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[TRIBUNE] Macron et l’insécurité, ou l’art de ne rien dire

violence ville
Photo de Kayle Kaupanger sur Unsplash
À l’occasion de l’intervention télévisée du président de la République, un moment, un court moment, a été consacré à la sécurité. En particulier à l’avenir des polices municipales. En face d’Emmanuel Macron, pour aborder ce sujet, Robert Ménard, le médiatique maire de Béziers. La question de M. Ménard était simple. En substance, « Monsieur le Président, je suis maire et confronté, dans ma ville, à une criminalité galopante et hors de contrôle. Que pouvez-vous faire pour moi ? » Face à cette question d’une simplicité biblique, Emmanuel Macron n’a pas manqué de rebondir sur le thème, à la mode il est vrai, du renforcement des pouvoirs des policiers municipaux. Dès lors, la première réaction qui pouvait venir à l’esprit était celle de se demander pourquoi, en huit ans de pouvoir, jamais rien n’a été fait.

Quelques pistes éculées et improbables

Car depuis 2017 et l’émergence du concept de « continuum de sécurité » qui promettait de transformer la donne sécuritaire dans notre pays, rien de concret et de véritablement opérationnel ne s’est produit. Et ce ne sont pas les rencontres entre spécialistes, dénommées « Beauvau » (du nom de l’endroit où elles eurent lieu) qui changèrent la donne. Ainsi, force est de constater que, parvenu en 2025 et à deux ans à peine de la fin de son mandat, Macron n’a absolument rien lancé dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres d’ailleurs.

Alors, pressé par un Robert Ménard en verve, Emmanuel Macron n’a rien trouvé de mieux que de reprendre quelques pistes éculées et improbables reposant sur un raisonnement pour le moins limité. C’est ainsi que resurgit l’idée de renforcer les compétences judiciaires des policiers municipaux. Idée déjà traitée et évoquée par le passé, et qui n’avait séduit ni de nombreux maires ni le Conseil constitutionnel. Mais il fallait bien dire quelque chose ! Amalgamant allègrement vidéoprotection, contrôle des procureurs et amendes délictuelles, sans véritablement maîtriser ces sujets, le président de la République a surtout évité de parler du fond, c’est-à-dire de l’insécurité qui gangrène le pays, et des vraies solutions pour y remédier.

Il aurait fallu un véritable questionnement sur le fonctionnement global de nos forces de sécurité

Si j’avais un message à faire passer à Emmanuel Macron, il serait le suivant : Monsieur le Président, ce n’est pas tant de prérogatives judiciaires supplémentaires que les policiers municipaux ont besoin, et qu'ils ne veulent pas pour la plupart, que d’outils techniques susceptibles de faciliter l’exercice de leurs missions quotidiennes. Il faut bien comprendre que les polices municipales constituent la troisième force de sécurité intérieure, avec un peu plus de 28.000 agents. Et ce sont ces fonctionnaires municipaux qui assument quasi exclusivement, désormais, la sécurité du quotidien en France. Pourtant, votre administration et certains élus en sont encore à discuter du bien-fondé de les armer correctement. De l’utilité qu’ils auraient à pouvoir consulter l’ensemble des fichiers opérationnels de police. Ou bien, encore, de la possibilité, en cas d’infraction, de procéder à un relevé d’identité. Et j’ajouterais : Monsieur le Président, ce dont notre pays a le plus besoin, c’est la présence de policiers en uniforme sur la voie publique. Pas de plus de fonctionnaires enfermés dans des bureaux à rédiger des procédures.

Recrutements, armement généralisé, outils techniques opérationnels appropriés, voilà le triptyque gagnant. Bien sûr, cela suppose un véritable questionnement sur le fonctionnement global de nos forces de sécurité publique. Et nous savons qu’elles ne vont pas bien. Que les recrutements en police et gendarmerie sont difficiles. Qu’il existe, au sein de ces deux forces, une véritable crise des vocations dont vos politiques en matière de sécurité et vos prises de position personnelles à l’occasion de certaines affaires sont en grande partie responsables. Nous savons qu’il existe également une vraie rupture avec la Justice. Surtout par un manque de magistrats et de moyens, mais également, pour partie d’entre eux, pour des raisons idéologiques.

En conclusion, penser pouvoir résoudre les difficultés des uns sans prendre en considération l’ensemble des problèmes et dysfonctionnements de tous les acteurs qui concourent à la sécurité et à la paix publiques ne peut que conduire à un échec. Mais les échecs, c’est vrai, vous en avez l’habitude.

Olivier Damien

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