter le voile qui avait été mis en cause.
Ce phénomène n’est pas propre à la Turquie. Selon Le Figaro, en 2010, l’ayatollah iranien Kazem Sedighi avait, dans un prêche à Téhéran, attribué l’accroissement des tremblements de terre à l’augmentation des relations sexuelles illicites. Selon lui, les femmes, en ne portant pas une tenue islamique conforme, pervertiraient les jeunes gens et les inciteraient à l’adultère. Elles seraient donc les premières responsables des catastrophes naturelles.
En Occident, il y a plusieurs siècles, on accusait les sorcières ou les juifs de provoquer des épidémies ou des famines (et on les brûlait parfois pour les punir). Après la défaite de 1870, on a organisé, en France, des processions religieuses pour « expier les crimes de la Commune » auprès de Dieu et on a construit, dans ce but, la basilique du Sacré-Cœur sur la butte de Montmartre. En 1940, le régime de Vichy a favorisé « l’ordre moral » pour expier le Front populaire, même si le maréchal Pétain s’en est défendu dans un discours en octobre 1940.
En 2019, il reste des traces de cette mentalité : l’Occident est prompt à battre sa coulpe avec le réchauffement climatique dont nous serions tous responsables. D’autres discours ont accusé MM. Zemmour, Camus ou Finkielkraut d’avoir provoqué, par leurs écrits, la tuerie de Christchurch. Ils étaient pourtant aussi coupables de ce massacre que les femmes d’Istanbul du tremblement de Terre !