La colère policière est la colère française. Elle dépasse la profession et ses syndicats. La démonstration de cette solidarité sera vraisemblablement apportée ce mercredi à partir de 13 heures, avec le « rassemblement citoyen » auquel appellent les forces de l’ordre, devant l’Assemblée nationale. J’y serai. Cette initiative a été prise après l’égorgement par un Tunisien, le 24 avril, de Stéphanie Monfermé, au cœur du commissariat de Rambouillet, puis le meurtre, par un « jeune », d’Eric Masson, le 5 mai, au cours d’un contrôle d’identité à Avignon. Mais cette colère française désigne, en creux, des coupables.
Ils ne siègent pas seulement au Palais Bourbon, là où se font les lois. Les responsables de la haine anti-flics et des guérillas urbaines incessantes sont tous ceux qui, depuis des décennies, ont laissé le pays s’affaiblir et rendre les armes face à une contre-société conquérante. Ce mercredi, les policiers demanderont davantage de sévérité contre leurs agresseurs. Ils dénonceront probablement le laxisme judiciaire et le peu d’attention portée aux victimes. Cette retenue formelle permettra à l’ensemble des partis politiques (hormis La France Insoumise) d’être présents, ainsi que le ministre de l’Intérieur lui-même, Gérald Darmanin. Mais ce bal des faux-culs ne peut faire illusion : les pyromanes sont dans ce monde politique qui maltraite la France.
En appelant les citoyens en renfort, les policiers excédés participent au réveil des consciences. Leur action s’inscrit dans la logique des derniers lanceurs d’alerte. Les militaires ont été les premiers à dénoncer le « délitement » de la nation. Le 11 mai, ce sont 93 policiers en retraite qui ont pris la relève en invitant les élus à « tout mettre en œuvre pour mettre fin à la situation gravissime que traverse la France en matière de sécurité et de tranquillité publique ». Ces anciens flics réclament à leur tour « des mesures efficaces pour reconquérir notre propre pays et rétablir l’autorité de l’Etat partout où elle est défaillante ».
Les syndicats de policiers ne disent pas autre chose. Aussi est-il indécent d’observer, par sa présence annoncée, la tentative de récupération de Darmanin. Hier, le ministre de l’Intérieur traitait de « lâches » les militaires d’active venus anonymement en soutien de leurs aînés. C’est lui qui refuse également de faire le lien entre l’immigration et l’insécurité, sans vouloir admettre que la police est vue comme une présence étrangère dans certaines cités majoritairement musulmane.
L’aveuglement dogmatique de Darmanin est plus généralement celui d’une caste qui joue aujourd’hui au pompier, tout en ayant laissé s’installer une société conflictuelle et incendiaire.
Ivan Rioufol
Texte daté du 20 mai 2021 et repris du blog d’Ivan Rioufol