Le socle électoral d’Emmanuel Macron commence-t-il à se fendiller ? A moins de 90 jours du premier tour de l’élection présidentielle, un sondage et deux mauvaises nouvelles fragilisent la course à l'Elysée du président de la République. Réalisée par l’Ifop du 14 au 20 janvier sur un échantillon de 2.000 personnes, cette étude d’opinion publiée par le Journal du dimanche (JDD) du 23 janvier estime à 37 % des Français ceux qui sont satisfaits de l’action du président de la République. Ils étaient 41 % voilà un mois. Il s’agit de la baisse la plus importante pour Emmanuel Macron dans ce baromètre depuis mars 2021, soit depuis dix mois, souligne le JDD.
Qui fait défection ? D’abord, les ouvriers en baisse de 11 points parmi les soutiens du Président, puis les plus jeunes électeurs, âgés de 18 à 24 ans, qui chutent, eux, de 7 points. Une nouvelle préoccupante pour « le président pas encore candidat » car le poids des ouvriers reste important dans le corps électoral français. Ils représentent aujourd’hui un emploi sur cinq. Et le Président sait bien que cette population se tourne volontiers vers Marine Le Pen, aujourd’hui au coude à coude avec Valérie Pécresse pour l’accès au second tour.
Quant aux jeunes, leur fuite a elle aussi de quoi inquiéter le président jeuniste, parce qu’ils sont considérés comme des prescripteurs de tendance pour l’ensemble de la société et parce qu'Emmanuel Macron n’a pas ménagé ses efforts pour les séduire. Il avait été jusqu’à exhiber le portrait des jeunes youtubers McFly et Carlito le 2 septembre 2021 dans une allocution présidentielle, trois mois après leur avoir fait la promesse de ce coup de publicité malvenu lors d’un concours d’anecdotes... Prestige présidentiel, qu'a-t-il fait de toi ? Mais on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ni les jeunes avec des offensives démagogiques épaisses. Cet électorat, particulièrement volatil, a peut-être été séduit un temps par Macron : il est apparemment tenté d’aller voir ailleurs, fragilisant un pilier du vote Macron. En octobre, un sondage Ifop donnait au président 22 % des intentions de vote parmi les 18-25 ans, devant Marine Le Pen (19 %) et le candidat vert (14 %). Zemmour, Mélenchon et Bertrand (le candidat sondé à l’époque) arrivaient ensuite ex-aequo avec 9 %. Cette catégorie pèse donc lourd parmi la population qui s’apprête à voter Macron : la fissure n'a rien de rassurant pour le Président.
Par ailleurs, la statue du commandeur de la France covidée vient de prendre de plein fouet deux mauvaises nouvelles, non encore intégrées dans les sondages. Première mauvaise nouvelle, les chiffres catastrophiques de l’immigration dévoilés la semaine dernière. Le Président n’a montré aucun intérêt pour cet enjeu majeur qui représente pourtant la deuxième préoccupation des Français après le pouvoir d’achat. Les visas de long séjour explosent (+54 %), en tête, le Maroc, l’Algérie, l’Arabie saoudite et la Tunisie. Les expulsions s'effondrent. La fin de l’islamisation de la France n’est pas pour demain. Ce très mauvais résultat n’échappera pas aux oppositions de droite qui attaqueront le candidat Macron sur cet aspect ultra-sensible de son bilan. Enfin, le bilan sécuritaire de Macron est lui aussi désastreux. Plus de deux Français sur trois (69 %, selon le JDD) le jugent négatif. « Le régalien n'est pas un atout pour lui, ce qui est rare pour un président sortant », constate Frédéric Dabi, directeur général de l'Ifop dans le JDD. « C'est son vrai point faible, et c'est là-dessus que la droite l'attaque. »
Les prochains jours diront si cette série inédite de mauvaises nouvelles sur des sujets sensibles érode ou non les intentions de vote en faveur de Macron. Et si sa stratégie du tout-Covid trouve sa limite.
Marc Baudriller