Pourquoi la biologie se voit-elle traitée de science réactionnaire et fasciste ? Sans doute, parce qu'en étudiant l'homme scientifiquement et honnêtement, elle fait pièce aux utopistes rousseauistes, marxistes et aux nouveaux loups enfarinés qui prennent aujourd'hui leur relève.
Henri de Lesquen et le Club de l'Horloge nous présentent ici une admirable synthèse de la science moderne et aussi le fruit de leurs réflexions. Gros ouvrage (313 pages avec les notes et la bibliographie), aucune illustration graphique mais de nombreux exemples et les références aux travaux des savants les plus prestigieux (et les plus sérieux) de notre époque.
Nous ne présenterons pas au lecteur l'aspect pédagogique de leur ouvrage ; nos auteurs, qui comptent parmi les vraies « grosses têtes » françaises, démontrent absolument tout ce qu'ils avancent et démontent les hérésies de l'idéologie égalitaire (1).
C'est la faute à Rousseau
La première partie de ce livre se nomme fort justement : « L'utopie et la mort ». Elle démolit, avec une précision féroce, l'utopie de l'égalitarisme. Le doux (?) Jean-Jacques Rousseau porte la responsabilité des crimes de la révolution française et, indirectement, de tous ceux (combien de millions d'êtres ont disparu dans ce colossal holocauste ?) commis par la prise et le maintien au pouvoir des communistes. L'excellent style de ses ouvrages, entre autres « le Contrat social » et «l'Emile», cache ses erreurs de pensée - et leur flou - mais aussi sa haine sous-jacente contre la société. On connaît la ritournelle : l'homme naît naturellement bon, la société le rend mauvais. Aux origines, l'homme vivait seul dans une nature amicale puis il rejoignit ses semblables et se pervertit. Pauvre Jean-Jacques ! Il oublie - et pourtant la science de son époque ne l'ignorait point - que l'homme vécut en société depuis les origines et que la nature n'a rien d'un jardin à l'anglaise. Et l'homme est naturellement agressif. Qu'on le change donc et le « doux philosophe » aboutit au despotisme, s'en réclame même ; et de préciser : « ... tous les particuliers redeviennent égaux parce qu'ils ne sont rien ». Autrement dit, pour Rousseau, 1 n'est pas 1 mais 0 égale 0.
Marx et quelques autres
Rousseau croyait en la déchéance de l'homme. Marx voulait le renvoyer au paradis perdu. On connaît le sort de ses prétendues théories scientifiques (le socialisme scientifique opposé, O dérision, au socialisme utopiste !); huit ans après leur publication, sa théorie sur la valeur du travail tombait en désuétude et elle représentait la base de tout son édifice ; mais comme le font remarquer nos auteurs, les doctrines de Marx s'emboîtent comme les poupées russes : purement économiques, elles contiennent un sous-produit social selon lequel l'individu, élément statistique, doit être considéré comme négligeable. Marx a déduit, de faits isolés, des règles générales et on connaît le sort de son réductionnisme : rien de ce qu'il a prévu ne s'est réalisé. Pire, en s'inspirant d'autres travaux, comme ceux de Darwin, il a mal compris, il a cru que l'homme était indéfiniment malléable, qu'il suffisait de l'éduquer pour en faire l'homme nouveau, l'homo communiste. Ses successeurs ont cru que Lyssenko leur apportait la solution finale : la transmissibilité des caractères acquis (comme si en coupant un bras à plusieurs générations successives de singes, on obtiendrait enfin un chimpanzé manchot !). Quant à Pavlov, expérimentant sur des animaux de laboratoire au moyen d'un système de « récompense-punition », il devait faire progresser l'acquisition de nouveaux comportements (dés lors, il suffisait de combiner les travaux des deux hommes ... ).
L'utopie du XXe siècle
Tout comme les idées de Rousseau, la doctrine marxiste-léniniste débouche fatalement sur l'utilisation de la violence et de l'oppression. Les goulags soviétiques, les génocides d'Indochine et du Cambodge le montrent à foison. Jamais le prolétariat n'a été soumis à une pression aussi dure et aussi avilissante par une stratification de classes, une hiérarchie pire que celle des tsars. Le marxisme passe de mode. Direction : les poubelles de l'histoire mais comme notre intelligentsia - quoi qu'elle s'en défende - ne respecte que la force, elle se tourne vers une nouvelle utopie venue d'Amérique du Nord. Elle y influença considérablement les penseurs et les hommes politiques ; elle refuse pudiquement la responsabilité des crimes du marxisme ; elle a impressionné les « nouveaux philosophes » qui croient de moins en moins en Marx au bénéfice de Rousseau («... de Scylla on retourne en Carybde », remarquent nos auteurs). Mais ne nous y trompons pas : cette nouvelle utopie nous promet les affreux lendemains de la terreur française et des camps de concentration soviétiques ou chinois. Ces loups enfarinés continuent à prêcher, contre toute évidence, l'utopie de, l'égalitarisme et son corollaire, l'environnementalisme.
Un rat = un homme
Cet égalitarisme forcené amène les nouveaux utopistes à faire table rase de toutes les hiérarchies et aboutit tout aussi fatalement au collectivisme. Mais enfin ces censeurs ne sont pas spécialement des imbéciles ; ils se rendent compte que la science moderne contredit formellement leurs élucubrations. Peut-être faut-il voir là le ressentiment de gens qui se sentent d'une façon ou de l'autre opprimés ou encore le moyen idéal de réaliser leur volonté de puissance à leur bénéfice ? En fait, nos auteurs voient en toute idéologie une « combinaison, souvent explosive, d'une passion et de l'esprit de système ». Une de ces théories parmi les plus dangereuses est le behaviourisme (ou théorie du comportement). Utilisant des animaux de laboratoire sélectionnés (ils ont éliminé ceux vraiment trop rebelles à leurs expériences), ils ont tiré de méthodes de laboratoire uniquement (jamais, ils n'ont expérimenté sur des animaux sauvages), les grands principes de leur fausse science : on peut apprendre n'importe quoi à n'importe qui ; chaque être humain naît avec en place de cerveau une « page blanche » que le milieu et les circonstances remplissent ; il suffit de le faire dans le « bon sens » pour aboutir à la société idéale. Que les autres sciences, les vraies, comme la biologie ou l'éthologie, les contredisent, aucune importance : par distorsion, ils modifient le sens des mots (comme, par exemple, pour l'hérédité qui, pour eux, n'existe pas) ou qualifient leurs contradicteurs de sciences non-neutres, donc engagées, lisez fascistes.
Et pourtant ...
... chaque homme est un individu physiquement, moralement et intellectuellement différent des autres. Les découvertes de la génétique nous ont montré les rôles des chromosomes et décrit les différences génétiques. Force est donc, malgré les «répugnances» des égalitaires, à l'impact de l'hérédité et à celui de l'éducation spécialement au sein de cette « niche écologique » qu'est la famille (Voici d'ailleurs une des raisons pour laquelle la famille sert de cible aux autoritaristes-égalitaristes). Les recherches modernes ont démontré qu'il existe une certaine part d'héréditabilité de l'intelligence (étudiée par des méthodes comme la mesure du quotient d'intelligence - le Q.l. -, apparemment un «facteur g» représentant l'intelligence générale). Autre élément mais qui mérite des études supplémentaires : l'héritabilité de certains caractères de la personnalité.
Résumons très fort : l'individu subit la culture de la société où il vit : elle lui est imposée quelle que soit sa biologie propre. Mais dissocier ces deux ordres de fait revient à commettre un sophisme, c'est-à-dire à oublier que le tout n'est pas la somme de ses parties.
Autre erreur : raisonner à partir d'un individu moyen ou statistique, en oubliant les personnalités qui, par leur envergure, ont influencé le cours de l'histoire (Napoléon, par exemple).
L'homme est un animal
Jean Rostand le dit et il situe même assez facilement notre espèce humaine dans ce règne. Proches de nous sont les primates, au point que, chez eux, il a été possible de repérer nos groupes sanguins les plus répandus et de donner du sang de chimpanzé, sans inconvénient par voie intraveineuse, à un homme. Mais, et retenons bien ceci, tout l'homme n'est pas dans l'animal. Ainsi, des chimpanzés font preuve d'intelligence, mais « seule la pensée conceptuelle et le langage qui apparaît avec elle rendent la tradition indépendante de la présence de son objet en créant le symbole libre lui permet de communiquer des faits et des raisonnements dans la disponibilité matérielle des objets qui le concernent » (Conrad Lorenz). Et, répétons-le une fois de plus, le tout est plus que la somme de ses parties, du moins dans les sciences humaines.
Comprendre l'homme
Les behaviouristes ont obtenu tous leurs succès en travaillant sur des bêtes de laboratoires, sélectionnées et dégénérées, jamais sur des animaux en liberté. Cette lacune sera comblée par la nouvelle école : appliquant leurs trouvailles à l'homme, elle va découvrir l'explication de bien des secrets de la loi naturelle. Rappelons les principaux : la toute-puissance de l'instinct, condition de la liberté comme l'a montré Lorenz, et surtout l'agressivité.
L'agressivité, cette méconnue
C'est une pulsion qui fait agir spontanément l'homme et l'animal. Elle ne dépend pas d'une série de frustrations (quoique le cas soit parfois possible) mais définir l'agressivité revient à se poser la question : « A quoi le mal est-il bon ? ». Disons que selon Lorenz, « c'est un instinct de combat (...) dirigé contre son propre congénère ». Soit, mais encore ? Ses fonctions principales :
• elle sert à organiser une vie autonome au sein de l'espèce ; la sociabilité permet à l'homme de vivre avec les autres tout en s'affirmant comme autonome au sein de la société.
• elle contribue au développement culturel en permettant la répartition des tâches et l'équilibre de la vie.
• elle maintient l'équilibre psychique en utilisant le potentiel énergétique de chacun (comme, par exemple, la recherche scientifique).
• elle confirme son impact sur le monde extérieur (esprit de recherche, de découverte ... ).
A l'inverse, on peut affirmer que, là où l'agressivité est trop durement réprimée, naissent les névroses issues des frustrations.
Nécessaire, mais ...
Si, chez l'animal, cet instinct d'agressivité reste réduit à des limites raisonnables (si on peut dire !), il n'en va pas de même chez ses frères supérieurs. Il importe d'inhiber cet instinct, de le ritualiser, de le canaliser en quelque sorte pour l'empêcher de devenir purement destructeur. Le canaliser ? Oui, mais comment ? Vers des disciplines sportives, vers la recherche scientifique, la découverte et l'exploration de l'espace (jadis, les tournois de chevalerie remplirent admirablement leur fonction de ritualisation).
A notre époque, cette canalisation devient d'autant plus indispensable que l'entassement urbain supprime la distance de sécurité à laquelle des humains peuvent se supporter. Les petits loubards de quartier sont là pour le démontrer mais l'utopie égalitariste préfère accuser la société et s'attendrir sur leur triste sort que sur celui de leurs victimes (comme ce fut le cas de l'assassin d'un enfant !).
La dominance
L'instinct de dominance mène à établir une hiérarchie entre les individus, hiérarchie indispensable si l'on veut voir fonctionner la société. Si l'on en veut un exemple irréfutable, il suffit de regarder une organisation qui se veut égalitaire, celle qui proclame la dictature du prolétariat : l'U.R.S.S. En réalité, pour faire fonctionner n'importe quel type d'organisation humaine, il faut laisser agir cet instinct de dominance qui aboutit à la hiérarchie, indispensable conservatrice des élites qui doivent mener les affaires publiques.
Nature ou culture
Le rousseauisme renaît. Il prend des formes diverses dont l'écologie et le Club Méditerranée (la « civilisation égalitaire, artificielle et provisoire des cocotiers, de l'île perdue, du paradis retrouvé »). Mais ce retour à la nature suppose un abandon des valeurs culturelles, une récession de notre civilisation jusqu'à l'abrutissement total. Que l'on se souvienne des différents « enfants sauvages » dont le premier baptisé Victor et trouvé en 1800 : les dégâts cérébraux dus au manque de formation intellectuelle sont toujours irréparables. « L'homme à l'état de nature, ce n'est pas un rêve, c'est un cauchemar. » En bref : la culture seule permet à l'homme de développer son cerveau pour répondre aux défis que lui lance la nature. Or les théories égalitaires et leurs sous-produits, le manque de contraintes culturelles de la civilisation, font naître cette « tiédeur mortelle des sentiments » dont parle Lorenz.
Et de plus, hélas, le laxisme des faux princes qui nous gouvernent leur fait oublier que gouverner, c'est contraindre et, à force d'accorder trop de liberté, ils finiront par tuer la Liberté.
La caféaulaitisation
Barbarisme. A tous les points de vue. Les utopistes égalitaristes veulent mélanger toutes les races humaines pour obtenir un être humain couleur café-au-Iait et aux yeux légèrement bridés. Du coup, et les mondialistes s'en pourlèchent d'avance les babines, les barrières nationales tomberont et l'humanité connaîtra la paix. La paix éternelle, celle des tombeaux car, dans ce cas, l'homme cessera d'exister et cédera la place à une peuplade de robots au service de quelques poignées d'illuminés.
Le pari de la liberté
Notre humanité, notre monde, notre cosmos disparaîtront un jour mais de mort naturelle. En attendant cet inéluctable perspective, nous devons nous défendre contre le péril mortel que nous fait courir l'égalitarisme. Existe-t-il un remède ? Certes. Cultivons notre liberté et ses responsabilités en suivant les leçons de la loi naturelle, celle surtout de la hiérarchie qui crée les élites. Une nouvelle chevalerie surgira qui sauvera notre monde. C'est ce grand livre passionnant qui le démontre.
A. SITTINGER
(1) : Henry de Lesquen et le Club de l'Horloge: «La politique du vivant», Albin Michel, Paris, 1979.
Qu'est-ce que l'éthologie ?
Malgré l'anthropologie (étude de l'homme) qui se consacrait plutôt à l'étude physique de notre espèce, l'ethnologie (rattachée à la sociologie) qui s'adonnait plus à l'étude de peuplades africaines ou polynésiennes qu'à l'espèce elle-même, la véritable science de l'homme faisait peu de progrès. Les premières notions d'éthologie vinrent des Anglo-Saxons et le terme «ethology» a pris aujourd'hui le sens de biologie du comportement.
C'est une science comparative : elle observe le comportement des animaux pour y découvrir l'origine et la fonction de ces comportements (à partir d'animaux d'espèces différentes).
Parmi ses plus grands représentants, citons Lorenz et Eibl-Eibesfeldt qui rencontrèrent d'ailleurs de très vives critiques de la part des «savants» behaviouristes et marxistes dont ils contredisaient les assertions fallacieuses en se basant sur des faits scientifiques.
Lyssenko ou l'évolution contrôlée
En 1937, Trofim Lyssenko, agronome soviétique, s'en prend à la génétique classique (fasciste, bien sûr). Il affirme sa théorie selon laquelle il est possible de rendre héréditaire les caractères acquis. Tout simplement : si vous coupez la queue à plusieurs générations de souris, vous finirez par obtenir des souris naissant dépourvues de cet ornement. De même, si vous formez des générations de bons citoyens soviétiques, chacun spécialisé dans sa tâche, vous obtiendrez des bons citoyens par droit de naissance. Une armée de robots. Les vrais savants (russes) qui osèrent le contredire périrent dans les camps de concentration et maintenant encore, l'économie et l'agriculture soviétiques ne se sont pas remises des élucubrations de ce charlatan.
Un aspect de l'égalitarisme moderne
« Echec et maths », ainsi ont baptisé ce chapitre les spirituels auteurs de « La politique du vivant » et d'expliquer : la mathématique moderne fait appel à des notions de la théorie des ensembles ; cette sorte de philosophie des mathématiques s'adresse aux mieux doués en cette matière, capables d'un haut degré d'abstraction : pour les autres, elle est susceptible de provoquer non seulement des échecs graves mais encore ce que Stella Baruk, elle-même ancien professeur, a nommé une « névrose mathématique ».
Comme les parents, formés aux mathématiques classiques, s'avèrent incapables d'aider leurs enfants, les plus pauvres en seront victimes puisque les classes les plus aisées seront seules capables de payer des « Cours de rattrapage ». Signalons, pour être justes, que la Belgique, toujours à l'avant-pointe du progrès en matière d'égalitarisme, a fait supprimer les examens, ce qui permet d'éviter de faire redoubler une classe : on est tous égaux, non ?
le nouvel EUROPE MAGAZINE mars/avril 1979
La science contre l'utopie
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