München steht auf (Munich se lève) est un mouvement qui met sur pied au sein de la capitale de la Bavière, Munich, des manifestations contre la guerre en Ukraine, l’inflation, les mesures coercitives de lutte contre la Covid, la censure, la suppression de l’argent liquide, … Lionel Baland a interrogé à Munich, pour Breizh-info, Benny T., un des responsables de cette organisation.
Breizh-info : Quand München steht auf a-t-il vu le jour ?
Benny T. : Le mouvement München steht auf a été fondé au printemps 2021. Il est issu de la mouvance de protestation contre les mesures anti-Covid qui a émergée en mai 2020. Nous émanons de ce milieu.
Breizh-info : Quelles ont-été les premières actions de München steht auf ?
Benny T. : Nous avons débuté par des manifestations de rue : des participants, une voiture avec des haut-parleurs et un message clair porté vers la population. Nous choisissons d’organiser des défilés plutôt que des rassemblements statiques, donc un cortège fait toujours partie des événements que nous mettons en place.
Breizh-info : Êtes-vous aussi contre la guerre en Ukraine et les livraisons d’armes par l’Allemagne à ce pays ?
Benny T. : Au départ, München steht auf était axé sur un seul thème, celui des mesures anti-Covid, mais, pour nous, la liberté et la paix vont de pair. Nous nous sommes exprimés dés le début contre les livraisons d’armes par notre pays dans le conflit en Ukraine et nous sommes désormais aussi opposés à ce phénomène dans le cadre de la guerre dans la Bande de Gaza.
Breizh-info : La ville de Munich vous crée-t-elle des problèmes ?
Benny T. : Nous ne rencontrons pas en ce moment de sérieux problèmes avec la ville de Munich, mais nous en avons, évidement, eu lors de la phase chaude de la lutte contre les mesures anti-Covid. Durant l’hiver 2021-2022, notre droit de réunion a été confisqué par le maire, l’administration de la ville et le conseil réunissant le maire et ses adjoints. À l’époque, cela était justifié par l’exigence du masque FFP2, alors que nous savons désormais très clairement que cette mesure n’était pas fondée scientifiquement.
Notre liberté de rassemblement nous avait été enlevée. Mais, nous ne nous sommes pas laissé faire. Nous avons dit aux gens que, même si nous ne pouvions plus appeler à des rassemblements, ils pouvaient, malgré tout, encore manifester. Et des personnes l’ont fait par milliers à cette époque. Cela constitue un des meilleurs moments de l’histoire de notre mouvement.
Breizh-info : Avez-vous des connections en Europe avec d’autres mouvements ?
Benny T. : München steht auf n’est pas engagé dans des réseaux internationaux car il se concentre sur Munich, mais il entretient, évidement, des relations avec d’autres groupes bavarois. Nous travaillons volontiers ensemble, mais nous ne nous connectons pas étroitement, d’un point de vue organisationnel, au-delà des frontières nationales.
Breizh-info : Et en Allemagne, avez-vous des contacts avec d’autres groupes ?
Benny T. : Oui, naturellement, avant tout dans le sud du pays. En Bavière, nous sommes, en quelque sorte, l’élément central. Et nous avons aussi de bons contacts au Bade-Wurtemberg, en Autriche et en Suisse.
Lorsque München steht auf a été fondé, Querdenken était le grand mouvement de référence au niveau national et nous avons vu le jour un peu en opposition à celui-ci. En conséquence, nous ne disposons pas de beaucoup de contacts internationaux.
Breizh-info : Et quels sont les autres thèmes abordés par München steht auf ?
Benny T. : La liberté et la paix. Telles sont les questions centrales. Nous invoquons également la Constitution. Donc, à notre avis, nous défendons les valeurs constitutives de notre société, de notre pays.
À l’époque de la Corona, la liberté a été restreinte. Selon nous, en tant qu’Allemands, la paix constitue notre devoir. L’exigence de paix est inscrite dans notre Constitution, ce qui n’est pas nécessairement le cas pour les autres nations. Nous estimons que l’Allemagne a la responsabilité particulière de ne pas alimenter la guerre par des livraisons d’armes. Elle doit rendre possible des négociations de paix afin de mettre fin à la guerre aussi vite que possible.
Et cela constitue, en ce moment, notre exigence centrale à notre gouvernement : « pas d’armes vers les zones de guerre » et « des diplomates plutôt que des grenades ».
Breizh-info : Avez-vous des connections avec des partis politiques qui sont contre la guerre ?
Benny T. : Nous ne disposons pas de liens organisationnels afin de collaborer avec quelque parti que ce soit, mais nous entretenons évidement quelques contacts avec l’un ou l’autre député isolé ou des personnes importantes dans des partis politiques.
Nous soutenons clairement tous les partis qui n’adhèrent pas au consensus en faveur de la guerre. Pour nous, en ce moment, le parti patriotique Alternative für Deutschland (AfD) et le parti de gauche anti-immigration Bündnis Sarah Wagenknecht (BSW) sont, à notre avis, ceux qui font partie de ce domaine, ainsi que, peut-être, le parti conservateur Werteunion. Nous ne désirons pas trancher entre la gauche et la droite.
Nous sommes contre les partis politiques du consensus et nous sommes, en conséquence, opposés aux démocrates-chrétiens de la CDU, aux sociaux-démocrates du SPD, aux écologistes de Bündnis 90/Die Grünen, aux libéraux du FDP et aux post-communistes de Die Linke. Et nous sommes en faveur des partis qui brisent le consensus : AfD et BSW.
Breizh-info : Mais le parti post-communiste Die Linke est contre la guerre ?
Benny T. : Die Linke n’est pas positionné d’un point de vue conséquent contre la guerre, ni pour celle-ci. Ce parti n’a pas réalisé ses choix assez rapidement et assez bien par rapport au conflit qui se déroule en Ukraine. En revanche, lors du début de la guerre à Gaza, Die Linke s’est profilé rapidement.
Mais je comprends très bien que les cadres du BSW disent qu’ils ne peuvent plus travailler avec Die Linke et estiment qu’ils doivent fonder leur propre parti afin de mettre en œuvre leurs principes de manière cohérente. Et c’est la raison pour laquelle je soutiens le BSW et pas Die Linke.
Breizh-info : Et n’y a-t-il pas parfois de contre-manifestants ?
Benny T. : Cette situation est très rare, car il n’y a pas à Munich de milieu organisé pouvant agir contre nous. De plus, le fait que la Bavière est gouvernée depuis toujours par les conservateurs a pour conséquence que nous devons peu faire face à des contre-manifestations, bien que, sur certaines questions, les sociaux-démocrates du SPD et les syndicats appellent à des démonstrations. Mais lorsque cela arrive, les personnes qui viennent sont celles avec qui il est possible de discuter raisonnablement, contrairement à ce qui se passe à Francfort-sur-le-Main, Leipzig ou Berlin.
Breizh-info : Que pensent les gens quand il y a une manifestation ?
Benny T.: De nombreuses personnes nous font savoir qu’elles sont d’accord avec nous. La grande majorité était, au début, juste curieuse, intéressée. Mais au cours des presque trois ans et demi que nous avons passés dans la rue, il y a eu une nette amélioration en termes de réactions. À l’époque, en 2021-2022, il y avait encore beaucoup de gens qui nous étaient ouvertement hostiles, qui nous condamnaient. Depuis lors, très peu le font encore à priori. La grande majorité a un certain intérêt pour nos messages. Et nombreux sont ceux qui manifestent ouvertement leur solidarité avec ceux-ci et scandent enthousiasmés, avec nous, nos slogans appelant à ne pas livrer d’armes. De plus en plus de gens sont aussi critiques, à postériori, des mesures prises à l’époque de la Covid. En conséquence, Il est clair que la tendance est à ce que nos thèmes soient de plus en plus largement acceptés par la société.
Breizh-info : Et la presse du système ?
Benny T. : J’appelle désormais la presse du système « médias de consensus », car, de mon point de vue, nous avons atteint le point que ceux-ci ne représentent plus le courant dominant. Ils désirent toujours apparaître ainsi. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder le nombre de vues qu’obtiennent des entretiens conduits par Tucker Carlson.
Aucun média grand public ne peut faire cela. Ainsi, les médias alternatifs deviendront les médias pertinents et donc aussi les médias grand public. Les médias de consensus, qui se rassemblent tous dans ce consensus qui nous prive de liberté, dans ce consensus qui prône la guerre, ne veulent pas nous parler.
Nous avons essayé, à maintes reprises, d’avoir un dialogue raisonnable avec eux, mais ils sont malhonnêtes. Ils prennent certaines déclarations et les déforment ensuite. Et nous avons de moins en moins d’intérêt à entrer en contact avec eux. Nous continuerons à essayer de toute façon, simplement par principe.
Les médias alternatifs sont devenus plus pertinents et, en conséquence, nous leur consacrons plus d’énergie.
Breizh-info : Et pourquoi les partis du système sont-ils en faveur de la guerre, par exemple les sociaux-démocrates du SPD et les démocrates-chrétiens de la CDU ?
Benny T. : Des personnes ont des réponses différentes à ces questions. La mienne est que ces formations politiques représentent le statut quo, exactement de la même manière que cette guerre. Donc, à mon avis, cela constitue pratiquement une question existentielle. Les partis seraient probablement dépourvus de pertinence encore plus rapidement et disparaîtraient probablement encore plus vite s’ils ne continuaient pas simplement à soutenir cette situation parce qu’ils ont déjà perdu leur crédibilité. Ils ne sont probablement plus capables de se réformer et les gens ne les croiraient plus. Et c’est pourquoi leur seule façon de survivre est simplement de maintenir la situation inchangée aussi longtemps que possible. Ce n’est pas une analyse intelligente, mais c’est peut-être la réponse simple.
Breizh-info : Désirez-vous ajouter un élément ?
Benny T. : Ce qui est le plus important à dire, selon moi, est que vous devez faire entendre votre voix. Ceux qui gardent le silence acceptent la situation. Si vous descendez dans la rue, vous pouvez faire la différence.
Nous l’avons vu avec les mesures anti-Covid. Les millions de manifestants pacifiques, en Allemagne, ont repoussé l’obligation générale de vaccination et, dans toute l’Europe et dans le monde entier, ont bloqué et arrêté l’agenda de la Covid.
Et nous pouvons faire la même chose pour toutes les autres questions : au sujet de la guerre, de la liberté, de la souveraineté et sur tout ce à propos de quoi nous trouvons un consensus social suffisamment large.
Et cela signifie aussi que vous êtes tolérant à l’égard de certains aspects, envers les personnes que vous percevez comme étant de gauche ou de droite, avec lesquelles vous ne voulez pas nécessairement être vu dans la rue. Mais si nous parvenons à poser nos problèmes comme plus importants que le clivage gauche-droite, alors nous pouvons créer tout ce que nous voulons.
Propos recueillis par Lionel Baland
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