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« Depuis 1971, le Conseil constitutionnel s’est érigé en quasi-législateur »

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Source Boulevard Voltaire cliquez ici

La loi Immigration, adoptée par le Parlement le 19 décembre dernier, a été lourdement censurée par le Conseil constitutionnel le 25 janvier. Guillaume Bernard, historien du droit et politologue, répond aux questions de BV et dénonce un coup d’État du Conseil constitutionnel.

Raphaëlle Claisse : La censure du Conseil constitutionnel sur la loi Immigration vous a-t-elle étonné ?

Guillaume Bernard : Cette censure était prévisible dans la mesure où, depuis une cinquantaine d’années, depuis 1971 plus précisément, le Conseil constitutionnel s’est érigé en quasi-législateur. Certes, il ne peut pas s’autosaisir, mais il a transformé le contrôle de constitutionnalité tel qu’il avait été prévu en 1958 par Michel Debré.

En 1958, le contrôle était prévu après le vote de la loi et avant sa promulgation pour éviter qu’une loi ne déséquilibre les institutions. Or, depuis 1971, le Conseil a créé, de manière prétorienne, le bloc de constitutionnalité. En effet, il utilise un certain nombre de normes, comme la Déclaration des droits de l’homme, le préambule de la Constitution de 1946, pour juger de la politique qui est décidée par la représentation nationale. Il ne fait pas que défendre l’équilibre institutionnel, il prend des positions politiques pour autoriser, ou non, ce qui est voulu par les représentants des Français.

Deux moyens auraient permis aux hommes politiques de prévenir un tel fiasco, le premier était d’organiser un référendum, car pour l’instant, le Conseil ne se permet pas de vérifier la constitutionnalité d’une loi référendaire. La deuxième possibilité est de réviser la Constitution et d'y introduire un certain nombre de principes de défense de la nation, comme le principe de préférence nationale.

RC : Selon une députée Renaissance, le Conseil constitutionnel ne fait pas de politique. Qu’en pensez-vous ?

GB : Je ne partage pas cet avis, notamment pour les raisons que j’ai évoquées, c’est-à-dire le bloc de constitutionnalité composé de différents textes qui contient des dispositions qui sont parfois contradictoires et dans lesquelles le Conseil peut piocher à sa guise pour autoriser, ou non, la politique voulue par les représentants des Français. C’est donc une décision politique. Certes, le Conseil ne peut pas s’autosaisir, mais dans la mesure où il est saisi, il peut se permettre d’autoriser ou non une politique. On sait que les dispositions déclarées inconstitutionnelles sont censurées, elles ne peuvent pas être promulguées. Il y a donc un choix politique qui va à l’encontre du principe démocratique de l’État de droit et qui peut aller à l’encontre de la volonté générale. C’est extrêmement choquant.

RC : Selon vous, quelle serait la solution face à la mainmise du Conseil constitutionnel sur la vie politique du pays ?

GB : Il y a deux mesures à prendre de manière urgente. Tout d’abord, dans le contrôle de constitutionnalité par voie d’action, c’est-à-dire celui qui intervient après le vote de la loi et avant sa promulgation, il faut revenir à ce qui était prévu en 1958, à savoir un contrôle strictement par rapport à un texte constitutionnel, pour empêcher qu’une loi ne puisse faire revenir, par exemple, vers les régimes d’assemblée des IIIe et IVe Républiques. C’est un contrôle pour protéger l’équilibre institutionnel. Deuxième mesure à prendre : le contrôle de constitutionnalité par voie d’exception, créé par la révision de 2008 dans le cadre de la question prioritaire de constitutionnalité, qui permet à un justiciable de dire à l’occasion d’un procès qu’une loi viole ses libertés fondamentales. Là, le contrôle de constitutionnalité pourrait continuer à se faire par rapport au bloc de constitutionnalité, parce qu’il ne s’agit pas de faire entièrement confiance au législateur. En revanche, il faut que la décision prise par le Conseil, ne concerne que le cas d’espèce : écarter l’application de la loi et non abroger la loi.

Propos recueillis par Raphaëlle Claisse

http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2024/01/28/depuis-1971-le-conseil-constitutionnel-s-est-erige-en-quasi-6482402.html

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