Il y en a, décidément, pour qui la vie n’est pas un long ministère tranquille. Prenez Arnaud Montebourg, par exemple… Déjà, le nom de son ministère, créé spécialement pour lui, ne fait pas sérieux : « Ministère du redressement productif ». On pense aussitôt à une réclame pour valoriser les effets du viagra ! Surtout quand le malheureux en charge de la chose se fait larguer peu après par sa médiatique compagne Audrey Puylvar… Mauvaise pioche !
Pour oublier ses déboires sentimentaux, rien ne vaut une déclaration de matamore, s’est-il dit… Pourquoi pas, alors, menacer le propriétaire indien du site Arcelor-Mittal de Florange dont la fermeture avait été annoncé comme inéluctable, faute de rentabilité, d’une nationalisation temporaire ? En voilà une idée qu’elle est bonne… pour se faire immédiatement renvoyer dans les cordes par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault ! Pas sérieux ? Non, pas possible ! Le pauvre Montebourg est le seul pour qui impossible est français !
On démissionnerait pour moins que cela ! « On », peut-être, mais pas lui qui a encaissé « sans moufter », le torse raide dans sa marinière et la larme à l’œil.
Tant qu’on est ministre, il y a de l’espoir, n’est-ce pas ?
Mais c’est à croire qu’aucune humiliation ne lui sera épargnée ! Après celle d’un indien, notre ministricule vient d’essuyer celle d’un yankee !
Le PDG américain de Titan International envisageait de reprendre l’usine de pneus Goodyear d’Amiens-Nord, elle aussi menacée de passer en mode inactive !
Mais M. Taylor, PDG en question de Titan International, a écrit à notre Ministre décidément malchanceux, qu’il n’en était pas question. En cause, la « productivité » de nos ouvriers, qualifiés par l’intéressé de « soi-disant ouvriers » : leur cadence de travail laisserait, paraît-il, à désirer… On ose le croire !
« J’ai visité cette usine plusieurs fois. Les salariés français touchent des salaires élevés, mais ne travaillent que trois heures. Ils ont une heure pour leurs pauses et leur déjeuner, discutent pendant trois heures et travaillent trois heures (…) Je l’ai dit en face aux syndicalistes français. Ils m’ont répondu que c’était comme ça en France », écrit M. Taylor au ministre.
Et de peur sans doute de ne pas être bien compris, le malotrus se fait encore plus lourd que nécessaire en précisant : « Monsieur, votre lettre signale que vous voulez que Titan démarre une discussion. Vous pensez que nous sommes si stupides que ça ? (…) Titan est celui qui a l’argent et le savoir-faire pour produire des pneus. Qu’a le syndicat fou ? Il a le gouvernement français. »
Interrogé, le mis-en-ridicule a refusé de commenter cette lettre : « Je ne veux pas nuire aux intérêts de la France », a-t-il dit.
La question serait plutôt : que pourrait-il bien répondre, sinon une grossièreté « réchaufée », puisque déjà passée à la postérité dans la bouche du général Cambronne… ou peut-être encore d’adapter la si élégante réplique de notre ancien président : « Casse-toi, pauvre cow-boy ! » ?
Une grossièreté, évidemment, si ça soulage sur l’instant, ça ne fait guère progresser la discussion… qui de toute façon, est close côté outre-atlantique.
La question de la productivité de nos ouvriers syndiqués est un vaste débat sur lequel les avis seront sans doute aussi passionnés que partagés. Évitons pour l’heure de nous y engager.
Concluons néanmoins qu’il est tout de même étonnant qu’à chaque fois qu’une entreprise française va mal, certains puissent se réjouir qu’un étranger – qatari, yankee ou autre – envisage d’en devenir propriétaire.
À croire qu’il n’y a du bonheur qu’à ne plus rien posséder et à trimer pour les autres.
« La propriété, c’est le vol », disait en son temps Pierre-Joseph Proudhon, éminent sociologue, premier Français à se revendiquer comme « anarchiste »… et antisémite notoire à ses heures (ce qu’oublient nombre de citoyens « de gauche » contemporains qui ne manquent pas de célébrer l’intéressé comme une grande figure s’il en est ! Pourquoi pas !(1)
En attendant, le Ministère d’Arnaud Montebourg est en passe de se voir sous peu rebaptisé « de la scoumoune productive » !
P. Randa http://francephi.com
Note
(1) Pour ceux qui s’intéresserait à la question, je ne manque pas l’occasion de leur indiquer mon livre Les « Antisémites » de gauche (éditions de L’Æncre), co-écrit avec Roland Gaucher.