Voici aujourd'hui le point de vue de notre ami Patrick Parment, directeur du Journal du Chaos et contributeur régulier depuis leur création, en 2006, de notre site et de notre revue.
Dans sa revue de presse hebdomadaire, Le Journal du Chaos, envoyée gratuitement tous les samedi depuis plus de dix ans à ceux qui en font la demande* et reprise sur notre site, Patrick Parment recense et commente l'actualité de manière pour le moins... non-conformiste.
S.N.
Patrick Parment
Il est extrêmement problématique d’avancer les leçons que tireront nos responsables politiques tant en France qu’en Europe de cette crise provoquée par le coronavirus. Une chose est toutefois certaine, chaque pays européen a réagi en solitaire et en fonction de sa culture face à la pandémie. D’où cette disparité des réactions. Une fois de plus, l’Union européenne a marché en ordre dispersé et a apporté en urgence, la seule et unique réponse qui s’imposait à elle, à savoir monétaire via la Banque centrale européenne.
Là où les choses se compliquent, c’est que ce virus n’a pas seulement mis à mal nos économies, il a aussi impacté la société elle-même. En mettant tout d’un coup plusieurs millions de personnes au chômage et en fragilisant tout le tissu de PMI/PME, c’est le cœur même de notre environnement socio-culturel qui est atteint.
En revanche, c’est bien au sein de nos institutions que l’on peut tirer un certain nombre de conclusions. Politiquement ce gouvernement n’a pas su gérer la crise en ne prenant pas d’emblée la première mesure qui s’imposait au regard de l’exemple chinois, de faire porter un masque à la population afin d’endiguer toute propagation du virus, tout en proposant un ralentissement de la vie économique et sociale aux stricts besoins du pays. Or, il n’en a rien été pour la bonne raison que l’Etat français avait arrêté l’achat massif de masque depuis François Hollande.
Alors que médecins et soignants font preuve d’un dévouement exemplaire, les défaillances de notre système de santé que ne cessent de dénoncer l’ensemble du corps médical, nous a pété à la figure. Voici des décennies que l’on traite la santé des Français sur un mode budgétaire et non à partir des réalités humaines. Les hôpitaux qui crient famine sont gérés par des comptables chargés de faire des économies sur tout. Que dire également de notre industrie pharmaceutique qu’on a relégué, pour des raisons de coûts, en Inde et en Chine et dont nous sommes aujourd’hui totalement dépendant.
Dans le même ordre d’idée, on a réduit l’accès aux études de médecine en imposant des quotas, ce qui nous conduit aujourd’hui à une pénurie de médecins. Et le pire est à venir avec le départ à la retraite de toute la génération issue du « baby boom ». Un comble alors que nous avions un excellent système de santé.
Le problème est qu’il en va ainsi depuis que nos gouvernants obéissent tous à la sacro-sainte loi néolibérale qui consiste à tout budgétiser et à satisfaire non plus les populations par une juste répartition des richesses mais enrichir les actionnaires du CAC 40 qui, par ailleurs, arrosent toute la classe politique. C’est tout ce système du capitalisme financier mis en place après 1989 avec la chute du communisme qui est devenu la norme des économies occidentales. Et c’est ainsi que l’Occident – l’Amérique en tête – a fait la fortune de l’Asie et surtout de la Chine, devenue le lumpenprolétariat d’un Occident qui a tout sacrifié au Veau d’Or.
Autre aspect, et non des moindres, mis en valeur par la pandémie, le sort réservé à nos paysans broyés par la grande distribution. Alors que cette dernière a vu les frontières se fermer, tout le secteur agroalimentaire français a pris le relais pour continuer de nourrir la population. Il est donc temps de mettre fin à un système où c’est le producteur qui paie la facture du distributeur quand ce devrait être l’inverse.
Enfin, parmi les autres domaines relevant également du régalien, on trouve la justice, à l’arrêt et dont le manque de moyens impacte sérieusement un retour à la normale. Mais, ici aussi, ce n’est pas une nouveauté, voici des lustres que magistrats et personnels judiciaire tire la sonnette d’alarme.
Point positif dans cet océan de détresse, le maintien de nos besoins énergétiques grâce à nos centrales nucléaires. Voici qui relativise une fois de plus le discours des écolos de basse-cour.
Dans tous ces domaines - la liste n’est pas exhaustive -, on aimerait espérer que l’Etat français évolue. Sous réserve aussi de réviser le modèle économique dominant qu’est le capitalisme financier en le remettant dans le droit chemin. C’est-à-dire au service des hommes et non des actionnaires. Mais il y a fort à parier que le système va tenter par tous les moyens de remettre la main sur les prérogatives dont il jouissait hier encore. Auquel cas, il faut s’attendre à aller de crise en crise, la révolte des Gilets jaunes sonnant comme les prémisses d’un monde à venir.
* Envoyez votre adresse électronique à l'adresse suivante : lesanars@orange.fr