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La colonisation, hier et aujourd'hui

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Il y a beaucoup de livres qui paraissent pour caractériser le déclin français. Celui-là est écrit par un Marocain. C'est une défense inconditionnelle de I'histoire de France, qui, tout en regardant la situation de notre pays en face, ne cède pas à la tentation facile de la déploration et du déclinisme.

« Français, ouvrez les yeux ! » S’écrie Driss Ghali. L'homme a fait toutes ses études en France, il est diplômé de Centrale-Paris et doit donc au pays qui I'a accueilli enfant, la situation professionnelle enviable qu'il exerce aujourd'hui au Brésil. II se présente comme musulman pratiquant, il se rattache certainement à un islam pétri de christianisme, plus religieux en tout cas que sociologique, un islam vraiment universel, qui n'empêche pas un bon verre de vin. Et, quand il parle de la France, ce sujet du roi du Maroc emploie souvent, comme n'en pouvant plus, un « nous » qui montre son amour comme instinctif, et sa solidarité envers notre patrie.

La première qualité de ce livre, par rapport à tant d'autres qui s'enferment dans des chiffres, c'est la qualité de l’écriture, les images qui viennent facilement sous la plume de notre auteur et les métaphores dûment filées, qui donnent a la pensée une consistance, plus facile a mémoriser.

Son objectif n'est pas de faire peur ou de faire honte (de faire la morale en un mot) que de parler vrai. Ainsi affirme-t-il que nous ne sommes pas en danger de rater une assimilation. Elle est d'ores et déjà manquée : « Si l’on suit les estimations des consulats étrangers concernés, il y aurait 300 000 Sénégalais en France, plus de 700 000 Turcs, un million de Marocains au moins, 2,6 à 4 millions (sic) d'Algériens, etc. Ce ne sont plus des diasporas, mais des peuples en formation ». Nous sommes d'ores et déjà devant un phénomène qui n'a rien de climatique, mais ce substantif permet de nommer une des grandes convulsions de l’histoire, celle qui caractérise notre époque, ce que Driss Ghali appelle la « tropicalisation du monde » (mot qu'il emprunte à Xavier-Ricard Lanata, ethnologue et haut fonctionnaire français, mais qu'il définit à sa manière : « Une abdication heureuse et une décivilisation festive.

La basse-cour...

On sait que M. Macron tout récemment, a utilisé le néologisme de « décivilisation ». Est-ce pour se donner des airs d'analyste, parlant au-dessus de la mêlée et restant comme insoupçonnable ? « Macron n'est pas un oligarque, note Driss Ghali au passage, il organise la basse-cour pour le compte d'intérêts puissants », son projet est toujours, à travers l’enrichissement de quelques-uns, « la gestion du malheur collectif ». Comment définit-il notre Président ? « Macron est un collabo au sens technique du terme, puisqu’il organise avec zèle l’obéissance de l'administration française aux directives communautaires, ce qui représente un assujettissement au projet communautaire de l’Allemagne ». La hausse continuelle des prix de l’électricité, alors qu'en France, grâce à la filière nucléaire, elle est produite à bas cout, devrait achever d'éclairer les lecteurs : la politique de l’énergie se poursuit dans l’intérêt de l’Allemagne et contre l’intérêt des Français que les députés au parlement de Strasbourg sont censés représenter... Il y a bien la collaboration économique avec l’Allemagne au mépris des Français.

Enfin soulignons que Driss Ghali ne se gêne pas pour défendre I’œuvre civilisatrice de l’Empire colonial français partout dans le monde. À propos de la colonisation, écrit-il, « on ne nous raconte que les crimes, pas les services rendus. Mensonge immense car les crimes coloniaux ont coïncidé avec les inestimables cadeaux distribués aux quatre coins de l’Empire. L'Algérie a été brutalisée mais elle a été aussi accouchée par la France et seulement par la France, qui lui a donné un État, une unité et des frontières de la Méditerranée au nord du Mali. Le Maroc a été domine, mais il a été sauvé de l'anarchie qui était sur le point de le dissoudre en une poussière de tribus belliqueuses et sous développées. Le Cambodge a été colonisé, mais il a été préservé du grand remplacement que lui promettaient les Vietnamiens. Le Sénégal a été exploité, mais il a été réunifié et transformé en un pays viable ». Une telle défense du passé colonial français n'est pas courante aujourd’hui. C’est que Driss Ghali est un passionné, aujourd'hui inconsolable car « ce vieux platane » qu'est la France a un trône qui sonne creux. Elle s'évide de l’intérieur, mais il faut le souligner pour finir, la vraie colonisation à laquelle elle fait face n'est pas celle qui provient des anciens colonisés. La France est peut-être en train de s'éteindre, mais c'est de I'américanisation qu'elle souffre le plus profondément. Si vous lisez ce livre n'hésitez pas à aller jusqu'au bout. Le chapitre a pour titre "24 heures en France". Driss raconte son voyage en France avec moult détails : « À chaque fois que je remets les pieds en France, j’ai l’impression de retrouver une passion de jeunesse qui a mal vieilli. Elle avait de beaux cheveux, elle les a rasés ; un visage harmonieux, elle l'a couvert de piercings une ceinture fine, elle l’a noyée dans un tonneau de cellulite. Je chéri le souvenir d'une princesse et j'ai sous les yeux une punk à chien ».

Driss Ghali, Français, ouvrez les yeux !, L'artilleur 2023. 18 €.

Georges Bourcier Monde&Vie 29 juillet 2023

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