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La tête d'oeuf de l’Élysée victime d’un vilain coco

Qui vole un œuf, vole un bœuf, enseigne le dicton populaire; j’espère pour Emmanuel Macron qu'on ne lui jettera pas bientôt un bœuf à la tête. À ma connaissance. c'est la deuxième fois en cinq ans que Jupiteux reçoit un coco sur le coin du coco. Le premier lui avait éclaté sur la tête au salon de I'agriculture, le 1er mars 2017, lors de sa première campagne présidentielle; le deuxième lui a rebondi sur l’épaule au salon international de la restauration et de l’hôtellerie, ce 27 septembre, au début de sa deuxième campagne. La poule reste donc un animal campagnard.

Les professeurs de civisme, montant sur leurs ergots, s'indigneront vertueusement de ce nouveau crime de lèse-divinité perpétré à l'encontre du maitre de l’Élysée, comme ils l’avaient fait le 8 juin dernier, quand un preux au geste vif I'avait souffleté au cri de « Montjoye ! Saint Denis ! » Pour ma part, je ne m'étonne pas que des Français lui volent dans les plumes. Je suis beaucoup plus surpris par l’accueil aimable - qualifié de chaleureux par les médias macronisés - que lui ont réservé certains professionnels de la restauration, qui lui savent gré, parait-il, des aides de l’État pendant la crise et de la défiscalisation des pourboire payés par carte bancaire une mesure démagogique décidée à huit mois des élections. J'aurais plutôt cru qu'il serait accueilli par des huées de la part des restaurateurs que ses oukases empêchent, depuis un an et demi, d'exercer leur métier normalement; qui ont dû fermer leurs établissements pendant les confinements; qui, aujourd'hui, subissent des contrôles de police qui vérifient les « qr codes » et les identités de leurs employés et de leurs clients; et qui sont eux-mêmes contraints de participer au flicage des consommateurs... J'aurais imaginé qu'Emmanuel Macron serait raccompagné à sa voiture sous des jets non seulement d’œufs, mais de tomates, de choux, de carottes et de navets, et que sa visite s’achèverait en macédoine. Mais les chefs aux toques blanches, les premiers ouvriers de France aux cols tricolores, ont fait bonne à mine celui qui les a obligés à mettre leur vocation entre parenthèses, parce qu'il a eu la bonté de les en dédommager. Moralité : dans notre beau pays, tout le monde s'achète, même crédit - car les aides ne dureront qu'un temps et pour les restaurateurs, I'addition risque finalement d’être salée.

Les poulets ont rapidement mis la patte sur le lanceur d'oeuf, un vilain coco de dix-neuf ans a peine, auquel son geste pourrait couter cher. Car le président, qui proclame volontiers le droit au blasphème lorsqu'il s’agit de caricaturer de manière indécente, non seulement Mahomet, mais aussi Jésus, n'admet pas que I'on blasphème contre sa propre personne. Jupiteux est au-dessus des Cieux et I'offense qui lui est faite n'appelle aucune miséricorde. Un ancien publicitaire varois, Michel-Ange Flori, vient de faire les frais, au sens le plus dispendieux de l’expression, du crime de lèse-majesté républicaine. Plaider le « droit à l'humour » ne lui a pas évité les foudres jupitériennes de la justice. Il a été condamné à 10 000 euros d'amende pour avoir publié, à La-Seyne-sur-Mer et à Toulon, deux affiches représentant Macron déguisé en Hitler ou en maréchal Pétain (qui n’avait pas mérité ça). Voila des années que la reductio ad Hitlerum sert à discréditer tout un chacun et Macron lui-même ne se prive pas d'y recourir pour discréditer les nationalistes; mais il n'est pas permis de le lui appliquer. Michel-Ange aurait mieux fait de repeindre la girafe ou le plafond de la chapelle Sixtine.

Le crack des cracks et les toxicos

Il y a ceux qui ne sont rien, comme dit Emmanuel Macron, et puis les moins que rien. À priori, les habitants de Pantin, en Seine-Saint-Denis, sont à ranger dans la deuxième catégorie. Une centaine de toxicomanes, consommateurs de crack et pour la plupart immigrés, squattaient le quartier de Stalingrad, dans le nord de Paris. Ils en ont été délogés et transférés hors de la capitale, dans le quartier des Quatre-Chemins, un endroit déjà passablement sinistré situé entre Aubervilliers et Pantin. Je comprends l’enjeu de cette exfiltration : mieux vaut expédier les toxicos là où il n'y a rien, comme dit Darmanin, et préserver Paris, qui souffre déjà de la multiplication des rats, des pigeons, des militants elgébétés, des bobos écolos de la mairie et de la politique d'Hidalgo. On déplace ainsi le problème, sans chercher à le régler. Les élus locaux n'ont, bien str, pas été prévenus. Pour empêcher le retour des crackeux, les autorités ont même fait murer un tunnel sous le périphérique, ce qui achève d'encager le quartier puni. Ce « mur de la honte », contre lequel les moins-que-rien habitant ces parages ont vainement protesté, illustre une nouvelle fois l’ « en même temps » macronien : tandis que Jupiteux se félicite de laisser les frontières nationales grand ouvertes et considère l’immigration comme une chance pour la France, il construit des murs entre Paris et sa banlieue immédiate. Tout est normal, dormez braves gens, Darmanin et Macron veillent sur vous.

Les Cracks des cracks, assurément.

François Couteil Monde&Vie 8 octobre 2021 n° 1003

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