À 6h40, sur l’autoroute A8, à hauteur de Mandelieu-la-Napoule, un SUV blanc, venu de l’autre sens de circulation, les a percutées de plein fouet, à pleine vitesse. Leur voiture rouge a été littéralement décapitée. Les images du choc sont impressionnantes. Ambre et Clémence sont mortes sur le coup. Elles n’avaient rien demandé à personne. Elles n’avaient rien fait de mal.
Le chauffard est mort, lui aussi. Il avait une vingtaine d’années, de l’alcool dans le sang, de la cocaïne dans le nez et une bouteille de protoxyde d’azote (ce fameux gaz qui rend con) à ses pieds. Son passager est en urgence absolue.
Sur les réseaux sociaux, les témoignages décrivent des femmes pleines de gentillesse et de dévouement, de « belles personnes » - même si le terme est exaspérant, on comprend ce qu’il décrit. Le personnel de l’hôpital Arnault-Tzanck de Mougins est sous le choc. Son communiqué résume le sentiment général : « Ambre et Clémence étaient pleinement engagées dans leur métier, reconnues pour leur humanité et leur professionnalisme. Leur disparition bouleverse profondément leurs collègues, l’ensemble de notre établissement et tous ceux qui ont eu la chance de les côtoyer. » Une cagnotte a été lancée par l’hôpital pour soutenir ses proches. À ce jour, elle a permis de récolter près de 30.000 euros.
On ne devrait pas tarder à connaître le profil du chauffard. Il y a fort à parier que l’on ne sera guère surpris. Excès de vitesse au petit matin, alcool, drogue et protoxyde : tout le monde sait. Et tout le monde sait également, presque deux ans jour pour jour après les émeutes liées à la mort de Nahel, que quand ce sont des infirmières nommées Ambre et Clémence qui meurent dans un accident de la route, rien ne brûle, personne ne casse. C’est le drame des citoyens ordinaires : ils sont suprêmement corrects.
Et maintenant, que va-t-il se passer ? Y aura-t-il une marche blanche ? La famille refusera-t-elle toute récupération ? Va-t-on trouver une artiste pour interpréter Parlez-moi d’amour avec une boîte à musique, comme lors des attentats d’Annecy (Parlez moi d’amour par Laure Pauthex lors de la cérémonie citoyenne d’Annecy) ? Les vies ordinaires, à la différence des vies des racailles, sont souvent timidement honorées.
Ambre et Clémence, deux vies fauchées par la bêtise et la décivilisation. « Trois vies emportées », commente Christian Estrosi, sur X. Ce n’est pas tout à fait exact, car la vie du chauffard est partie par sa propre faute. C’est presque une forme de suicide.