Pour la Russie, la contre-offensive la plus dangereuse se situe sur le front de Zaporijia. Si elle réussit, l’armée ukrainienne pourrait atteindre Melitopol ou Berdiansk, coupant ainsi la liaison terrestre entre la Crimée et le Donbass. En raison de la pression russe sur le front de Bakhmout, l’armée ukrainienne a été contrainte d’y déplacer d’importantes unités blindées et d’artillerie depuis d’autres régions. En témoigne également le fait qu’il n’y a pas eu récemment de tirs d’artillerie ukrainiens sur la centrale nucléaire d’Energodar, près de Zaporijia.
L’armée russe a donc décidé de profiter de ce contexte favorable pour lancer une offensive sur le front de Zaporijia, afin que d’ici le printemps, les troupes ukrainiennes soient chassées de leurs fortifications actuelles et poussées vers le nord. Sur ce segment du front, l’armée ukrainienne dispose de 5 brigades, dont une seule est mécanisée, les autres étant de l’infanterie territoriale composée de réservistes. L’artillerie lourde ukrainienne brille par son absence (carte 1).
L’armée russe a réussi à percer la première ligne de défense sur l’ensemble du front, avançant d’environ 10 km vers le nord. La défense en profondeur a été mise en place pour protéger les deux principales voies de communication de l’armée ukrainienne. Les fortifications se trouvent autour de la ville d’Orikhiv, qui est approvisionnée par voie ferroviaire et routière depuis Zaporijia, et autour du village de Houliaïpole, relié au front du Donbass par voie routière et ferroviaire. Cependant, c’est la route entre Orikhiv et Houliaïpole que les Russes visent dans la première phase de l’offensive (carte 2).
La mission immédiate du groupe de forces russes est de bloquer les fortifications d’Orikhiv et de Houliaïpole et de les isoler complètement, puis d’intercepter les voies de communication partant des deux villes afin d’avancer vers le nord en direction de Zaporijia (carte 3).
Une fois que les Russes seront au nord de Houliaïpole, ils pourront rejoindre les troupes au sud de Grand Novosilka, en encerclant les troupes dans les solides fortifications qui s’y trouvent. Si les Ukrainiens n’interviennent pas à temps, en ramenant les blindés et l’artillerie déplacés à Bakhmout, un énorme espace de manœuvre s’ouvre pour les Russes au nord de Zaporijia, qui sera utilisé par leurs nombreuses unités blindées (carte 4).