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Le choix délibéré des catholiques

17 novembre, 13 janvier, 24 mars et bientôt sans doute 26 mai... Que se passe-t-il lorsque 100 000, un million, un million et demi de personnes défilent dans la rue ? Et quand une police aux ordres s'obstine à évaluer à 300 000 personne une population trois ou cinq fois plus nombreuse ? Le mensonge d’État a réveillé le peuple endormi des catholiques.
Cette majorité silencieuse qui s'effrite et semblait disparaître dans notre beau pays, reçoit, par la grâce du mensonge hollandais, une extraordinaire leçon de vie. Et voilà que la France bien élevée, comme dit Gabrielle Cluzel, se rebelle. Elle relève la tête, se rend compte que malgré les curés pitoyables qui ont fait le vide dans les églises, elle est encore capable de se regrouper, de compter, de se compter et de peser. Sur un sujet purement symbolique comme le mariage homosexuel, ce poids peut apparaître de manière éclatante. Qui niera qu'il faut un homme et une femme, non seulement pour faire un enfant, mais pour lui donner ses repères et lui permettre de devenir un adulte harmonieusement ?
La Gauche a voulu commencer par le plus facile : tout un train de mesures qui vont du « travail sur les cellules de l'embryon humain » jusqu'à l'euthanasie. Les stratèges du Président ne se sont pas aperçus que, justement parce que cette toute première mesure du mariage pour tous était symbolique et, en quelque sorte, purement verbale, elle ne lésait personne et permettait un splendide regroupement contre elle. L'euthanasie ? On aurait trouvé des cas épouvantables pour faire passer la loi sur de l'émotionnel. Le mariage des homosexuels, c'est une de ces mesurettes qu'Hollande apprécie parce qu'elles n'ont l'air de rien, mais en même temps le symbole était si clair qu'il ne pouvait pas ne pas rallier, unanimes, tous les adversaires de la Culture de mort. Qui sont-ils ? Les catholiques, qu'ils soient pratiquants ou de « tradition ».
Je sais, Frigide Barjot, la Grande Organisatrice et porte-parole s'obstine à parler d'une manifestation purement laïque. Samedi saint, elle est allé dire à l'UOIF, cette organisation islamique française proche des frères musulmans extrémistes, qu'ils représentaient « l'espérance » dans cette affaire. Quelle espérance ? Peut-on compter sur les musulmans pour défendre le mariage, alors que pour eux le mariage c'est un homme et jusqu'à quatre femmes et que « le beau modèle », Mohammed, avait des femmes à ne pouvoir les compter ? On peut certes s'appuyer sur les populations extra-européennes qui ont encore le sens du droit naturel - on a vu un député communiste guadeloupéen voter contre le « mariage » homo. On peut solliciter aussi bien sûr les populations musulmanes, mais certainement pas, comme le fait Frigide, aller chercher l'islam comme religion. Ce qu'ajouterait l'islam religieux en l'occurrence, alors que l'idée même du « mariage » homosexuel n'avait pas effleuré l'esprit de Mahomet, relèverait surtout de la détestation des homosexuels et non de la défense du mariage.
La nécessité de l'engagement
Ce qui apparaît comme particulièrement étonnant, c'est que les journalistes politiques saisissent bien mieux que Frigide Barjot le sens, foncièrement chrétien, de son propre combat. Alors qu'elle s'est obstinée à faire disparaître les branches de buis bénit le 24 mars (dimanche des Rameaux), alors qu'elle se garde de toutes références chrétienne, au risque de tomber dans un simplisme caricatural, il apparaît que si la loi a une chance de ne pas passer, c'est au nom des racines chrétiennes de la France et en opposition à un laïcisme dans lequel Patrick Buisson a raison de voir le fléau de la laïcité.
Et si la loi passait ? Au moins les catholiques se seraient-ils définitivement réveillés, comprenant désormais d'instinct quel absurde chloroforme est le laïcisme obligatoire, alors que ce qui est en cause aujourd'hui pour le PS - son cœur de cible, celui du Grand Orient de France - c'est la destruction méthodique de toute sociabilité chrétienne.
À propos de journalistes politiques, je viens d'évoquer Patrick Buisson et son entretien flamboyant dans le Figaro Magazine des 5 et 6 avril. Mais je pourrais également évoquer Charlie hebdo cette même semaine, pour une analyse de Jean-Yves Camus, intitulée Jésus revient en politique. Partant des « Assises de la résistance chrétienne », qui regroupaient l'ensemble du Tradiland catholique, à peu d'exceptions près, Camus explique avec beaucoup de sensibilité que les traditionalistes ne sont pas seuls en cause. Je cite Charlie : « Même quand l’Église vit avec son temps, elle ne peut, pour des raisons religieuses, qu'être anti-moderne. Elle a fait la paix avec la République, mais, comme l'écrit Emile Poulat, "jusqu'où peut-elle désarmer devant un esprit qui n'est pas le sien et qui n'y prétend pas ?" La réponse des Assises de la résistance chrétienne est : "Aujourd'hui, les problèmes politiques sont tellement radicaux qu'ils deviennent des problèmes spirituels. Nous touchons à la vérité elle-même, foi athée contre foi chrétienne." ». Pourquoi faut-il que ce soit Charlie Hebdo qui explique ça à Frigide Barjot ? Le monde est mal fait !
D'autant plus que nous vivons un moment-charnière, comme l'a observé le cardinal Vingt-Trois lors de la messe chrismale, mercredi saint dans sa cathédrale.
Évoquant les difficultés rencontrées par les catholiques confrontés à des changements sociétaux considérables, il s'est écrié : « Vouloir suivre le Christ nous inscrit dans une différence sociale et culturelle que nous devons assumer. Nous ne pouvons plus attendre des lois civiles qu'elles défendent notre vision de l'homme. Nous devons trouver en nous-mêmes et en notre foi au Christ les motivations profondes de nos comportements. La suite du Christ ne s'accommode plus d'un vague conformisme social. Elle relève d'un choix délibéré qui nous marque dans notre différence ». Ce choix délibéré ne va pas forcément jusqu'à la politique, selon le cardinal. Mais il n'exclut pas que le chrétien d'aujourd'hui doive s'engager, ne serait-ce que pour faire respecter sa différence.
Abbé G. de Tanoüarn monde & vie 9 avril 2013

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