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Quand Darmanin tombe amoureux des camps de réfugiés grecs

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Il y a un an, le 9 septembre 2020, le camp de Moria, qui abritait 12.700 demandeurs d’asile sur l’île de Lesbos, en Grèce, était ravagé par les flammes et totalement détruit. Dans cet incendie allumé par des migrants qui se rebellaient contre les mesures d’isolement dues à la crise sanitaire, plus de 3.000 tentes, des milliers de conteneurs, des bureaux de l’administration et une clinique installée dans le camp partaient en fumée.

Empêchés d’y entrer pour intervenir, les pompiers avaient dû faire appel aux forces de police, également dépêchées pour bloquer les centaines de migrants qui s’enfuyaient vers le port de Mytilène. Dans ce camp empli jusqu’à quatre fois sa capacité d’accueil, les émeutes et les bagarres étaient quotidiennes.

Un an plus tard, l’Europe a construit à Samos un camp modèle. Un petit bijou de sécurité qui a provoqué chez notre ministre de l’Intérieur, venu le visiter dimanche, un véritable coup de foudre. Il faut dire que Gérald Darmanin est une âme simple : des merveilles comme ça, il en voudrait partout ! Tout le tour de l’Europe, en Espagne et en Italie notamment, et puis à Malte. Et sur l’île de Ré, peut-être ? Non, ça, il ne le dit pas. La gestion de l’immigration clandestine, c’est bon chez les pouilleux du Sud.

Notez bien, on comprend qu’il soit émerveillé, notre Darmanin. Dans le camp de Lesbos, « fermé et à accès contrôlé », entouré de barbelés et de miradors, comme dans ceux que l’Europe va financer (à hauteur de de 276 millions d’euros) sur quatre autres îles de la mer Egée,  « les demandeurs d’asile ne peuvent sortir que de 8 heures à 20 heures, et sont contraints de présenter leurs empreintes digitales et un badge électronique au portail magnétique à l’entrée ».

« Ce camp impressionnant a été pensé comme un centre d’attente et permet aux Grecs de bien tenir leurs frontières », a dit le ministre à l’AFP. Et d’ajouter : « Nous demandons aux pays du sud de l’UE de faire comme les Grecs, de contrôler davantage les frontières extérieures, et aux autres pays d’accepter un système de solidarité. […] Nous aimerions que tous les pays qui sont aux frontières de l’Europe puissent avoir la même politique de contrôle et d’enregistrement des personnes qui entrent sur le territoire européen. »

C’est bien pensé. Que les autres fassent le sale boulot, qu’ils soient vigilants, comme ça, on garde les mains propres aux yeux de l’opinion. Car, on s’en doute, les ONG de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, ne portent pas le même regard sur ces camps de nouvelle génération. Le système de sécurité renforcée  « empêche d’identifier de manière efficace les personnes vulnérables » et « limite l’accès des demandeurs d’asile aux services », disent ces braves gens.

Sauf à imaginer que les services en question sont ouverts toute la nuit, on ne voit guère où est l’empêchement. Le ministre, lui, est catégorique : « De l’avis de personnes qui travaillaient dans l’ancien camp de Vathý mais aussi de demandeurs d’asile, les conditions de vie sont meilleures. »

Les ONG reprochent surtout aux Grecs de faire baisser les chiffres des arrivées par le refoulement systématique et illégal des migrants vers la Turquie, ce que nie le gouvernement grec. Côté ONU, on se veut vigilant. Ainsi, la représentante en Grèce du Haut-commissariat aux réfugiés a rappelé la doctrine : «La position du HCR est que le demandeur d’asile a besoin de protection, ce n’est pas un criminel ni quelqu’un qui représente un risque pour la communauté (sic), c’est une personne qui a besoin d’aide. Pour nous, les camps doivent être ouverts, le gouvernement nous a assuré qu’ils le seraient. » De 8 heures à 20 heures.

Marie Delarue

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