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Pologne : des mauvais perdants

L’élection présidentielle, en Pologne a vu la victoire du PiS, le Parti Chrétien Conservateur. Au grand dam des européistes des mondialistes.

Réélu à la présidence de la Pologne le 12 juillet dernier, Andrzej Duda doit faire face à une contestation en justice de son adversaire malheureux. Mais surtout à l'opposition d'une grande part de la classe politico-médiatique européenne qui n'admet toujours pas que l'élu conservateur du PiS puisse avoir le soutien d'une majorité de Polonais alors que Bruxelles n'apprécie guère son indépendance politique.

On donnait les deux hommes au coude à coude. Et, de fait, Andrzej Duda, le président sortant et candidat du PiS, et Rafal Trzaskowski, son adversaire libéral de la Plate-forme civique, auront eu des résultats très proches : 51,2% contre 48,8%. Aussi n'a-t-on pas tardé à entendre grincer bien des dents...

On peut comprendre, dès lors, que l'adversaire malheureux d'Andrzej Duda ait voulu contester devant la Cour suprême - laquelle avait jusqu'au 3 août pour se prononcer - le résultat de cette élection, affirmant avec ses soutiens qu'elle n'aurait été ni « équitable », ni « honnête », et dénonçant, à l'appui de cette critique, des irrégularités, et la partialité de la télévision publique.

« Nous avons demandé que l'élection soit déclarée invalide », a ainsi déclaré le chef de la Plate-forme civique, Borys Budka.

Il faudra davantage, sans doute, pour convaincre les juges; mais la critique est classique. Gageons que, si le résultat avait, à l'inverse, favorisé le candidat libéral, on aurait eu droit à un discours tout différent sur le respect de la démocratie, et celui des voix des électeurs dont un nombre minime, même très restreint, peut faire la différence, etc.

Il faut cependant noter que, contrairement à certaines prévisions, la participation des électeurs à cette élection présidentielle était en hausse, notamment au second tour. Il est donc difficile de prétendre qu'Andrzej Duda aurait été mal élu. Sauf, bien sûr à présenter des preuves tangibles d'irrégularités volontaires, et il semble, pour l'heure, que nous en soyons loin.

Bruxelles tique

Mais ce qui est particulièrement agaçant dans cette affaire est le traitement médiatique européen. Le Monde estime ainsi que le pays est désormais « coupé en deux », après avoir expliqué, durant la campagne, que le président polonais n'était, en somme, qu'une marionnette entre les mains de l'homme fort du pays, Jaroslaw Kaczynski. On se permettra de douter que le quotidien français ait vu la chose d'un même œil si la victoire avait, au contraire, favorisé un candidat qui lui souriait davantage...

Il faut dire que le camp pro-européen enrage de voir la Pologne - et un certain nombre de pays de la région - préférer des politiques nationales aux injonctions de Bruxelles. Andrzej Duda est accusé de bien des maux contre l'indépendance de la justice, l'idéologie LGBT etc.

Huit jours avant sa réélection, il avait ainsi assisté à la prestation de serment de jeunes volontaires pour la « défense du territoire », affirmant à cette occasion que « la famille est une valeur fondamentale au sein de laquelle le patriotisme se transmet depuis des siècles ». On comprend que certains grands esprits s'en soient étranglés !

Dans le même esprit, la Pologne envisage de se retirer de la Convention d'Istanbul, ainsi que l'a souligné, tout dernièrement, Marlena Malag, ministre de la Famille, du Travail et de la Politique sociale. De fait, cette Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et contre la violence domestique prévoit que la théorie du genre pourrait devenir une norme contraignante.

Si la Pologne l'avait ratifiée en 2015, elle avait assorti sa signature d'un certain nombre de réserves, afin que cette Convention ne puisse être appliquée que selon l'esprit de la Constitution polonaise. Et, de fait, plusieurs responsables gouvernementaux ont souligné qu'on ne pouvait prétendre lutter contre la violence en imposant la théorie du genre aux enfants, et en détruisant ainsi les valeurs polonaises.

Aussi, fin juillet, le Premier ministre Mateusz Morawiecki a-t-il annoncé sa volonté de « demander au Tribunal constitutionnel d'examiner si la convention est conforme à la Constitution polonaise ».

La Commission européenne a d'ores et déjà adressé un nouvel avertissement à la Pologne sur ce sujet. Mais on doute que, renforcée par la réélection d'Andrzej Duda, la Pologne s'en inquiète beaucoup plus que des précédentes. Il est vrai qu'un certain nombre d'analystes estime que les autorités polonaises devraient faire davantage cas des idées de leurs adversaires au motif que ces derniers ont fait un très bon score. Avec une logique pareille, on se demande à quoi peut bien encore servir la démocratie électorale ?

Mais le pompon revient sans doute à Donald Tusk, ancien candidat à la présidentielle polonaise en 2005, ancien président du Conseil européen, et actuel président du Parti populaire européen qui écrit le jour-même : « En tant que chef des démocrates-chrétiens européens, je voudrais vous rappeler que Jésus a toujours été du côté des plus faibles et des blessés, jamais du côté de l'autorité oppressive. »

On ne sait dans quelle version édulcorée Donald Tusk lit la Bible. Quoi qu'il en soit, cela ne semble pas affecter ses compatriotes dont un grand nombre préfère toujours croire en leur patrie plutôt qu'aux lubies bruxelloises.

Olivier Figueras Monde&Vie 14 août 2020 n°989

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