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Les parachutages du RN lui ont plus coûté qu’ils ne lui ont rapporté

Le parachutage peut être doré mais il comporte aussi des risques. Pour les 19 candidats RN et affiliés parachutés en 2024 dans les circonscriptions où le RN avait fait plus de 45 % au 2e tour des législatives 2022, il s’est traduit par 79 % de chutes pour 4 heureux élus. Au contraire dans les 59 circonscriptions où le RN avait réalisé plus de 45 % des voix au 2e tour 2022, quand il a maintenu ou présenté des candidats locaux (soit dans 40 de ces circos), il a remporté dans 60 % des cas la victoire.

Le recours au parachutage – toujours mal vu et présumé inutile pour un grand parti bien implanté – a dû au final coûter entre 10 et 15 sièges au RN, l’empêchant de faire jeu égal avec le groupe central probablement. Mais au-delà, il souligne des méthodes népotiques, autoritaires, court-termistes et peu respectueuses des enracinements qui ne sont pas de bon augure. Il a en plus contribué à nourrir le sentiment que le RN sous-estime les électeurs et militants locaux.

Le parachutage aux élections a toujours été une méthode utilisée par les partis. En général mal vue, la méthode pouvait se défendre aux prémices de la démocratie quand les territoires ne généraient pas de candidats – ce n’est plus que rarement le cas- ou à la limite pour des partis comme le FN à leurs débuts pour accélérer une dynamique dans un territoire favorable avec un dirigeant reconnu nationalement. C’était sans doute le cas avec Marine LE PEN dans le Nord-Pas-de-Calais il y a 10-20 ans.

Fin 2022, dans le cadre du fameux et assez prétentieux « Plan Matignon », le RN demanda à ses délégués départementaux de préparer les prochaines élections législatives, estimées imminentes, en proposant pour leurs circonscriptions des candidats. Deux codicilles furent communiqués : (1) si de nouvelles personnes non candidates en 2022 se déclaraient volontaires, il fallait absolument les présenter à l’attention de la CNI (Commission Nationale d’Investiture… dirigée par le triumvirat BARDELLA-MLP-ALIOT ; on jugera la sincérité de ALIOT et BARDELLA à propos de certains « imbéciles » ou « brebis galeuses » investis… par eux-mêmes) ; (2) dans les circonscriptions ou le RN avait réalisé des scores de plus de 48 voire 45 %, les candidats sortants n’étaient absolument pas facilement reconductibles et seraient soumis dans la plupart des cas à des entretiens « audit » (qui dans les faits eurent rarement lieu, semble-t-il).

Ce plan Matignon déjà entaché d’une certaine arrogance – mais c’est un peu la marque des deux compères vraiment à la manœuvre, MM. Jordan BARDELLA et Philippe OLIVIER, plus que Gilles PENNELLE qui payait et paya de sa personne – créa une instabilité en favorisant des opportunistes au profil souvent peu qualitatif qui, jusqu’au succès de 2022, avaient eu peur de se présenter , cela généra en plus des conflits dans les fédérations. D’autre part, évidemment, les bons candidats qui avaient réalisé plus de 45 % se trouvèrent fragilisés et bien conscients que leurs efforts et prises de risques passés allaient servir à placer les proches ou derniers élus de cœur de Marine LE PEN, Philippe OLIVIER ou Jordan BARDELLA.

Au final, si l’on regarde les 19 circos où le RN avait fait plus de 45 % au deuxième tour 2022 – donc super gagnables en 2024 – et décida de parachuter, que résulte-t-il ? Seuls 4 candidats, jusque mieux informé, purent clamer par leur réussite un parachutage doré : Alexandre ALLEGRET-PILOT (30-5) , Guillaume BIGOT (90-2) , Eddy CASTERMANN (02-3), Flavien TERMET (08-1).

Par contre, 15 parachutés – dont beaucoup médiatisés et très sûrs d’eux – ont mordu la poussière voire même fait en pourcentage moins que les candidats 2022 écartés souvent sans ménagement. Les cas les plus emblématiques et au final qui interrogent, vu la dynamique 2024, sont :
Jean-Lin LACAPELLE, ex-député européen RN et très proche depuis toujours de Marine LE PEN, qui dans la 45-5 réalise 49,3 % contre 49,98 % en 2022 pour le solide cadre et militant local Valentin MANENT.
Marie-Caroline LE PEN dans la 72-4 qui réalise 49,77 % là où le candidat Raymond de MALHERBE déjà au FN local dans les années 1980 et conseiller régional et municipal sarthois avait réalisé 49,85 %. Marie-Caroline LE PEN n’hésita pas à raconter des salades mensongères dans un débat France3 pour justifier la mise à l’écart surprenante pour les observateurs locaux du candidat 2022.
Pierre GENTILLET avocat plus médiatique qu’expérimenté politiquement dans la 18-3 qui remplaçait le conseiller régional, ancien chef d’entreprise et ouvrier de la première heure du FN puis RN Thibaut de la TOCNAYE lequel avait obtenu 45,1 % des voix en 2022.
L’ex-préfet et proche de Marine LE PEN Christophe BAY échoue dans la 28-3 la où le RN avait réalisé 46 % en 2022.
Le RN parachutait en 72-3 le jeune assistant parlementaire à l’UE originaire de la Manche et proche de Philippe OLIVIER (gendre de Jean-Marie LE PEN) Romain LEMOIGNE, âgé de seulement 23 ans après avoir poussé dehors sans ménagements le candidat 2022 Bruno PINÇON, militant et cadre local infatigable ainsi qu’ancien chef d’entreprise qui avait obtenu 49,03 % des suffrages en 2022. Le jeune LEMOIGNE ne réalisa que 48,6 %. Des élus locaux sympathisants du RN n’hésitèrent pas à appeler à voter contre lui tellement l’imposture était évidente.

Le parachutage a donc coûté mathématiquement, si l’on proratise, au moins 7 sièges au RN. Mais c’est certainement plus car, dans les départements, un parachutage dans une circo provoque une onde de choc négative dans tout le département ; c’était certainement le cas dans la Sarthe et le Loiret ou le RN paraissait assuré de remporter au moins 6 sièges et où il termine avec seulement 1 (celui de Thomas MÉNAGÉ) du fait sans doute en grande partie des réactions médiatisées négatives aux parachutages. En effet le parachutage envoie trois messages fondamentalement négatifs : (1) Vous, électeurs, n’êtes pas capables de générer vos propres représentants. (2) Les militants les plus méritants ne sont pas reconnus. (3) Le candidat précédent presque élu, la plupart du temps sans casserole et connu, passe à la trappe sans raison sérieuse, le nouveau candidat parachuté est fatalement accueilli avec méfiance. Il y a aussi le plus souvent un manque de crédibilité des parachutés sur les problématiques locales. Dans la 72-4 le parachutage de Marie-Caroline LE PEN frisait le ridicule.

Sur le débat France Bleu Maine FR3 elle déclara qu’on « s’en fiche » que la candidate REM ait redressé une entreprise locale d’emballages et emploie 120 personnes localement. Filmée par un hebdomadaire connu de droite dans une ferme – d’ailleurs en dehors de sa circonscription comme les locaux l’ont bien noté – Marie-Caroline LE PEN qu’on attendait sur les problématiques agricoles difficiles note que « les vaches font du lait » et se fait poser un poussin sur l’épaule au milieu d’une interview soi-disant sérieuse par Victoria de VIGNERAL conseillère régionale RN Pays-de-la-Loire résidente à Bruxelles – une autre parachutée citadine – qui signa en juin 2023 un vœu au Conseil régional Pays-de-la-Loire, confondant le nombre de marins pêcheurs et de pêcheurs à la ligne…

Les parachutages ont été une des grosses erreurs d’investitures du RN aux législatives 2024, comme par le passé. Gilles PENNELLE, vrai rouage de la montée en puissance de l’appareil RN ces dernières années, porta avec un certain courage le chapeau mais, derrière lui, il y avait des dirigeants frisant l’arrogance et certainement peu expérimentés en gestion moderne, objective et sérieuse des ressources humaines : Jordan BARDELLA et Philippe OLIVIER en tête, gonflés par leur mandats européens, décidant mais finalement loin des réalités locales. D’ailleurs l’analyse du taux de renouvellement anormalement élevé des élus FN-RN notamment dans les régions va dans le même sens qui est de questionner ces méthodes autoritaires et distantes ainsi qu’un manque de loyauté aux cadres éloignés et de continuité dans les efforts et appareils locaux.

Raymond de Malherbe

https://ripostelaique.com/les-parachutages-du-rn-ont-plus-coute-au-parti-quils-ne-lui-ont-rapporte.html

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