Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

20 août 1940, Trotski assassiné : le communisme dévore ses enfants

leon-trotsky-at-his-desk-40eac9-640
C’est sur les terres lointaines et ensoleillées de Mexico que, le 20 août 1940, alors que l'Europe, et bientôt le monde, basculaient dans la guerre, disparut l’un des grands artisans de l’URSS. Exilé des steppes gelées de l’ancienne Russie impériale par ses camarades soviétiques, Léon Trotski s’est réfugié en Amérique latine afin de continuer la lutte. Cependant, Staline ne l’avait pas oublié. Malgré la distance et le temps, Trotski était toujours un danger pour la domination du sanguinaire « petit père des peuples » sur l’ensemble de l’Empire soviétique.

Un combat à mort

La chute de Trotski commence avec le décès de Lénine en 1924 : la lutte s'ouvre pour la conquête du pouvoir. Vladimir Ilitch lui-même entrevoyait déjà avant sa disparition le duel à mort qui opposerait ses deux héritiers spirituels. En Staline, il ne perçoit qu’un personnage grossier « ayant concentré tous les pouvoirs », selon Stéphane Courtois, tandis qu’il considère Trotski, surnommé le « Gourdin de Lénine », comme « capable mais péchant par zèle ». Cependant, l'intellectuel Trotski ne pressent pas immédiatement le danger stalinien. Il est peu à peu ostracisé tandis que Staline s’empare du pouvoir et du parti. Les accusations de traîtrise à la cause bolchevique et à la mémoire de Lénine sont sans cesse lancées à la figure de Trotski, qui peine à trouver des alliés. Car Staline a réussi à rallier à lui et à placer des partisans dans tous les rouages des systèmes politique et administratif de l’URSS. « L’homme d’acier » va jusqu'à changer l’Histoire, un talent que les communistes sauront exercer pendant des décennies, en effaçant Trotski des photos officielles et en amoindrissant sa participation dans la révolution de 1917. Après cinq années de luttes acharnées, Trotski finit par être exclu du parti en 1927 avant d’être expulsé de l’Union soviétique en 1929. S’il peut quitter sa patrie sain et sauf, ses partisans n’ont pas la même chance. Ils sont pourchassés et bien souvent condamnés à une mort rapide par une exécution ou bien à une mort lente au goulag.

Un long exil

Devenu apatride, Trotski voyage en Europe au gré de l’hospitalité des pays qui veulent bien l'accueillir. Après quatre années passées en Turquie, il arrive en France en 1933 avant de repartir pour la Norvège en 1935. En URSS, Staline exerce la terreur et entame une grande purge en 1936 afin de faire disparaître les dernières traces de résistance à sa volonté, dans le parti et les armées. Pour cela, il fait condamner et tuer les derniers trotskistes qui ont échappé aux purges précédentes. Trotski, accusé lui aussi, échappe à la répression grâce à son exil mais, pour plus de sécurité, décide de fuir l’Europe pour le Mexique. Réfugié à Mexico, il crée une IVe Internationale afin de proposer un autre chemin aux peuples de gauche, contre Staline et son totalitarisme. Ce choix va entraîner sa condamnation à mort et son assassinat.

La mise à mort d’un ancien rival

Se pensant à l’abri dans une maison à Mexico gardée par des fidèles, Trotski ne se fait cependant pas beaucoup d'illusions : il se dit « déjà familier avec la mort […] [ayant] été poursuivi par la haine noire de Staline à travers la moitié du monde ». Il le sait, Staline souhaite faire disparaître une bonne fois pour toutes cet adversaire gênant et cet ancien rival. Le 20 août 1940, Jacques Mornard, un Espagnol communiste à la solde du NKVD, réussit à approcher sa victime en se faisant passer pour un proche de Trotski et de ses idées. À l’aide d’un piolet, et malgré les gardes du corps présents dans la pièce, Mornard assène un coup fatal à l’arrière du crâne de Trotski. Tout de suite arrêté et incarcéré, il ne quittera la prison qu’en 1960 et partira pour Moscou, où il s’éteint en 1978 après avoir reçu comme récompense à son acte « héroïque » la plus haute distinction de l’URSS : l’ordre de Lénine.

Trotski n’a pas succombé immédiatement à sa blessure. Dans ses derniers instants, il aurait eu le temps de prononcer : « Je suis sûr de la victoire de la IVe Internationale. » Un dernier message d’espoir à ses partisans. Ces derniers se regroupent par milliers autour de sa dépouille lors de son enterrement à Mexico où, depuis, il repose. Maculé du sang d’innocentes victimes et d’opposants, Trotski gît ainsi loin de la terre russe, de Staline, de Lénine et de bien d’autres acteurs de la révolution de 1917.

Un destin similaire à nombre de ses anciens camarades car, comme le disait le révolutionnaire français Pierre Vergniaud, « la révolution est comme Saturne : elle dévore ses propres enfants. »

Eric de Mascureau

Les commentaires sont fermés.