Le tabac, présenté comme mauvais pour la santé, serait plutôt bon contre le Covid-19, les fumeurs étant, semble-t-il, moins touchés que les autres. Vrai ou pas, Sibeth Ndiaye, porte-parole de l’Élysée, semble avoir tranché cette épineuse question de santé publique.
Ainsi, ce dimanche dernier, alors qu’elle s’apprête à répondre aux questions d’Apolline de Malherbe, journaliste à BFM TV, on la voit en duplex, en train de tranquillement s’en griller une dans son bureau. Du coup, Apolline de Malherbe, qui a la déontologie et l’esprit citoyen chevillés au corps, s’excuse illico : « Je voudrais présenter mes excuses aux téléspectateurs, parce que l’on vous a vue il y a quelques instants en train de fumer une cigarette et vous ne saviez sans doute pas que vous étiez filmée. Ce n’était que quelques secondes avant la prise d’antenne. »
Pauvre Sibeth, qui ne savait peut-être pas non plus qu’elle était invitée à la télévision et non point à la radio, où ce genre d’écart républicain est déjà nettement moins voyant. Et pauvre Apolline, qui tente de se faire pardonner, juste parce que BFM TV est prise en flagrant délit de filmer la réalité.
Allez savoir pourquoi, mais ce petit côté ORTF époque « Apostrophes » et « Droit de réponse », émissions souvent filmées dans les vapeurs de liqueurs écossaises et les volutes de fumée, la rendrait presque sympathique, cette dame connue pour toujours parler avant de réfléchir, alors que c’est l’inverse qui se trouve être plus communément admis.
Y aurait-il donc une énigme Sibeth Ndiaye ? Oui, à en croire nos confrères de Valeurs actuelles qui, à l’occasion d’un portrait en demi-teintes, dressé le 30 avril dernier, estime que « la quadragénaire aux coiffures parfois excentriques, aux tenues bariolées et au langage pas toujours châtié vaut sans doute mieux que les caricatures qu’elle s’impose ». Fille de la haute société sénégalaise, elle est forte d’une culture classique : « Quand je suis arrivée en France à seize ans, j’utilisais un langage très soutenu. Je me sentais parfois en décalage avec mes camarades de classe. » Lesquels sont tout de même ceux du lycée Montaigne ; c’est dire l’avachissement de ce sanctuaire réservé aux enfants des élites…
Bref, celle dont les « gens se demandaient » si elle était « fille de Bokassa » ou « jeune femme de banlieue » assure être « mimétique ». Si « mimétisme » il y a, on dira que l’exemple vient de haut, de très haut, Emmanuel Macron paraissant être aussi à l’aise en discourant au collège des Bernardins qu’à tu et à toi avec Kiddy Smile à la fête de la Musique, « fils d’immigrés, noir et pédé ». Que tout cela doit être épuisant. Et on s’allumerait une cibiche à moins.
Signe des temps, cette vidéo de 17 secondes a déjà été vue et commentée des centaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux. La France a les psychodrames qu’elle peut. Mais celui-là a dû mettre un peu de baume au cœur de ces mauvais Français à gilets jaunes, naguère stigmatisés par Benjamin Griveaux, ancien porte-parole du gouvernement et connu pour être au garde-à-vous dès potron-minet, comme étant des « gars qui fument des clopes et qui roulent au diesel ».
En attendant, tous les fumeurs de ce pays se sentent enfin vengés. D’abord parce que Sibeth Ndiaye les a tous décomplexés : si elle peut fumer sur son lieu de travail, pourquoi pas eux ?
Nicolas Gauthier
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