La politique française donne le sentiment étrange d’empirer d’année en année sans que le fond de l’abîme ne soit jamais atteint.
D’après l’enquête de CEVIPOF sur la confiance, 79% des Français ont une image négative de la politique. 39% éprouvent de la méfiance envers elle, 28% du dégoût et 10% de l’ennui. S’ajoutant à l’explosion de l’abstentionnisme (plus de 50% aux législatives de 2017) et au vertigineux progrès du vote « anti-système » de gauche ou de droite, ces résultats soulignent le climat d’écœurement qui ronge le pays et la profondeur du fossé qui sépare la classe dirigeante du peuple et ne cesse de se creuser. Faut-il s’en étonner ?
A la veille des municipales, les responsables publics semblent n’avoir aucune conscience de leur déconnexion croissante et de la tragédie qui se noue en ce moment autour de leurs quatre péchés capitaux : démagogie, lâcheté, incompétence et mépris.
La démagogie ruisselle de partout. Un candidat majeur pour la mairie de Paris promet tout simplement de déplacer une gare et une subvention de 100 000 euros aux acquéreurs d’un logement. Environ 700 000 ménages parisiens vivent en location et pourraient donc être candidats à l’achat de leur logement. Coût total potentiel ? 70 milliards €. Avec quel financement ? Quels impôts supplémentaires ? Et quid du principe d’égalité avec les non Parisiens ? Un autre candidat annonce la plantation de 170 000 arbres et la création de forêts urbaines à Paris. Sur quels emplacements, quels espaces ? De même, une cheffe de parti politique propose le retour à la retraite à 60 ans alors que la moyenne européenne est à 65 ans : coût de la mesure ? Financement ? conséquence sur l’économie française et la dette publique ? Pour qui, pour quoi prennent-ils les Français ?
La lâcheté, nous l’avons vu à l’œuvre dans l’affaire Mila. Accusée d’avoir commis un blasphème contre l’Islam, la jeune fille de 16 ans, pourchassée, menacée de mort, était toujours déscolarisée douze jours après le déclenchement du drame. Il est avéré qu’elle n’a rien commis d’illégal, s’en prenant à une religion, et non à des personnes. Et pourtant, devant la situation d’une adolescente privée d’école – symbole du triomphe de l’obscurantisme sur les lumières – il s’est trouvé un responsable politique majeur pour continuer de l’accabler en l’accusant d’avoir « manqué de respect ». Et d’ailleurs, dans cette affaire, le silence des plus hautes autorités de l’Etat fait froid dans le dos. Et les quelques politiques qui ont pris sa défense – à l’image de M. Bruno Retailleau, Julien Aubert, Guillaume Larrivé, Brice Hortefeux, Xavier Bertrand ou de Nicolas Dupont Aignan – détonnent sur le climat général de lâcheté et de dérobade.
L’incompétence : piloter le navire France est certes une tâche lourde et complexe, nul n’étant à l’abri d’un faux pas. Pour autant, le cumul des fautes est impressionnant. Deux décisions, les 80 km heures et la taxe carbone, toutes les deux retirées, ont provoqué la crise des gilets jaunes et plongé la France dans le chaos et la violence pendant plusieurs mois. Puis, une réforme des retraites qui se voulait dantesque, marquée par le scandale, une extrême confusion et une cascade de reculades, a de nouveau précipité le pays dans une tempête sociale de 45 jours aux coûts incalculables, pour un résultat dont le Conseil d’Etat a sévèrement fustigé l’incohérence – ce qui est exceptionnel.
Le mépris est en toile du fond du drame politique que subit aujourd’hui le pays. Il s’exprime sous des formes multiples : mépris de l’histoire quand la colonisation est assimilée au crime contre l’humanité ; mépris de la démocratie et du suffrage universel quand tout est mis en œuvre pour fausser l’interprétation des résultats de l’élection municipale ; mépris de la réalité quand la parole dément que le père soit forcément un « mâle » ; mépris de la vérité quand le slogan de la «transformation de la France » sert à habiller l’impuissance, un chômage qui baisse moins en France qu’ailleurs en Europe et l’explosion de la dette publique, des prélèvements obligatoires, la violence, la pauvreté, l’insécurité, les migrations qui battent tous les records dans un climat de déchirement du tissu social sans précédent historique ; mépris des gens quand les plus hauts dirigeants se complaisent dans les provocations verbales et visuelles en tout genre tandis que le pays se morfond pour l’avenir de ses enfants.
Une question est aujourd’hui sur toutes les lèvres : comment cela va-t-il finir ?
Maxime Tandonnet
Texte repris du blog de Maxime Tandonnet
https://fr.novopress.info/216796/politique-francaise-de-charybde-en-scylla-par-maxime-tandonnet/