Pierre Boisguilbert signe une charge corrosive contre des médias prisonniers de leurs obsessions idéologiques. Entre illusions estivales et fébrilité de rentrée, il perce à jour le récit bien-pensant et démontre la perte de crédibilité d’une presse dominante en déclin.
Polémia
Un été des illusions médiatiques
Cet été, une fois de plus, rien de ce que mes médias du bien ont annoncé – parce qu’ils le souhaitaient – ne s’est produit. Pas plus de trêve en Ukraine qu’à Gaza. Les médias ont connu un été difficile entre deux canicules où, comme pour le Covid, ils nous expliquaient qu’il fallait boire de l’eau et conseillaient de rester chez nous. Pas encore de fiche à remplir pour avoir le droit de sortir le chien, mais la prochaine fois ça viendra.
Le méchant de l’été a été indiscutablement Poutine, suivi de près par Netanyahu. Trump n’a toujours pas bonne presse mais, comme il n’a pas giflé Zelensky, il s’en sort un peu mieux que d’habitude. Finalement, il aura été plus bête que méchant pour nos médias français, si subtils eux.
Cela ne concerne que l’Ukraine bien sûr, car pour le reste les médias ont glosé sur canicule autoritaire touchant les USA selon eux, les États-Unis qui seraient en passe de devenir une démocradure… alors qu’en France on s’oriente vers une dictamolle. Nos médias, qui ne savent comment se débarrasser de leurs bêtes noires internationales, annonçaient ces derniers jours la fin de Trump pour raisons de santé (pieds gonflés, hématomes aux mains), comme ils l’avaient fait – avec le succès que l’on sait – pour Poutine au début de l’opération russe, soi-disant atteint d’un cancer en phase terminale.
Ce qui n’est certes pas en phase terminale, ce sont les guerres en Ukraine et à Gaza. En ce qui concerne les trêves, on a eu un été des dupes. Nos journalistes des droits de l’homme ukrainien et gazaoui sont passés par toutes les couleurs émotionnelles.
Le plus drôle fut l’Alaska : le tapis rouge, la poignée de main et les applaudissements de Trump à Poutine. Envoyés spéciaux et commentateurs étaient pétrifiés et vitrifiés. D’où une hystérie euphorique lors du déplacement des « 7 nains » reçus à Washington.
La présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen était du voyage, après sa capitulation douanière toute honte bue comme d’habitude, aux côtés de plusieurs dirigeants européens à la Maison Blanche, et du président ukrainien Volodymyr Zelensky. On y a vu Emmanuel Macron, le chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier ministre britannique Keir Starmer, la présidente du Conseil italien Giorgia Meloni, le président finlandais Alexander Stubb, sans oublier le secrétaire général de l’OTAN.
Après avoir salué un succès diplomatique ayant sauvé l’Ukraine d’un pacte américano-russe et marquant le retour en force de l’Europe, nos médias ont petit à petit reconnu qu’en fait il y avait des images humiliantes de soumission et aucun résultat concret à court terme. La Russie veut toujours un accord global écartant de sa zone historique certains pays de l’OTAN.
Ce n’est pas difficile à comprendre, et il y aura sans doute, après un accord de paix toujours improbable, plus sûrement un règlement sur le terrain ou autour de soldats indiens plutôt que hollandais. Mais certaines badernes médiatiques et commentateurs militants, flagornant à l’extrême des Ukrainiennes autoproclamées analystes de référence, poussent à l’engagement militaire de façon irresponsable.
Parfois, l’absence d’esprit critique sur LCI concernant l’Ukraine est incompréhensible et rappelle certains plateaux de CNews traitant d’Israël. Mais la violence antisémite en France, qui a été un fait de l’été et décrite sur la chaîne de Praud, explique en partie son succès incontestable.
Une rentrée sous tension médiatique
C’est BFM qui souffre le plus : pas au niveau de LCI sur l’international et complètement larguée sur le sécuritaire par CNews. La chaîne qui voulait dominer l’info en continu est sur la défensive, perd des plumes et change les rendez-vous et présentateurs de sa grille, signe d’une extrême fébrilité.
Le remplacement à la matinale de Christophe Delay se révélera vite une erreur : il était fait pour ça. Quant à son alter ego Adeline François, elle avait un humour discret qui tranchait agréablement avec les gloussements un peu forcés et systématiques de certaines de ses consœurs. Un rajeunissement ne fait pas une ligne éditoriale.
Si cette ligne jugée macroniste et bien-pensante ne change pas, BFM va poursuivre une lente descente de son audience en berne. Et ce n’est pas l’arrivée de Cohn-Bendit qui va renverser la table. S’il y a bien un boomer indiscutablement responsable de ce qui nous arrive au niveau de l’école et de l’autorité (et, par charité, inutile d’évoquer les mœurs), c’est bien lui.
La fascination des médias pour ce révolutionnaire obsolète est un mystère, ou participe du « privilège rouge médiatique » dont parle William Goldnadel.
Quant à Pascal Praud, bête noire de la rentrée – comme Poutine et Trump –, accusé d’être responsable de tout ce qui arrive, comme le souligne obsessionnellement Dupont-Moretti, il peut garder le sourire. L’actualité le sert, à condition qu’il ne s’enferme pas dans un rabâchage parfois dissuasif et des positions sociétales jeunistes qui font plaisir à ses filles mais pas forcément aux téléspectateurs de la chaîne.
Sa défense des boomers montre qu’il a sans doute senti le danger. CNews a brisé le discours unique du PAF et on veut le lui faire payer le plus chèrement possible. Mais il faudra attendre encore un peu, car les antifas d’opérettes auront en cette rentrée bien d’autres sujets dont ils vont s’inquiéter plutôt que de l’inexorable progression de CNews derrière la locomotive Praud.
Quoique ! Dans ce domaine aussi, il n’y a aucune trêve à attendre.
Pierre Boisguilbert
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