Frédéric Sirgant Boulevard Voltaire cliquez ici
La question de la candidature d’Éric Zemmour qui agitait la droite, il y a quelques semaines, semblait oubliée depuis que les sondages ne cessent de présenter Marine Le Pen comme l’indépassable horizon de la droite pour 2022. Même la fondation Jean-Jaurès l’affirme : elle pourrait être élue si, et si, et si.
Mais ne voilà-t-il pas qu’Éric Zemmour vient d’envoyer, coup sur coup, deux signes que ses partisans interpréteront comme des cartes postales en vue d’une éventuelle candidature.
D’abord, lui qui se cantonnait à sa chaire de CNews et qui était assez distant des réseaux sociaux vient d’ouvrir plusieurs comptes à son nom. Selon Valeurs actuelles, « Éric Zemmour débarque et cartonne sur les réseaux sociaux. Pour attirer la jeunesse, l’éditorialiste vient de se lancer sur différentes plateformes. » Les RS en question ? Instagram, Facebook, TikTok ainsi qu’une chaîne Telegram qui « sont venus accompagner le compte Twitter de l’éditorialiste, déjà suivi par plus de 127.000 personnes ». Et ce nouveau pas vers un élargissement de son audience médiatique et populaire s’est accompagné du dévoilement d’une « signature » : il se met à « signer ses tweets avec les initiales “E.Z.”, comme au début du mois d’avril, quand il souhaite une joyeuse fête de Pâques à ses followers ». EZ versus EM ?
Mais il y a un autre signe plus fort, car plus profond et plus personnel. Dans sa dernière chronique du FigaroVox, publiée mercredi soir, il conclut sa recension du livre de Christophe Dickès sur Bainville par le testament angoissé du vieil historien se reprochant de n’avoir pas assez agi alors qu’il avait tout prédit sur les périls des années 30. Une sorte de miroir tendu à Éric Zemmour un siècle après et une chronique en forme d’introspection :
« Son fils, Hervé, a raconté à Christophe Dickès le désespoir de ses dernières années : “Tout ce que j’ai fait est stérile…” Il regrette de ne pas avoir participé à la vie politique de manière plus active. De ne pas avoir abandonné son métier de journaliste. Il rumine sans apitoiement sur soi : “Pourquoi si bien prévoir et pouvoir si médiocrement ? J’ai toujours eu le tort de ne pas viser assez haut. Excès de fausse modestie, fausse fierté ! Méfiance exagérée de soi même, sentiment d’impuissance”. »
C’est tout son dilemme qu’Éric Zemmour décrit ici. Le parallèle n’a rien d’excessif et il est, somme toute, assez juste. Il relevait aussi, dans sa chronique, cette sentence de Bainville sur la politique française des années 30 : « Ce qui est dangereux et haïssable, c’est le simulacre de l’action. » Là encore, nos dirigeants dépassés ressemblent à ceux de la IIIe République finissante.
Au moment où un Président lance avec légèreté et en anglais qu’il faut « déconstruire notre Histoire » et reste en même temps sans réponse devant une femme voilée s’inquiétant que son enfant ne connaisse pas le prénom Pierre, comment Éric Zemmour, qui a parfaitement diagnostiqué le mal français depuis vingt ans, et précisément sur cette question des prénoms et de l’assimilation, ne ressentirait-il pas le puissant appel de l’action ?
Alors, le prochain débat d’Éric Zemmour ? Face à Emmanuel Macron ? Mais pas sur CNews. Et en mai 2022.