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Emmanuel Macron en tournée électorale dans les pays du golfe Persique

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En février 1991, Michel Jobert, ancien ministre des Affaires étrangères de Georges Pompidou, lançait : « Que reste-t-il de la politique arabe de la France ? Barbès-Rochechouart ! » Trente ans après, outre Barbès-Rochechouart, il nous reste… les ventes d’armes.

Ainsi, Emmanuel Macron, en visite chez nos « alliés » du golfe Persique, Qatar, Émirats arabes unis et Arabie saoudite, vient-il de brandir, à Abou Dabi, un contrat de 16 milliards d’euros portant sur la vente de 80 avions  et de 12 hélicoptères Caracal. Bref, c’est  avant l’heure pour les derniers fleurons de l’industrie française. Manœuvre préélectorale ? Évidemment que non, même si une telle annonce tombe à point nommé en période… préélectorale. Macron n’est pas officiellement en campagne présidentielle mais un peu tout de même.

À cette  arabe, aujourd’hui réduite à jouer les VRP, s’en oppose une autre : celle de ces apôtres des droits de l’homme affirmant que c’est très vilain de vendre des armes à des pays ne respectant pas lesdits droits de l’homme. Dassault, à les en croire, devrait-il se changer en Interflora™ ? Tout de même pas, mais pas loin. À ce titre, et après l’injection rituelle de moraline, Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, interrogée par Le Monde de ce 3 décembre, sur la question d’une « Arabie saoudite jouant un rôle trop important au Moyen-Orient pour qu’on l’ignore », a cette réponse sibylline : « On doit s’interroger sur ces soi-disant intérêts stratégiques. Qui les définit ? »

À l’époque du général de Gaulle, ces « intérêts stratégiques » étaient indexés sur ceux de la France et non point ceux de ces ONG, dont on ne sait d’ailleurs jamais vraiment quels États tiers les commanditent en coulisses. Le Quai d’Orsay jouait alors un rôle pivot, mettant par exemple Israéliens et Palestiniens sur un pied d’égalité. Cela valut pour François Mitterrand, premier Président français à effectuer un voyage officiel en Israël, mais en y réclamant la création d’un État palestinien. Un tel statu quo était encore à peu près de mise durant les deux mandats chiraquiens. C’est évidemment avec Nicolas Sarkozy que tout commence à changer.

Mises à l’écart et départs à la retraite aidant, notre  et nos services de renseignement se sont peu à peu trouvés envahis d’éléments fort sensibles aux néoconservateurs américains et de défenseurs inconditionnels de l’État hébreu, seul pays au monde où une extrême  au pouvoir ne suscite pas d’émois chez les vigies humanistes. Du coup, que reste-t-il de notre politique étrangère en cette région du monde ? Quelques miettes dans le marché des armes, que les Américains veulent bien nous abandonner – pour se faire pardonner les pressions ayant obligé les Australiens à ne pas acheter nos sous-marins ? –, et un alignement quasi-pavlovien sur l’axe liant Washington et Tel Aviv de manière plus ou moins informelle.

Le Quai d’Orsay, après avoir tenté de ne pas trop couper les ponts avec l’Iran, jadis partenaire privilégié en cette partie du monde, suit désormais en tous points cette stratégie israélo-américaine d’encerclement de Téhéran, menée conjointement par l’Arabie saoudite et Israël ; politique de gribouille, dira-t-on, car elle ne fait qu’attiser les tensions internationales sur fond de fantomatique menace  iranienne.

Qu’Emmanuel Macron soit reçu en grande pompe par ces pays n’est pas une erreur en soi ; mais sa démarche aurait eu plus de poids s’il en avait profité pour se rendre chez le puissant voisin perse. Il aurait même pu y parler droits de l’homme, sachant que mieux vaut être femme à Téhéran qu’à Riyad. Et même de ces terroristes de Daech, discrètement armés et financés par les potentats wahhabites, mais militairement défaits par les soldats iraniens en Syrie.

Mais pour cela, un carnet de commandes, et encore moins un prêche droit-de-l’hommiste façon Miss France, ne sauraient remplacer un bréviaire politique.

Nicolas Gauthier

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