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Avant de commémorer Mai 68... (2017)

S’il est un signe du caractère violent de notre société, c’est l’expansion de ceux qu’il est convenu d’appeler les antifas, et qui radicalisent le grand mouvement de mai 68  contre les flics et contre tout ordre supérieur aux individus cela au moment ou on parle d’en célébrer le cinquantenaire.

On aimerait nous faire croire que le danger en France, ce sont les fachistes. En réalité les antifas sont absolument décomplexés et beaucoup plus dangereux comme vient de le démontrer l'affaire des incendies de voitures qui ont eu lieu, nuitamment, entre le 25 et le 26 octobre, à l'intérieur de la caserne de gendarmerie de Meylan en Isère. La revendication, sur une Plateforme informatique, indique que ce sont des femmes d'un mouvement féministe « dur », qui ont sévi. Ce site avait déjà servi pour d'autres revendications antifa. Il semble fiable. Et quand bien même ce mouvement féministe ne serait pas à l'origine de ces incendies, la rhétorique ultra-violente qu'il emploie mérite le détour. Elle nous renvoie à la perspective d'un Mai 68 "pour de vrai" et pas simplement dans le langage, une perspective pas vraiment rassurante !

Ces dames expliquent d emblée que cet attentat dangereux, qui a failli coûter la vie à quelques gendarmes, si l'un d'entre eux n'avait pas eu le bon esprit de se réveiller en pleine nuit, était une manière de se découvrir elles-mêmes, de se réaliser au-delà de leur sexe, on dirait dans le vieux langage de « faire leurs preuves »; elles préfèrent utiliser le terme « être définies ». La fameuse formule de Simone de Beauvoir, « on ne naît pas femme, on le devient » est au cœur de la démarche de ces militantes, qui se définissent, dans leurs actions ! On reconnaît aussi Judith Butler et ses « Gender studies » dans le puritanisme inavoué de ces donzelles, qui veulent rien moins que mettre en cause leur identité sexuée : « Nous ne voulons pas être définies par les particularités de notre corps mais bien par ce qui résulte de nos choix, nos éthiques et nos actes ». L'acte avant l'être, c'est le vieil existentialisme des années 50 qui ressurgit inopinément, dans une sorte de morale héroïque, où casser du flic est devenu un but en soi et une manière, oui, de dépasser la sexuation, de dépasser « l'être femme » par des actes d'éclat, qui eux n'ont pas de sexe.

Entre Simone et Judith

Vous me direz que même si ces demoiselles ont mis des vies en danger, elles n’avaient pas forcément l'intention de casser du flic, mais simplement de s’en prendre à leurs voitures. Elles ont visé des voitures et des deux-roues privés, pensant sans doute que cela coûterait moins cher devant un tribunal. Mais le motif qu’elles donnent est intéressant. Il manifeste là encore une lecture attentive de Judith Butler, la papesse du Gender pour laquelle, dans une sorte d'ultra-marxisme, l'identité, qu’elle soit sexuelle, religieuse ou culturelle, est toujours une construction sociale. Il importait de déconstruire le flic, expliquent-elles, pour s’en prendre à la personne elle-même et pas à ce qui reste un choix purement professionnel : son statut de flic. Voici comment cela se formule dans cette étrange revendication de l'attentat, dont nous venons de citer un premier passage croquignolesque : « Nous avons ciblé les voitures privées des flics (…) parce qu’on avait envie de s’attaquer plutôt aux individus qui portent l'uniforme qu à leur fonction, plutôt à leurs bien personnels qu à leurs outils de travail. Nous pensons que les rôles existent parce qu'il y a des personnes pour les remplir Si derrière l'uniforme il y a un humain, c'est à lui que nous avons cherché à nuire ». Nuire à l'humain, coupable a priori d avoir voulu devenir un flic, voilà où mène le radical-féminisme de ces demoiselles.

Quel rapport avec le féminisme ? direz-vous peut-être. C'est simple : le féminisme s'est lui-même radicalisé. Il signifie aujourd'hui la critique de tout ordre sexuel. Et plus largement il signifie la critique et la destruction de tout ordre, qu'il soit civique ou sécuritaire et l’affirmation infime d'une liberté individuelle qui refuse toute limite : interdit d'interdire. Alors qu'il est question, l’année prochaine, de commémorer Mai 68 on voit où mène cette révolution qui, à l’époque, fut surtout rhétorique, mais qu’aujourd'hui les antifas entendent introduire dans la vie quotidienne, pour achever de casser les structures sociales qui nous protègent. Il ne faudrait surtout pas croire d'ailleurs que cette revendication féministe de l'attentat de Meylan soit un cas unique en son genre. La violence des femens est du même ordre. Ce qu’elles veulent en montrant leurs seins ? Casser les codes sociaux et en particulier l’exception féminine, montrer, par l’absurde que les femmes sont des hommes comme les autres.

Le procès tout récent des antifas Antonin Bernanos (cinq ans dont deux avec sursis), David B, une Américaine transgenre qui se pique de philosophie (deux ans ferme), et Joachim L. citoyen suisse condamné par contumace à sept ans, procès au cours duquel le Juge a enfin parlé de « risque de réitération » à propos de l'incendie d'une voiture de police, avec mise en danger volontaire des agents de la force publique qui se trouvaient à l'intérieur montre que petit à petit on prend conscience que ces fils de famille, souvent élèves brillants, ne sont pas seulement de doux libertaires qui auraient été un peu trop loin mais constituent en réalité, eux aussi des symptômes d'une désintégration inquiétante de notre société, non pas seulement par la pression extérieure des migrants, mais par une sorte de suicide moral.

Alain Hasso monde&vie  9 novembre 2017 n°947

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