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Campagne de Macron : perquisitions chez d’anciens cadres de McKinsey

En novembre dernier, il fanfaronnait comme à son habitude : « Je ne crains rien et […] je crois que le cœur de l'enquête n'est pas votre serviteur », avait déclaré le président de la République aux journalistes. La veille, le parquet national financier (PNF) avait publié un communiqué confirmant l’ouverture de deux informations judiciaires pour tenue non conforme de comptes de campagne et pour favoritisme et recel de favoritisme. Des investigations destinées à éclairer le rôle joué par le cabinet de conseil américain  dans les campagnes électorales d'Emmanuel Macron en 2017 et 2022.

Après des perquisitions menées en décembre dernier au siège français de  et dans les locaux de Renaissance, quatre dirigeants et anciens cadres du cabinet auraient eu droit, fin janvier, à la visite des gendarmes de la section de recherches de Paris, d’après des informations du Parisien.

Parmi eux, Karim Tadjeddine, ancien directeur associé de , et Mathieu Maucort, ancien consultant du cabinet, ex-responsable argumentaire de la campagne d'Emmanuel Macron en 2017 et, désormais, délégué interministériel à la Jeunesse auprès du Premier ministre, révèle le site américain Politico.

En février 2021, Le Monde avait publié une enquête à charge sur les liens entre Emmanuel Macron et le cabinet McKinsey. Les fameux « MacronLeaks », mis en ligne en 2017, avaient permis d’identifier pas moins d’une « vingtaine de salariés du cabinet très actifs » au sein de son équipe de campagne. Après sa victoire, plusieurs de ces consultants s’étaient retrouvés à des postes clés au sein de la  ou dans des cabinets ministériels. Mathieu Maucort était, ainsi, devenu directeur de cabinet adjoint de Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État au Numérique.

Les journalistes du Monde n’avaient alors trouvé aucune trace du cabinet  dans les factures déposées à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Interrogée, la direction de la communication de La République en marche avait juré ne jamais avoir fait appel à des cabinets de conseil : « Ni pour des missions facturées, car nous n’en avons pas les moyens, ni pour des missions pro bono, car ce serait considéré comme un don d’une personne morale à un parti politique et c’est interdit par la loi. »

À la même époque, Politico avait aussi enquêté et noté qu’après l’arrivée de Macron à l’Élysée en 2017, le recours par l’État aux cabinets de conseil s’était intensifié.  s’était notamment « taillé la part du lion » dans une série de contrats signés par le ministère de la Santé pour l’assister dans l’élaboration et la conduite de son plan de vaccination lié au Covid.

Un fonctionnaire ayant travaillé avec des cabinets de conseil pendant plusieurs années, sous Hollande et Macron, avait décrit à Politico la proximité qu’il avait constatée entre les consultants et les jeunes loups de la  qui naviguaient entre la sphère publique et la sphère privée : « Ce sont les mêmes personnes, celles qui ont de l’argent et la parole facile. Ce sont tous des beautiful people, d’un narcissisme et d’une confiance en eux effrayants… Et ils viennent tous des mêmes écoles. »

Un an plus tard, en mars 2022, un rapport du Sénat consacré à « l'influence croissante des cabinets de conseil sur les politiques publiques » renforçait les soupçons de conflits d’intérêts et de renvois d’ascenseurs. Interrogé par les sénateurs sur la participation de salariés de  à la campagne électorale d’En marche !, Karim Tadjeddine, qui était alors directeur associé du cabinet américain, avait répondu : « Nos statuts nous interdisent de travailler, à titre payant ou pro bono, pour des organisations ou des personnalités politiques. Nous ne le ferons jamais. » Tadjeddine se gardait bien d’évoquer ses liens personnels avec Emmanuel Macron, qu’il avait rencontré en 2007 à la commission Attali, et le rôle qu’il avait joué dans sa campagne électorale lorsqu’il l’aidait à élaborer le volet économique de son programme.

Il faut reconnaître qu’en 2016, la situation n’était pas évidente pour Macron, jeune ministre de l’Économie sans parti politique ni moyens financiers. Il fallait bien trouver des appuis quelque part. Il avait heureusement réussi à se constituer un sérieux réseau dans le monde des affaires et des médias. Et tout au long de son ascension, il avait su montrer à ses nouveaux amis sa capacité à prendre en compte leurs intérêts. Les soutiens n’avaient donc pas tardé pour l’aider à bâtir une campagne disruptive.

À cette époque, avec Karim Tadjeddine, Macron avait participé à un ouvrage collectif, L’État en mode start-up. Il fallait que l’État se réforme et montre l’exemple, écrivait le candidat en marche, qui indiquait la direction à suivre : « Éclairer en continu nos façons d’agir à la lumière d’une boussole : l’intérêt général. » Sept ans plus tard, alors que les gendarmes viennent de perquisitionner le domicile de Tadjeddine et celui de ses anciens collègues de chez McKinsey, on mesure le chemin parcouru… en sens inverse !

Frédéric Lassez

https://www.bvoltaire.fr/campagne-de-macron-perquisitions-chez-danciens-cadres-de-mckinsey/

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