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La dette, source d'injustice et de violence (2010) 2/2

Sortir de l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) pour combattre la désindustrialisation et la concurrence asiatique ? Impossible pour cause de dogme mondialiste ! Supprimer les prestations aux immigrés de Seine-Saint-Denis ? Également impossible ! Cela ferait "fâcho" et il y aurait des émeutes. Surtaxer les riches et les banquiers ? Très difficile, car ils font du chantage à la fuite des capitaux. Une idée pourrait venir : celle d'euthanasier les personnes âgées qui coûtent cher à la collectivité. Ce serait dommage car les anciens sont porteurs d'une mémoire renvoyant à des époques où les valeurs étaient autrement plus nobles qu'aujourd'hui. L'avantage c'est que les personnes âgées ne fabriquent pas de cocktails Molotov et ne caillassent pas les policiers. Alors hop, tant pis pour la mémoire, un petit coup de zyklon et ciao les petits vieux !

Trêve de très mauvaise plaisanterie (mais est-ce vraiment une plaisanterie ?), ceci pour dire qu'on fera payer non pas ceux qui le méritent le plus, mais ceux qui résistent le moins, par exemple les retraités. Au demeurant, des projections indiquent que repousser d'un an ou deux l'âge de départ en retraite ne permettra probablement pas d'équilibrer les comptes et encore moins de résorber la dette de la France. Par conséquent, tout ou presque est bloqué et l'endettement de la France va continuer.

La limite à ne surtout pas dépasser est la limite de réversibilité de la dette, qu'on peut définir comme le niveau de dette à partir duquel le paiement des seuls intérêts de ladite pour une année devient supérieur à la part de ses recettes (essentiellement les impôts, quelques dividendes versés par Renault...) que l'État peut consacrer à ce remboursement sans détruire l'économie (car trop d'impôt tue la croissance et donc tue l'impôt lui-même) Étant donné que les intérêts de la dette se reconstituent d'eux-mêmes chaque année, quand on dépasse cette limite, c'est fichu : le défaut de paiement est irréversible. Le réacteur des intérêts composés s'emballe, on n'arrive plus à le refroidir et la dette est alors hors de contrôle. En politique, on peut tricher assez facilement et faire croire aux gens qu'être envahi par les musulmans est bon pour eux, cela n'a pas de conséquences légales. En économie, c'est beaucoup plus dur et tôt ou tard il faut passer à la caisse ou subir les effets graves de ce genre de propos et de politique !

Toutefois il reste quand même une dernière et lamentable issue possible à la faillite, une ultime tricherie envoyer une certaine quantité de dette dans un dépotoir à dettes appelé Banque centrale. La Grèce, il ne faut pas s'y tromper, est dans cette situation d'irréversibilité de sa dette. La Grèce a bel et bien fait faillite en mars 2010 et ce sont la BCE et le FMI qui ont joué le rôle du dépotoir. Dans le cas d'un défaut des États-Unis, si la Réserve Fédérale perdait sa crédibilité sur les marchés, seule une énorme banque centrale mondiale qui n'existe pas encore (heureusement !) pourrait jouer ce rôle.

Dans les jours précédant l'accord avec la BCE et le FMI, on a beaucoup commenté le fait que la Grèce était obligée de payer des intérêts sur sa dette scandaleusement plus cher que les autres pays (environ 7 % au lieu de 4). Ce n'était pourtant encore qu'un prix de gros. Et puis, entre politiques et financiers, n'est-ce pas, on finit toujours par s'arranger… Pour le particulier français qui a dépassé son découvert autorisé, par contre, le prix de l'argent au détail est d'environ 15 % et il n'y a pas moyen de transiger. S'il n'est pas content, c'est le même prix. S'il ne peut plus payer, on vient saisir ses meubles. Dans certains cas, la Banque de France effacera peut-être une partie de ses dettes, mais alors ce sont ceux qui n'ont pas droit au même traitement qui risquent de s'énerver. L'économie d'endettement mène à la zizanie.

C'est d'ailleurs là un des plus grand non-dits de la crise de 2008 aux USA : ceux qui se sont sagement tenus à l'écart du système et n'ont pas contracté de crédits immobiliers ont, en fait, été gravement lésés de manière indirecte comparés à ceux dont le Trésor, les banques ou la "Fed" ont effacé une partie du passif. Pourquoi dans ces conditions chacun n'aurait-il pas le droit de se créer sa propre petite banque centrale pour y faire disparaître tranquillement des dettes lorsque le besoin s'en fait sentir, c'est-à-dire tout le temps ? L'endettement mène à l'injustice, à l'absurdité, à la violence. C'est parce qu'il comprend parfaitement ce danger et qu'il ne veut pas y être associé que Jean-Claude Trichet, dans son discours du 8 avril à la veille de l'accord sur la Grèce, s'est défaussé sur les politiques. « Les États doivent maintenant faire face à leurs responsabilités », a-t-il déclaré solennellement.

Ce que les média ne disent pas trop non plus, c'est que le déficit de revenu de la dette étant structurel, à moins que cet aspect ne change, il va falloir aider la Grèce tous les ans à hauteur de 30 ou 40 milliards et pas seulement cette année. Pour la France, si les tendances actuelles se poursuivent, la limite de réversibilité (dette atteignant 170 % du revenu national, cas actuel de la Grèce) pourrait être atteinte dans six ans à peine.

Christophe Poitou Écrits de Paris N° 735 Octobre 2010

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