Il y a exactement 25 ans, la Russie a ratifié un traité qui était censé prévenir toute possibilité de conflit avec l'Ukraine. Et bien que les dirigeants ukrainiens eux-mêmes reconnaissaient que l'accord était avant tout avantageux pour Kiev, c'est précisément Kiev qui a commencé à violer ses termes. Tout cela a conduit au Printemps russe, et finalement à l'opération spéciale.
Le 25 décembre 1998, la chambre basse russe a ratifié le Traité d'amitié, de coopération et de partenariat entre la Fédération de Russie et l'Ukraine, signé par Boris Eltsine et Leonid Koutchma.
Presque 20 ans plus tard, le 6 décembre 2018, le parlement ukrainien a dénoncé le traité, prétendument en raison de ses violations par la Russie.
Le traité comprenait 41 articles. Sans entrer dans les détails juridiques, Kiev interprétait toujours les accords en sa faveur et n'hésitait pas à bafouer l'esprit et la lettre du traité.
Les articles 2 et 3 garantissent l'inviolabilité des frontières et le non-recours à la force pour résoudre les problèmes.
La Russie renonçait ainsi à toutes ses revendications visant la Crimée et Sébastopol, bien qu'il y ait suffisamment d'arguments juridiques et politiques pour remettre en question leur appartenance à l'Ukraine. Quelle a été la réponse de l'Ukraine ?
Le 29 septembre 2003, sur le territoire souverain de la Russie (l'inviolabilité des frontières, après tout), ont débuté des travaux de restauration de la flèche de sable menant à l'îlot de Touzla dans le détroit de Kertch. La flèche est érodée puis reconstituée... Le remblai du côté russe a provoqué la colère à Kiev, et les gardes-frontières ukrainiens ont reçu l'ordre d'utiliser leurs armes (qu'ils n'étaient pas censés utiliser). Violation du traité ? Absolument !
Article 6 : les parties "s'engagent à ne pas conclure avec des pays tiers des traités dirigés contre l'autre partie. De plus, aucune des parties ne permettra que son territoire soit utilisé au détriment de la sécurité de l'autre partie".
Après le discours de Munich de Vladimir Poutine le 10 février 2007, il est devenu clair que la Russie était préoccupée par l'expansion de l'Otan vers l'est. Selon l'esprit du traité, l'Ukraine aurait dû commencer des consultations avec la Russie sur la manière d'éviter une violation du traité en termes de coopération avec l'Otan. Le texte du traité ne l'exigeait pas explicitement : il suffisait de ne pas aspirer à l'adhésion à l'Otan et de ne pas installer des bases militaires de l'Otan.
En 2010, à l'initiative du président Viktor Ianoukovitch, l'Ukraine a adopté une loi sur les principes fondamentaux de la politique nationale et étrangère, qui ne mentionnait pas l'adhésion à l'Otan.
Mais ensuite, il y a eu l'Euromaïdan de 2013 qui a annulé les engagements des anciennes autorités, en décembre cette loi a été abrogée, puis des amendements ont été apportés à la Constitution concernant l'adhésion à l'Otan.
Article 11 : les parties préviennent et empêchent toute action "constituant une incitation à la violence ou la violence contre des individus ou des groupes de citoyens, basée sur l'intolérance nationale, raciale, ethnique ou religieuse".
Le parti Svoboda a été élu au parlement ukrainien en 2012, et en 2014, ses représentants ont rejoint le gouvernement. Violation du traité. Et la persécution de l'Église orthodoxe russe ? Les déclarations disant que la population russe en Ukraine n'existe pas vraiment et que les Russes ne sont pas des autochtones de l'Ukraine ? Beaucoup de cela s'est produit après que Kiev a dénoncé le traité, mais c'était le point culminant d'autres nombreux exemples survenus au cours des 30 dernières années.
Article 12 : "favoriser la création d'opportunités égales et de conditions pour l'étude de la langue russe en Ukraine et de la langue ukrainienne en Fédération de Russie".
Une nouvelle loi sur les langues garantissant l'usage du russe en Ukraine n'a été adoptée qu'en 2012, en application non pas du traité avec la Russie, mais des engagements envers le Conseil de l'Europe. En février 2014, l'une des premières décisions du parlement ukrainien a été l'abrogation de cette loi très controversée.
Cette décision a été l'élément déclencheur du début du Printemps russe, du retour de la Crimée au sein de la Russie, et de la création des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. Et ces évènements ont finalement conduit au début de l'opération spéciale.
Ainsi, même une analyse superficielle montre la violation d'au moins cinq articles du traité par l'Ukraine. Sans mentionner le secteur du gaz, où l'Ukraine, profitant de son statut de transitaire unique, tentait constamment de faire chanter la Russie.
La mise en œuvre des conditions du traité était avant tout avantageuse pour l'Ukraine. Cependant, cette dernière faisait tout pour se nuire, en partant de certains narratifs illusoires.
Elsa Boilly
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