Il y a presque dix ans, la plupart des médias français, Le Monde en tête, inventaient pour les besoins de leur cause de thuriféraires de leur ami Stéphane Hessel, un pseudo-mouvement des « Indignés » (qu’ils avaient même baptisés carrément » Indignados « , histoire de faire davantage couleur locale !) censé avoir mis le pied à l’étrier du parti de la gauche radicale, Podemos.
L’affaire est d’autant plus cocasse que le terme « Indignados » n’a pas en Espagne le sens que Stéphane Hessel donnait à son ouvrage de 2010. Il y a en effet dans ce mot une connotation confusément péjorative qui le rapproche de « Indigno » et donc de l’expression chère à François Hollande des « Sans-dents « !
Il s’agissait, à l’époque, d’un mouvement né sur une plateforme numérique appelée « Une vraie démocratie maintenant », sans leader politique ou syndical, qui appelait à des rassemblements dans une cinquantaine de villes d’Espagne en pleine crise économique. La nouveauté de ce mouvement résidait dans le fait qu’il s’érigeait contre le système en général et non pas contre une réforme en particulier. A Madrid, certains tentaient de camper en plein centre de la capitale espagnole, où ils espèraient pouvoir rester jusqu’aux élections municipales et régionales du 22 mai 2011. Le porte-parole du mouvement, Jon Aguirre Such, évoquait alors ce sentiment qui suggèrera le nom de cette foule à la presse française * : « Nous canalisons l’indignation », précisait-il.
Mais, en réalité, les Espagnols eux-mêmes ne l’appelèrent jamais que « Movimiento 15-M « , rappelant qu’il est né tout simplement le 15 mai 2011. Il a fait depuis quelques petits dont le plus connu est le mouvement Podemos (Nous pouvons) qui exprime les idées de la gauche radicale, à la façon de Syriza en Grèce ou du Parti de gauche en France (Lire : » Espagne : les médias nous bourrent le mou » : https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2015/02/21/bulletin-climatique-du-week-end-2122-fevrier-2015de-la-republique-francaise/).
Dans Le Monde du 20 mai 2011 pourtant, l’imposture s’affichait en pleine page : « Los indignados (les indignés), des milliers de jeunes Espagnols, se sont rassemblés pour la cinquième journée consécutive dans plusieurs villes du pays. » Et, quatre jours plus tard, l’éditorial du quotidien officiel de la République était consacré à « la leçon de “los indignados” ! Avec des accents quasiment lyriques : « il faut écouter les revendications des “indignados” – “les indignés”, par référence au livre de Stéphane Hessel, publié en mars en Espagne et dont des centaines de milliers d’exemplaires ont été vendus. Elles sont avant tout politiques et, à ce titre, pourraient trouver un écho dans d’autres pays européens. » Comme toutes les illusions de gauche, celle-ci ne manqua pas de faire
Jusqu’à l’irruption dans l’arène politique espagnole, en décembre 2014 et sur les conseils de la politologue belge Chantal Mouffe (https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2019/01/30/legerie-de-la-gauche-radicale-espagnole-est-au-desespoir/), du parti de gauche radicale Podemos (Nous pouvons), dirigé par le désormais fameux mais fugitif Pablo Iglesias… jusqu’en mai 2021 où celui-ci a abandonné toutes ses fonctions (chef du parti et ministre du gouvernement socialo-communiste de Pedro Sanchez) et s’est retiré de la vie politique après son cuisant échec aux élections régionales, à Madrid, face à la droite (https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2021/05/06/aux-elections-regionales-de-madrid-la-droite-ecrase-la-coalition-socialo-communiste/).
Un revers qui fut pourtant envisagé dès novembre 2019 par l’un des soutiens de Podemos, le chef du service politique du Monde, Alain Salles (https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/11/14/l-europe-est-elle-entree-dans-une-sorte-de-ive-republique-continentale-ou-les-gouvernements-stables-deviennent-des-exceptions_6019069_3232.html) : « Les élections du 10 novembre [2019] sonnent le glas de ce renouveau politique espagnol. La sensation a été créée par le succès du parti d’extrême droite, Vox, devenu en moins d’un an la troisième force du pays, alors qu’on croyait l’Espagne immunisée par quarante ans de franquisme. » Et, comme vous le savez, cette évolution dextrogyre de l’Espagne est encore bien plus marquée aujourd’hui !
En résumé, une « INDIGNOMANIA » à l’image de leur « OBAMANIA » et qui n’a pas mené bien loin.
Le 16 mai 2021.
Pour le CER, Jean-Yves Pons, CJA.
(*) Voici ce que l’on pouvait lire dans nos médias après lesdites élections :L’Obs
Le mouvement des « indignés » réalise une forte poussée lors des élections municipales et régionales
Libération
En Espagne, les «indignés» aux portes de Madrid et Barcelone
Francetv info
Espagne : où vont s’arrêter les «Indignés» de Podemos ?
France Info
Municipales en Espagne: l’esprit des « indignés » fait trembler le pouvoir
Politis
Opportunité historique pour les « Indignés » à Barcelone
BFMTV.COM
Manuela Carmena, juge « indignée« , pourrait être la prochaine maire de Madrid
euronews
Ada Colau, une “indignée” qui pourrait diriger Barcelone
20 Minutes
Espagne: Carton jaune à la droite et percée des «indignés»
Le Monde
Elections en Espagne : forte percée des « indignés »
Le Figaro
La percée des « Indignés » et l’émergence d’un débat sur la sortie de l’euro
Citizenside
Madrid : Une coalition d’Indignés en passe de remporter la mairie
Le Vif
Les « indignés« , aux portes du pouvoir à Barcelone
Le Figaro, encore
À Madrid et à Barcelone, deux « indignées » bousculent la donne
Etc, etc. Car nous pourrions encore en ajouter tant ces perroquets se contentaient de répéter à l’unisson mais aussi à l’infini les mêmes dépêches de l’AFP. Les mêmes qui rêvaient, au même moment… aux « Printemps arabes » ! C’était consternant.