À l’origine de la charge de l’ancienne porte-parole du gouvernement de Jean-Marc Ayrault sous François Hollande, le succès en libraire de la maison Fayard avec trois livres et auteurs qui affolent les compteurs de l’édition, en ce mois de novembre. Jordan Bardella, Philippe de Villiers, Éric Zemmour : les mousquetaires de la plume enchaînent les records de ventes. Du 3 au 9 novembre, le palmarès edistat, énumérant les 200 meilleures ventes de la semaine, toutes catégories confondues, classait Ce que veulent les Français en cinquième position, Populicide en septième et La messe n’est pas dite en vingtième.
Le « système » Bolloré
Une réussite insolente de la maison Fayard qui fait pâlir le monde politico-médiatique à deux titres. D'abord, les auteurs appartiennent à la droite nationale ; ensuite, ils sont publiés par une maison faisant partie du groupe Hachette Livre, géré par le groupe Lagardère, détenu lui-même par Vivendi, contrôlé par Vincent Bolloré. Inévitablement, lorsque Najat Vallaud-Belkacem s’exprime sur ce sujet, son sang ne fait qu’un tour.
« Aujourd’hui, on a le sentiment que ce qui a été réussi dans cette vaste famille d’extrême droite et de droite extrême, avec comme tête de pont Vincent Bolloré, a-t-elle commenté à l’antenne, c’est la mainmise sur à la fois un monde médiatique, un monde éditorial, à travers ses maisons d’édition, un monde de distribution, qui permet de faire caisse de résonnance. »
Cette intolérable activité se rapproche d’une organisation mafieuse, explique très sérieusement Najat Vallaud-Belkacem, qui expose calmement ses attaques pernicieuses. « Il faut le reconnaître, ils ont réussi à mettre en place une espèce de système, totalement intégré, dans lequel ce sont toujours les mêmes qu’on va entendre, sur les antennes, sur les ondes, dont on va survaloriser le moindre livre, […] pour lequel on va mettre en place un plan de distribution extrêmement efficace. » Mais attention, lorsque le système médiatique met en avant l’égérie de la gauche progressiste Salomé Saqué ou l'économiste Gabriel Zucman, par exemple (l’auteur de la taxe), cela n’a absolument rien à voir : l’ancien ministre chargé des Droits des femmes souligne qu’il ne peut s'agir en aucun cas d’une caisse de résonance « aussi organisée ».
Neutralité et impartialité
Que l’ancienne porte-parole de Ségolène Royal et François Hollande, lors de leurs campagnes présidentielles respectives, porte l’estocade à Vincent Bolloré ne surprend pas. Que l'épouse du président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale voue aux gémonies le président du Rassemblement national, le fondateur du Puy du Fou et l’ancien candidat Reconquête à la présidentielle, rien de surprenant. En revanche, que celle qui est désormais conseillère maître à la Cour des comptes se permette ainsi de porter une analyse et un jugement partial sur la vie politico-culturelle de notre pays est plus problématique. Nommée en juillet par Pierre Moscovici, bénéficiant par là même de son CV socialiste, celle que Marc Baudriller qualifiait dans BV de « farouche militante pro-immigration » devrait observer désormais, selon un règlement propre à la Cour des comptes, un devoir de réserve.
Le Code de déontologie de la Cour spécifie que les magistrats de l’institution « veillent dans toute expression publique à respecter leur obligation de réserve et de loyauté, et à ne pas porter atteinte à la nature et la dignité des fonctions exercées, ainsi qu’à l’image et à la réputation des juridictions financières ». Le point 11, notamment, est suffisamment explicite : « Les personnes concernées par la Charte font en sorte, dans leurs comportements tant professionnels que privés, de ne pas se trouver dans une situation qui pourrait porter atteinte ou paraître porter atteinte à l’impartialité et à la neutralité de la juridiction. » Najat Vallaud-Belkacem est aussi présidente de France terre d’asile, association immigrationniste assumée. Preuve que le principe de neutralité et d’impartialité, de facto, revêt une conception toute relative, à la Cour des comptes.