En cette grise matinée du 17 novembre, voici cette fois un dimanche perturbé par de nouvelles démonstrations de malcontents, déjà rassemblés la veille. Dans la capitale, dès 8 heures, 29 stations de métro avaient ainsi été bloquées par la RATP sur ordre de la préfecture de police.
Cette persistance des Gilets jaunes pourrait surprendre. Les défilés, rendez-vous et ronds-points des contestataires sont en effet passés pendant 12 mois, par toutes les couleurs, y compris le noir des blacks blocs.
Un an auparavant jour pour jour, les Gilets jaunes avaient sans doute rassemblé officiellement 282 000 personnes. Les autorités redoutaient, 364 jours plus tard, 300 à 500 violents, ultrajaunes ou ultragauche confondus ; le ministère de l’intérieur a recensé dix fois moins de manifestants sur toute la France, dont moins de 5 000 à Paris. Le décompte du Nombre jaune recense 39 000 participants dans l’Hexagone. Le mouvement a donc perdu entre 85 et 90 % de son audience.
À l'usage des lecteurs de droite, Le Figaronote simplement que le 1er anniversaire du mouvement des Gilets jaunes aurait réuni 28 000 personnes à travers tout le pays. Et il souligne que les violences à Paris, Nantes et Lyon, ont donné lieu à au moins 147 interpellations.
Faisant écho à une certaine exaspération d'une partie de l'opinion, autre catégorie de mécontentements,RTL, avait rappelé d'emblée que le gouvernement évalue à hauteur de 2,5 milliards d'euros le coût du mouvement sur la croissance et que 5 000 artisans et commerçants ont demandé un coup de pouce de l'État.
De son côté, toujours faussement objectif de gauche, Le Monde reprend les mêmes chiffrages que son homologue destiné au public de droite.
Et s'il donne la parole à certains manifestants, c'est pour leur faire dire : "Si je suis venu, c’est parce que rien n’a changé" ; ou bien encore"la manif déclarée d’un point A à un point B, ça ne sert à rien. Y a que quand ça chauffe que le gouvernement bouge". Et le même journal fait mine de déplorerque "plusieurs manifestations, même déclarées, n’ont pu se dérouler."
Mediapart au contraire semble exulter, qui titre : "Gilets jaunes un an après, toujours présents."
Signalons en sens inverse la démarche d'un Jean Lassalle, toujours tourné en ridicule par les médias du parisianisme. Le député des Pyrénées-Atlantiques s'est laissé photographier dialoguant sur un rond-point avec de bienveillants contestataires représentant du peuple, il est venu écouter.
Impossible aussi de ne pas souligner le contraste entre les Champs-Élysées, épargnés car interdits à toute manifestation, et la place de la Bastille, ou la place d’Italie, où se sont retrouvées environ 3 000 personnes. Là, dès la fin de la matinée, la situation s’est dégradée : voitures retournées, jets de pavés et feux de poubelles, etc.
À remarquer aussi dans le 20e arrondissement le germe d'affrontements futurs auxquels l'opinion n'est encore guère préparée. Une ancienne salle de concert, La Flèche d’or, s'est vue investie par plusieurs centaines de gauchistes. Une telle occupation illégale a été préparée par un collectif comprenant une vingtaine de groupuscules : Extinction rébellion, tels prétendus défenseurs des sans-papiers ou des mal-logés ou même le CLAQ, Comité de lutte et d’action queer. On imagine d'en faire une soi-disant Maison des peuples, au pluriel dans le texte, reprenant une initiative apparue cette année à Saint-Nazaire. Un tel lieu de croisement se veut ainsi au service d'une stratégie se réclamant d'une convergence des luttes.
En face, sous la couleur bleue des forces de l'ordre s'alignent des formations elles-mêmes d'appellations et de statuts fort différents. On peut les observer cependant toutes harassées. On a pu les constater, tout au long de ces 52 semaines, mal utilisées par le pouvoir technocratique. Elles se sentent injustement vilipendées. Les consignes floues et fluctuantes, transmises au gré des palinodies jupitériennes par les cavaliers inaptes qui les chevauchent, portent l'écrasante responsabilité de comportements, que les médias et les éternels gauchistes dénoncent et grossissent à l'envi.
Rappelons aussi, pour qui souhaite comprendre et voir de façon plus réaliste le phénomène d'ensemble, qu'il existe, de plus en plus, un décalage considérable entre Paris et ce qu'on appelait autrefois la France profonde.
Ce pays, morcelé dans sa nature mais jacobin dans ses raisonnements, sera peut-être appelé un jour la Gaule résiduelle. Elle a été constituée elle-même, au cours des siècles, de régions et d'identités fort diverses.
Plus prosaïquement, d'un point de vue strictement matériel, sous l'angle d'un regard que certains pourraient croire peut-être marxiste, le poids des transports dans le budget des ménages diffère de façon sensible entre la région Île de France et le reste du pays. Le prix du carburant à la pompe, reflet fiscalisé d'un marché mondial du brut, lui-même fluctuant, n'impacte pas à égalité le niveau de vie des uns et des autres.
D'une protestation anti-étatiste contre le prix de l'essence, on a pu passer à une rhétorique super-étatiste, super-fiscaliste, super-égalitaire : c'est-à-dire à un discours qui, autrefois, relevait du monopole idéologique de l'extrême gauche.
Face à ce déferlement le pouvoir actuel ne sait ni comprendre les ressorts du peuple, ni apporter les réponses en profondeur dont le pays ressent, souvent confusément, parfois fébrilement le besoin. On l'imagine encore moins juguler la dérive révolutionnaire si elle s'aggrave.
Combien lointaine apparaît désormais l'année 2017 !
Ayant, à deux ans de distance, débuté par un faux triomphe, ce ridicule et misérable quinquennat s'achemine vers un vrai désastre.
Il semble donc temps qu'il s'achève.
JG Malliarakis
Mercredi 27 novembre conférence de JG Malliarakis sur la Naissance de l'Illusion mondialiste à l'occasion de la réédition du livre d'Emmanuel Beau de Loménie "La Ratification du Traité de Versailles"
de 18 h à 20 h à la Brasserie du Pont Neuf 14, quai du Louvre M° : Louvre, Pont Neuf ou Châtelet
Aux origines du déclassement de ce pays
Charles Freppel : La Révolution française"
Injustement oublié de nos jours l‘auteur fut l'une des plus intéressantes figures de la droite monarchiste du XIXe siècle. Constructeur actif, et politique intelligent, cet évêque d'Angers fut à l'origine des universités libres catholiques. Cet Alsacien saura se faire élire, en pleine IIIe république, député royaliste de Brest. Adversaire lucide de l'héritage jacobin, il résume dans ce petit livre fort, écrit à l’occasion du Centenaire, toutes les entraves, toutes les idées fausses et toutes les nuisances que les plaies de la Révolution de 1789 ont projetées sur l'avenir de la France. Il reprend ici un par un tous les faux arguments que nous entendons seriner encore aujourd’hui, y compris par des gens sincères, qui se disent “patriotes”, et de droite.
••• Un livre de 160 pages au prix de 20 euros.
• à commander sur la page catalogue des Éditions du Trident
• ou par chèque en téléchargeant un bon de commande
→Lire aussi la Chronique de L'Insolent du 17 juillet 2008 "De la révolution, du 14 juillet, du jacobinisme et de l'horreur qu'ils doivent nous inspirer." Petit hommage à Charles Freppel.