Si Mediapart se prétend un journal d’information « indépendant » sous prétexte qu’il ne vit que des abonnements de ses lecteurs, il n’en est pas moins fortement soumis à une idéologie d’extrême gauche et au préjugé, courant dans ce milieu, de détenir la vérité. Vendredi dernier, il donnait la parole, sur son blog, à un enseignant-chercheur, membre de La France insoumise, qui fustige CNews, coupable, à ses yeux, d’avoir « franchi toutes les lignes rouges ». Yvan Rioufol n’a-t-il pas, récemment, invité Renaud Camus, le père du « Grand Remplacement », qui l’a longuement évoqué, sans que son interlocuteur le recadre ?
« Vite, le Grand Remplacement ! », c’est le titre de cette tribune, illustrant le vœu mis en exergue : « Que faire face à la légitimation fulgurante d’une hantise néofasciste ? Souhaiter qu’advienne au plus tôt ce qu’ils souhaitent. » Maniant la dialectique comme savent le faire les militants d’extrême gauche, il tente de démontrer que CNews est de la même veine que Fox News aux États-Unis, prédisant que « dominée par des médias de cette sorte [la France] se crétinisera jusqu’au point de non-retour ». Voyez comme cette gauche extrême a le souci de notre santé mentale !
Il en vient à « espérer de tout [son] cœur » la venue de ce Grand Remplacement, afin de « balayer ces moisissures de l’Histoire, […] basaner les rues, insulter les mémoires, blasphémer le roman national, chanter Nique La France, appeler ses enfants Mouloud, Rachid, Mohammed et Nedjma, déferler sur CNews ». Si ce n’est pas un appel à la haine, ça y ressemble beaucoup. On pourrait penser que l’auteur s’est laissé emporter par son indignation et que ses mots dépassent sa pensée : ce serait faire injure à ces idéologues qui, à l’instar des fanatiques, ont la certitude d’avoir raison.
Il reproche aux médias de droite de dénoncer « la prétendue mainmise de la gauche sur les débat public », qui est, il va de soi, un fantasme. Manifestement, il aimerait bien pouvoir leur couper le sifflet. Cette intelligentsia, qui se croit seule capable de penser, couperait-elle aussi des têtes, si l’occasion se présentait ? Au nom de la vertu, bien sûr, et en toute bonne conscience. Car il n’est pas permis aux dissidents de la pensée unique, qui sont forcément des néofascistes, de s’exprimer. « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté » : ce principe, qui a fait beaucoup de victimes dans l’Histoire, est loin d’être révolu.
À ce dogmatisme, qui mène au sectarisme et à la tentation totalitaire, s’oppose la véritable liberté d’expression, associée à une tolérance qui ne consiste pas à accepter d’entendre seulement ceux avec qui on est d’accord, mais aussi ceux avec qui on n’est pas d’accord. C’est un des fondements de toute vraie démocratie, dans laquelle la liberté d’expression n’est pas à sens unique. C’est dans la confrontation des idées qu’on peut se forger une opinion personnelle et approcher la vérité, ce que ne pratiquent pas tous les médias.
Curieusement, dimanche 7 novembre, la tribune d’Olivier Tonneau (c’est le nom de cet enseignant-chercheur) a été retirée du blog de Mediapart. On se demande pourquoi. En tout cas, bienheureuse capture d’écran…