Sacha est né Anna. Il était femme mais s’est vite ressenti « garçon manqué », confie-t-elle. Nous sommes en 2016. En regardant des vidéos sur YouTube, elle entend parler pour la première fois de transidentité. « Je me suis dit : Ça ressemble à toi. » Au début de la 3 e, à 14 ans, elle coupe ses cheveux et demande à ses amis de l’appeler avec un prénom masculin. Un soir, elle annonce à ses parents qu’elle veut prendre des hormones masculines. Ses parents l’écoutent, bienveillants.
« Sauf que j’avais 14 ans et écouter à ce point ce que dit quelqu’un de 14 ans, ça pose problème ».
Puis tout va très vite : le psychiatre qu’elle va consulter, les séances « expéditives » de cinq à dix minutes qui ne servent qu’à confirmer son choix.
« À aucun moment les raisons profondes qui me poussaient à changer de sexe n’ont été abordées. »
À la fin de la seconde débutent les premières injections de testostérone, une ampoule toutes les trois semaines. Tous les matins, elle enfile un binder (sous-vêtement compressif permettant d’aplatir la poitrine). À l’état civil, pour le lycée, ses proches, sa famille, Anna devient Sacha. L’été avant la terminale, elle se fait retirer les seins sous anesthésie générale. Après l’opération, âgée de 16 ans, elle porte un corset postopératoire, prend des comprimés antidouleur et, soudain, des questions l’assaillent.
« Il y avait comme une voix bizarre en moi. Un truc qui me demandait : Est-ce que tu détruis ta vie ? Est-ce que tu détruis ton corps ? »
Un jour, en 2020, les doutes remontent d’un coup. Pendant deux ou trois mois, elle pleure nuit et jour.
« Je pleurais le matin dans le RER, mais aussi pendant les cours, le soir aussi. Je m’enfonçais dans un truc affreux. Je me disais que je ne pourrais jamais revenir en arrière. »
Pétri de regrets, hanté par les pensées suicidaires, elle arrête les injections de testostérone, s’enfonce dans la dépression. Ses parents, inquiets, l’emmènent voir une autre psychiatre. Elle lui sauvera la vie.
« J’ai décidé d’être une fille biologique qui a un style masculin. J’ai envie de m’aimer moi-même. J’ai des regrets, mais je peux vivre avec ».
Anna a compris qu’elle nourrissait, adolescente, une forme de « misogynie intériorisée » et que « la puberté, ce n’est pas la période idéale pour faire de tels choix ». Mois après mois, elle récupère sa féminité. Ses règles sont revenues. Elle a retrouvé ses longs cheveux, mais il ne retrouvera jamais sa voix de femme.
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