Dès 2017, il était clair, et le chef d'État-major des armées américaines Joseph Dunford le soulignait, que la zone de guerre tendait à se déplacer du Proche-Orient vers l'Afrique. C'était l'époque où se fondait "l'État islamique dans le Grand Sahara".
Nous affirmions, dans un tel contexte, que : "si l'on ne se place que du point de vue de Washington, du Département d'État et du Pentagone, cette prédiction peut sembler quelque peu contredite par la nouvelle distribution des cartes, des alliances et des hostilités régionales, entre Méditerranée et Iran.
Si au contraire, on observe, depuis Paris, les engagements militaires très concrets dans lesquels on demande, de plus en plus, à une armée de Terre limitée à 114 000 hommes, à une Marine dont le budget est rogné depuis 60 ans, etc... alors, oui, c'est bien en Afrique que se pose à l'évidence le problème.[1]"
Et nous plaidions, dès cette époque, pour un effort budgétaire accru en faveur des tâches régaliennes de l'État. Telle me semblait l'évidence sous-jacente à mon petit livre, publié en 2012, "Pour une libération fiscale".[2]
Or, la question militaire française ne se pose pas seulement en termes matériels. L'ennemi islamo-terroriste sur le terrain, et j'ajouterai : l'adversaire mondial qu'est devenue la Chine depuis l'arrivée au pouvoir de Xi Jinping, – Chine dont l'adhésion au communisme n'empêche pas ses stratèges de lire Sun Zi, – ne s'y trompent certainement pas. L'arme psychologique et culpabilisatrice a toujours été d'une efficacité redoutable.
Observez par exemple l'Allemagne. Son énorme puissance économique pourrait lui permettre de financer matériellement une force militaire considérable. Et, déjà il y a 40 ans une Simone Veil, qui fut présidente du Parlement européen appelait publiquement au renforcement de la Bundeswehr. Hélas, pour entraver un tel scénario, il existe outre-Rhin une prévention antimilitariste dont personne, surtout pas Mme Veil, ne saurait ignorer les raisons historiques. La rééducation a si bien marché chez nos cousins germains qu'une politicienne comme Angela Merkel s'emploie sans relâche à étendre sa propre conception de la "soft power", liée à ce qu'on a pu appeler aussi une "soft idéologie", à l'Europe entière.
Ne croyez pas non plus que les pages en langue française de l'Agence turque Anadolu, toujours très accusatrices à l'encontre de notre pays, soient vraiment destinées au public de l'Hexagone, – contrairement à ce que suggérait récemment notre président nombriliste. Quand les islamistes turcs ou les communistes chinois utilisent la langue française c'est pour s'adresser, contre nous, aux Africains francophones.
L'ennemi par conséquent fait tout et fera toujours pour démoraliser, dénigrer et désorganiser l'effort militaire français.
Le mot d'ordre est donc haro sur la France et son armée...
Nous assistons en ce moment, de façon très logique, à une offensive de grande envergure pour délégitimer l'action de la France. À noter que cela intervient au moment où un nombre significatif de pays européens commencent à s'impliquer en Afrique aux côtés de nos soldats engagés dans Barkhane et dans la force Takuba. Ce n'est pas pour rien qu'on voit se dessiner, simultanément, cette opération d'intoxication systématique de l'opinion, aussi bien autour de la mémoire de la guerre d'Algérie, des événements obscurs du Rwanda et des prétendues bavures des bombardements au Mali.
Le rapport Stora et les déclarations réitérées de repentance officielle vont évidemment dans ce sens.
À relever aussi les prises de position pernicieuses de journalistes et/ou de politiciens irresponsables en faveur du retrait des forces françaises dans le Mali et le reste du Sahel.
D'autres y répondent en détail, et point par point, sans doute beaucoup mieux que ne peut le faire l'espace de cette chronique. Un spécialiste de l'Afrique comme Bernard Lugan, un journaliste historien comme Jean Sévillia, une équipe rédactionnelle comme celle de Valeurs actuelles, un quotidien comme Présent, l'ASAF, association de soutien à l'armée française, ou même, et sur ce terrain il faut lui rendre hommage, Mme Parly ministre des Armées elle-même, s'y emploient, parmi beaucoup d'autres, qu'on m'excusera de ne pas citer mais auxquels j'envoie, de ma modeste place, mon salut fraternel. Il faut les lire et les soutenir.[3]
JG Malliarakis
Apostilles
[1] cf. L'Insolent du 19 juillet 2017 "Loin de chez nous en Afrique"
[2] cf. "Pour une libération fiscale" à commander sur le site des Éditions du Trident
[3] cf. Site de Bernard Lugan, Jean Sévillia a publié notamment Les Vérités cachées de la Guerre d'Algérie ed. Fayard 2018, Valeurs actuelles a publié un hors-série n°21 sur la Guerre d'Algérie, site de Présent, ASAF, association de soutien à l'armée française.