Combat royaliste 81
Par Philippe Germain
L’Europe, dernier bastion progressiste, est sortie de l’Histoire. Inversement, la guerre israélo-américano-iranienne vient de confirmer que l’Histoire est faite par les nations de « l’internationale réactionnaire ». Depuis l’épisode de la covid, le retour DU politique pousse cette internationale idéologiquement hétérogène dans la défense d’intérêts nationaux contradictoires, voire conflictuels.
Les relations internationales ont de tout temps passionné Charles Maurras et, en 2006, son élève Gilles Varange élabora une connaissance sur la « revanche des nations ». Dans l’indispensable essai Entre empires et nations, un chemin français, le bainvillien clarifia la mode géopolitique comme recherche des conditions de la puissance maximale alors que la diplomatie recherche l’équilibre et l’indépendance maximum. La géopolitique s’accorde à la mentalité démocratique du culte du nombre, à l’opposé de la leçon des penseurs grecs pour qui le monde n’appartient pas à la quantité mais à la qualité.
C’est pourquoi la géopolitique fut incapable d’anticiper l’effondrement de l’énorme masse soviétique de 1989. Tout aussi incapable de prévoir le retournement afghan contre son allié américain car, contrairement à la diplomatie, la géopolitique ignore que les amis d’hier deviennent souvent les ennemis du lendemain et inversement. Cela n’empêcha pas le géopoliticien Francis Fukuyama de décréter « la fin de l’Histoire », suivi par Georges Bush proclamant un « nouvel ordre mondial ». À cette erreur succéda Samuel Huntington avec sa géopolitique du « choc des civilisations » qui, pour Varange, revenait à opposer l’Islam comme remplaçant du communisme à l’Occident atlantiste. Pour le bainvillien, l’Islam se briserait sur le même écueil qui avait causé la perte du communisme : les réalités nationales et les ambitions régionales (renaissance des empires perse et ottoman). Aujourd’hui, la réalité nationale américaine vient également de briser l’alliance atlantiste de l’Occident. Plus que choc des civilisations, Varange soutint le concept de revanche des nations.
Dans la revanche des nations et des empires renaissants, Varange concluait en reprenant la connaissance maurrassienne de Kiel et Tanger sur le « rôle de la France dans le monde », perpétuant la tradition capétienne de désenclavement de la France face à l’empire Plantagenet, à l’Ouest, et au Saint Empire Romain Germanique, à l’Est. Une politique étrangère d’équilibre, stable et libérée des luttes incessantes entre partis,jugée indispensable dans un monde qui ne sera pas des plus tranquilles. « Les faibles y seront trop faibles, les puissants trop puissants et la paix des uns et des autres ne reposera guère que sur la terreur qu’auront su s’inspirer réciproquement les colosses. » C’est pourquoi Maurraspropose la nation française en chef de file des puissances moyennes. Reconnaissant son autorité morale, elles se libèreraient de la vassalité imposée par les puissances impériales. Leurs alliances permettraient à la France de« manœuvrer » avec force dans le jeu des nations.
Malgré la destruction méthodique de la diplomatie française réalisée par Emmanuel Macron, cette connaissance néo-maurrassienne de « la revanche des nations » de Varange, actualisant celle « du rôle de la France dans le monde » de Maurras, pourrait inspirer les derniers technocrates gardant le sens de l’État, celui des relations internationales et le souci de la grandeur de la nation.
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L’âge post-progressiste : Vers l’âge post-progressiste, Le surgissement des monstres, L’enjeu porte sur la civilisation,L’alternative des nations italienne et hongroise
Ligne politique nationaliste : Synthèse empirique de nos constats,L’école d’action française comme force de propositions, Atout géopolitique et eurocriticisme, Civilisation catholique et esprit latin