Dédiabolisation ? C’est une évidence. Normalisation ? Ça en prend le chemin.
D’ailleurs, parmi ces 57 %, 19 % des sondés tiennent la principale intéressée pour « très sincère », contre 42 % ne la considérant « pas sincère » du tout. Pour affiner les résultats de cette enquête d’opinion, notons que 60 % de nos compatriotes pensent que la présence du mouvement lepéniste était parfaitement légitime lors de ce défilé. Un résultat qui se monte, sans surprise, à 93 % chez les électeurs du RN, à 97 % pour ceux de Reconquête! et à 78 % des électeurs de Valérie Pécresse, candidate LR lors de la dernière élection présidentielle.
Sans grande surprise non plus, les mélenchonistes sont d’un avis contraire (67 %), tandis que leurs homologues macronistes se divisent sur la question à proportion quasi égale. Et c’est là que la météo politique devient inquiétante pour Emmanuel Macron, dont l’absence lors de la manifestation plus haut évoquée lui vaut des appréciations plus que mitigées : 56 % approuvent cette démarche, contre 46 % de mécontents. On notera donc qu’en y étant présente, Marine Le Pen obtient une approbation légèrement supérieure. Mais il est vrai que cette dernière ne se fait peut-être pas dicter sa politique, intérieure comme extérieure, par l’humoriste Yassine Belattar, à l’instar du locataire élyséen.
À cette embellie sondagière, plusieurs explications possibles
La première, c’est qu’en se rendant à ce défilé, Marine Le Pen ne marche pas pour défendre les politiques israélienne ou palestinienne : mais seulement par empathie pour nos compatriotes de confession juive, victimes de l’insécurité grandissante qu’on sait, surtout dans certains quartiers. S’agissant de leurs homologues de religion musulmane, elle aurait sûrement fait de même, politique patriote et inclusive oblige.
La deuxième consiste à ne pas oublier que Marine Le Pen n’entend manifestement pas transformer ce conflit oriental en guerre des civilisations, à rebours d’un Éric Zemmour où d’une Marion Maréchal dont les prises de position peuvent paraître porteuses de contradictions. En effet, quand le premier se rend en Israël pour défendre la civilisation judéo-chrétienne, la seconde s’en va en Arménie pour y défendre cette même civilisation. Mais qui arme l’Azerbaïdjan musulman contre les chrétiens arméniens, si ce n’est l’État hébreu ? Il est vrai qu’un tel soutien permet à Tel-Aviv d’avoir un œil sur Téhéran, l’Azerbaïdjan et l’Iran ayant des frontières communes…
La troisième, c’est que dans le conflit israélo-palestinien, Marine Le Pen semble savoir raison garder, persistant à promouvoir la solution traditionnelle de la France, celle de deux États, la seule qui vaille, quoique ne paraissant pas devenir d’actualité dans les mois prochains ; c’est le moins qu’on puisse prétendre.
La quatrième, c’est que l’ensemble de la gauche française se fourvoie en sa vision de ce conflit, ne l’analysant qu’au prisme marxiste : dominants contre dominés, Palestiniens opprimés et oppresseurs israéliens. Alors que Marine Le Pen aurait plutôt tendance à y voir l'affrontement entre deux nationalismes se battant pour la même terre. En la circonstance, chacun a ses raisons, toutes aussi valables l’une et l’autre. Il se trouve seulement que l’époque serait plutôt à la déraison.
Cela, des personnalités telles que Serge Klarsfeld, s’étant bruyamment félicité de la présence du RN dans le cortège en question, ou même un Bernard-Henri Lévy, plus que critique quant à la politique de colonisation sauvage de la Cisjordanie, le reconnaissent.
Bref, Marine Le Pen a semé. Aujourd’hui, elle paraît engranger. Quant aux sondages, ils ne font qu’entériner.