À l’inverse du capitaine du Titanic et de son équipage qui ne disposaient, évidemment, d’aucun radar (inventé en 1935) et naviguaient tout simplement à vue, avec de bêtes jumelles comme seul instrument d’observation, le capitaine Macron, son second Castex, le lieutenant Borne et le quartier-maître Le Maire disposent, à bord du France, d’une nuée de capteurs à faire pâlir Neil Armstrong.
Le problème, c’est que l’adage bien connu « trop d’info tue l’info » ne souffre pas d’exception.
Et les capitaines Macron et Castex ne voient pas plus loin que le bout de leur navire, alors qu’ils ont le nez quasiment collé à l’iceberg Chômage, l’un des plus gros jamais croisés par notre pays dans toute son histoire moderne.
La raison de cet aveuglement est pourtant simple à comprendre, et c’est le ministre du Travail Élisabeth Borne qui nous l’a donnée fin novembre. « Embauchez les saisonniers, l’État les prendra en charge », lançait-elle aux stations de sport d’hiver qui espéraient encore, à l’époque, pouvoir ouvrir à Noël. Oubliant, au passage, que la promesse d’un reste à charge zéro était complètement bancale, sans doute imaginée par un jeune énarque qui n’est jamais passé par la case entreprise. En réalité, même à 100 % au chômage partiel, un salarié coûte encore à son employeur jusqu’à 20 % de sa rémunération brute.
Oui, si l’on navigue totalement dans le brouillard quand on parle du chômage, en France, c’est tout simplement parce que 3 millions de salariés, sur un total de 29,2 millions d’actifs du secteur privé (soit plus de 10 %), sont actuellement au chômage partiel. Catégorie qui n’est pas comptabilisée dans les chiffres officiels du chômage.
Le taux de chômage français est complètement bidon
Ainsi, toujours officiellement, il y a 3,8 millions de chômeurs en France dans la catégorie « phare » A, celle utilisée pour comparer les pays entre eux. En ajoutant les chômeurs des autres catégories (en formation, en activité partielle, etc.), on atteint quasiment le double : 6,01 millions. Mais, donc, si l’on ajoute les 3 millions de salariés en « chômage partiel », nous avons bien un total de 9 millions de chômeurs en France pour 26 millions de salariés du secteur privé, puisqu’il faut bien soustraire d’un côté ce que l’on ajoute de l’autre…
Or, de l’avantage d’avoir écouté la règle de 3 à l’école, si l’on rapporte 9 millions de chômeurs, toutes catégories confondues, à 26 millions de salariés du secteur privé, on obtient alors un taux de « non-emploi » orwellien de 34 %. Si l’on ajoute aux salariés du privé les 5,7 millions de fonctionnaires, le taux de « non-emploi » chute à 28 %. Je vous ferai grâce des millions d’hommes et surtout de femmes âgés de 18 à 60 ans qui, techniquement, font partie de la population active mais qui ont, depuis longtemps, renoncé à l’idée de chercher un emploi et sont sortis des statistiques de Pôle emploi ou n’y sont jamais entrés.
Chômage : on fabrique des millions d’inutiles, sans réagir
Autrement dit, sans aucun cynisme, les différents radars ultra-sophistiqués dont disposent Macron, Castex, Borne et Le Maire, loin de permettre de distinguer clairement les différents récifs sur lesquels le France pourrait sombrer, au risque de se transformer en Titanic, dressent bien au contraire en permanence un épais rideau de fumée, masquant la réalité dramatique aux passagers du navire… et à leurs commandants, que cela arrange bien de faire sembler d’ignorer l’ampleur du problème.
Quand on entend le docteur Laurent Alexandre parler, à longueur de conférences, des « inutiles », expliquant que nous sommes en train de fabriquer des millions de gilets jaunes « que nous aurons sur le dos pour 100 ans » (sic), cela ne peut que donner envie de sauter à bord d’une des chaloupes de sauvetage pour rejoindre Robinson Crusoé. En pressant Vendredi de monter dans le bateau de secours, avant qu’il ne lui vienne à l’idée d’adhérer à Black Lives Matter et de semer la zizanie sur Spera. Et de découvrir que, donc, avec toutes les réserves d’usage sur les sondages et ce qu’ils reflètent ou non de l’opinion, un Français sur deux (faisons simple) a déclaré être prêt à voter Le Pen (Marine) au second tour de la présidentielle, dans dix-huit mois.
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