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Intervention télévisée de Macron : la complainte du pompier pyromane

Coucou, c’est lui ! Invisible depuis des semaines, le président de la République est enfin sorti du silence, ce 22 mars, répondant durant une demi-heure, sur TF1France 2 et LCI, aux questions des journalistes Julian Bugier et Marie-Sophie Lacarrau. Mais avait-il le choix ? Car c’est tout un pays qui gronde et se fatigue des subtilités politiques épaisses comme un câble de hauban d’Emmanuel Macron. Les manifestants et les Français ont bien compris qu’il se réfugiait depuis des semaines sur l’Aventin, « qu’il se préservait », comme disent les communicants, laissant son Premier ministre prendre les coups. À la manière du roi Dagobert de la chanson à qui le bon saint Éloi conseille de se mettre à l’abri durant la bataille : « Votre Majesté se fera tuer ! », prévient le saint homme. « C’est vrai, lui dit le roi, mets-toi bien vite devant moi ! »

Les flèches ont fini par transpercer le bon saint Éloi-Borne pour atteindre le monarque républicain. Après des mois de manifestations, de chaos, d’agressions des gendarmes par l’extrême gauche, de bruit et de fureur, Macron se veut plus jupitérien que jamais. « Ce texte va poursuivre son chemin démocratique », lance-t-il dès le début de son intervention. Circulez, il n’y a rien à voir : que de bons mots et de vagues promesses. Surtout ne pas laisser apparaître que le roi est nu. Il rappelle le parcours de la réforme dans les chambres, l’échec de la  : la balle est aujourd’hui dans le camp du Conseil constitutionnel.

Le Président colle la scoumoune du méchant à l'opposition : Macron juge « inacceptables » les agressions des parlementaires qui se multiplient actuellement. Et rappelle l’épisode de l’invasion du Capitole aux États-Unis par les partisans de Trump. Il a mûri son mot : « On ne peut accepter ni les factieux ni les factions. » Toujours fasciser ou « trumpiser » l’adversaire. La vieille méthode a fait ses preuves. Il n’y a guère de factieux, sauf à l’extrême gauche : il aurait pu la désigner. Quant aux factions ? Le mot a pour seul objectif de mettre en perspective la sagesse du maître. On se pince. Le plus grand pourfendeur de patriotes du royaume se drape soudain dans les plis du drapeau. Le sacrifice pour la France, c’est lui ! « Est-ce que ça me fait plaisir ?, lance-t-il. Non. J’aurais pu mettre la poussière sous le tapis. »

Mais voilà, le démolisseur est confronté à un souci récurrent : quand les piliers sont à terre, sur quoi appuyer l’échafaudage de la sortie de crise ? Quand on a patiemment détruit l’idée de nation laissée à la méchante extrême droite, combattu la réalité d’un peuple, nié l’ampleur de l’immigration de masse et de ses effets, écarté toute vision historique et ce qui pourrait justifier le sacrifice, si petit soit-il, des Français, que reste-t-il ? Il reste ce triste constat de Macron, cette « tendance de nos démocraties à vouloir s’abstraire de la réalité ». Pas faux. La faute à qui ?

Alors, Macron tombe à plat lorsqu’il convoque les grands principes : « C’est l’intérêt supérieur de la nation », jette-t-il. Le mot sonne juste chez Zemmour, Le Pen, voire Fillon. Il sonne creux chez Macron. Idem lorsque le chef de l’État assure de son désintéressement : « Je ne cherche pas à être réélu, je cherche l’intérêt du pays, quitte à assumer l’impopularité. » La posture sacrificielle de notre Président pourrait être belle si on y croyait, si on oubliait que la  est exigée par l’Europe de Bruxelles. La Commission cherche-t-elle le bien de la France ou sa ruine ? Le chef d’État qui lui est le plus soumis en Europe, Emmanuel Macron, cherche-t-il « l’intérêt supérieur de la nation » ? Tout est creux, verbeux et contradictoire, chez l'hôte de l'Élysée.

Du reste, il ne changera rien. Pas question de se séparer de son Premier ministre, au moins à ce stade, comprend-on. Mais on voit mal comment Élisabeth Borne pourrait assumer la mission de câlinothérapie que lui confie le chef de l’État. Il mesure d’ailleurs l’ampleur de cette tâche, l’impossibilité dans ce contexte de parler effort et retraites à de jeunes manifestants qui écrivent sur une pancarte : « On ne veut plus travailler du tout. » « Le rapport au travail n’est plus le même », déplore Macron. La faute à qui ? Encore un pilier écroulé, en l’occurrence par ses amis socialistes - Martine Aubry en tête. Ces socialistes qui ont porté les 35 heures, ce sont eux qui ont fait naître à la politique le jeune Macron, l’ont soutenu pour la plupart, élu, conseillé, guidé.

Borne « a toujours [s]a confiance », mais pour combien de temps ? La tâche qui lui incombe semble aussi aisée qu’une course de crêtes en claquettes caoutchouc. Elle va devoir produire « moins de textes, plus clairs et plus courts », sans oublier, au passage, d’« élargir cette majorité » - facile ! Macron, lui, se dispensera pour l’heure de tout risque : pas de changement de Premier ministre, donc pas de remaniement, pas de référendum qui a pourtant des vertus.

Le second quinquennat de Macron, devenu sourd, aveugle et paralytique, sera décidément long, très long… « Votre Majesté se fera bloquer », aurait dit le bon saint Éloi.

Marc Baudriller

https://www.bvoltaire.fr/intervention-televisee-de-macron-la-complainte-du-pompier-pyromane/

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